Fissures dans la glace : troisième épisode
Règles à briser, premier livre N.J. Lysk
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Titre original : Cracking Ice: episode 3 Première édition Copyright © 2019 N.J. Lysk Fissures dans la Glace Première édition en français Copyright © 2020 N.J. Lysk Traduit de l’anglais par : Rachel Lestage Sous la direction de : Victoria Tesson
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Table des Matières
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Droits d'Auteur
Fissures dans la Glace 3
Troisième épisode : Ardeur
Chapitre 28 : Keenan
Chapitre 29 : Cartwright
Chapitre 30 : Keenan
Chapitre 31 : Cartwright
Chapitre 32 : Keenan
Chapitre 33 : Cartwright
Chapitre 34 : Keenan
Chapitre 35 : Cartwright
Chapitre 36 : Keenan
Chapitre 37 : Cartwright
Chapitre 38 : Keenan
Chapitre 39 : Cartwright
Chapitre 40 : Keenan
Chapitre 41 : Cartwright
Quatrième épisode : Chaleur
Chapitre 42 : Keenan
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À propos de l’auteur
« Forget your perfect offerings There is a crack, a crack in everything That's how the light gets in. » Leonard Cohen
(« Oubliez vos offrandes parfaites Il y a une fissure, une fissure dans tout C’est ainsi que la lumière pénètre. ») Leonard Cohen
Le hockey était toute leur vie... jusqu’à leur rencontre. Tout ce que veut Keenan Avali, c’est jouer au hockey. Peu importe qu’il soit un alpha, il n’a aucun intérêt à dominer ailleurs que sur la glace. Quand Cartwright Johnson ret les Flammes de l’Enfer, il s’attend à devoir jouer dur pour compenser le fait d’être un oméga ayant osé poursuivre une carrière d’hockeyeur professionnel. Après que sa dernière équipe l’échange, il ne fera plus jamais l’erreur de s’intéresser à un coéquipier. Il est certain qu’il a tout sous contrôle pour que son pantalon et son cœur restent fermés... jusqu’à sa rencontre avec Keenan Avali. Un oméga ne peut pas faire confiance à un alpha, encore moins à un alpha aussi séduisant qu’Avali, mais personne ne peut manquer le fait qu’ils jouent ensemble comme s’ils étaient faits pour cela. Mais pour combien de temps encore peuventils être les parfaits coéquipiers sur la glace, alors qu’ils sont incapables de se er dans la vraie vie ? Voici le troisième épisode de « Fissures dans la glace », une romance sur des ennemis confrontés à l’amour dans le monde du hockey, avec un soupçon de révolution.
Un énorme merci à : FourFreedoms & Hazel de m’avoir fait aimer le hockey à nouveau.
Troisième épisode : Ardeur
Chapitre 28 : Keenan
Il en avait trop fait sur la glace et il le sentait encore au moment où ils embarquaient dans l’avion pour la Pologne. Thomas lui lança un bref regard avant de lui er un masque de nuit que Keenan prit en hochant silencieusement la tête pour le remercier. Même s’il n’avait jamais bien dormi en avion, Thomas dut le secouer pour le réveiller quand ils atterrirent. Il semblait inquiet. — Qu’est-ce qui ne va pas ? — Je suis allé patiner, it-il en bâillant au point que sa mâchoire craqua distinctement. — Tu as quoi ? s’écria Thomas. Nous avions deux jours de repos ! — Je sais... J’y suis seulement allé. J’avais besoin de me changer les idées. Je sais que c’est digne d’un débutant, mais... — Qu’est-ce qui est digne d’un débutant ? l’interrompit Santiago en ant près d’eux pour sortir, comme toujours incapable de rester assis le temps que les portes s’ouvrent. — Il a été patiner, l’informa Thomas, incrédule, en secouant la tête. Santiago fronça pensivement les sourcils. — Ah, d’accord, comprit-il. Je l’ai presque fait aussi, mais Amanda ne m’a pas laissé faire. — Peut-être est-ce de ça qu’Avali a besoin, une tendre moitié pour le garder dans le droit chemin, le taquina Thomas. Keenan sentit son estomac tomber dans ses talons. C’était exactement ce qu’il voulait. Et ce n’était pas un lointain fantasme qu’il gardait pour un autre jour. Ses hormones devaient envoyer des signaux contradictoires à son cerveau, parce qu’il le voulait tellement qu’il en souffrait et il le voulait avec... Mais c’étaient seulement ses hormones, il le savait. Il était monosexuel. Il en était sûr et certain parce qu’il s’était posé beaucoup de questions, allant même jusqu’à essayer d’en faire une tendance plutôt qu’un absolu. Il voulait également Johnson, mais
personne ne pouvait l’empêcher d’être lui-même, si ? Ce qu’il voulait vraiment c’était une union, quelque chose de sérieux comme ce qu’il avait vécu avec Jessica, qui ne le laissait pas s’en tirer quand il disait n’importe quoi, mais qui l’attendait et se pressait contre lui, petite et protégée. Mais même si Johnson était celui qui avait éveillé ce besoin en lui, cela ne voulait pas dire que ce serait lui qui le comblerait. Cela ne fonctionnerait jamais, pas même si Johnson était vraiment intéressé.
IL N’ALLAIT PAS CONTINUER à s’infliger cela, à empirer le tout en ayant quelque chose qu’il voulait presque, quelque chose qui le laisserait toujours sur sa faim. Mais il n’allait pas abandonner Johnson non plus. S’il y avait bien une chose dont Keenan était fier, c’était d’être un bon coéquipier et il n’allait pas laisser une quelconque alchimie détruire cela. Il pensait réellement ce qu’il avait dit à Johnson : les Flammes de l’Enfer avaient besoin de lui, mais Johnson avait également besoin d’eux. Aucun joueur ne pouvait porter sur ses seules épaules la victoire d’une équipe et aucun joueur ne pouvait non plus gérer seul le stress et les attentes qui en découlaient. Il s’assura d’obtenir les numéros de chambre de tout le monde pendant le dîner et de s’arrêter à la réception pour vérifier que la sienne et celle de Johnson bloquaient bien les odeurs. C’était bel et bien dans son rôle de capitaine adt de vérifier que les besoins particuliers de tous les joueurs soient entendus. Par exemple, quand Williams jouait encore avec eux, Sven vérifiait toujours que les hôtels aient le bon type d’insuline en stock avant leurs déplacements. Il irait si Johnson l’appelait, évidemment. Il ne le laisserait jamais prendre un tel risque et ce n’était pas comme si cela pouvait aggraver les choses, il y avait peu de chance qu’il cesse de le désirer s’il arrêtait simplement de le faire. Et il le voulait, il était capable de l’ettre. C’était physique et naturel et ils savaient tous les deux ce qu’ils faisaient. Mais c’était à Johnson de le lui demander. Keenan n’allait pas céder pour lui-même, mais il n’allait pas non plus ne pas céder seulement pour lui-même. Si Johnson avait besoin de lui, il était prêt. S’il prit une brève douche, c’était seulement parce qu’il était encore épuisé d’être stupidement allé patiner la veille d’un long voyage. Il alla ensuite s’écrouler audessus des couvertures de son lit dans son seul caleçon puisqu’il faisait trop chaud dans la chambre malgré le système de climatisation hydronique avancé dont l’hôtel se vantait dans les pots de fleurs dispersés dans les corridors et le vestibule. Il aurait dû pouvoir s’endormir immédiatement, il avait besoin de se reposer avant leur match l’après-midi suivant, mais il en était incapable. Même s’il avait dormi dans l’avion, il n’avait toujours pas récupéré. Et puis il comprit : il attendait. Il grogna, roula sur le côté et enfouit son visage
sous les couvertures, respirant le parfum floral artificiel du détergent et ressentant l’étrangeté de cette situation comme une douleur en lui. Il voulait... il aurait pu sortir. Mais il ne le pouvait pas, pas vraiment. Il ne pouvait pas se permettre de faire une autre erreur de débutant. Il était le capitaine adt, pas un idiot : il devait avoir la tête complètement dans le jeu, tout comme Johnson d’ailleurs. Il avait dû s’endormir à un certain moment, parce que son alarme le réveilla le matin suivant, les rideaux s’ouvrant automatiquement pour laisser les rayons du soleil caresser son visage. Il tenta de se cacher sous les couvertures, mais ne put que cligner des yeux, confus, en s’apercevant qu’il n’en avait plus. Il descendit pour aller déjeuner, mais Siuf dut lui donner un coup de coude pour qu’il soit attentif à la conversation autour de lui. — Sais-tu contre qui nous jouons ? Le cerveau de Keenan demeura vide pour un moment si long que c’en fut embarrassant. — Euh... les Titans, dit-il finalement. Cela sonnait un peu plus comme une question que comme une réponse, même s’il en était certain. Puis il chercha du regard Johnson. Mais, évidemment, Johnson n’était pas là. — Enfin il comprend, constata ironiquement Thomas. — Ne joue-t-il pas ? demanda Keenan en se tournant vers lui. — Bien sûr qu’il joue, affirma Thomas en lui lançant un regard bizarre. Mais ils vont le prendre pour cible. Cela arrivait parfois avec d’anciens coéquipiers, mais Johnson n’avait é qu’une saison avec eux, sûrement qu’ils ne lui en voulaient pas à ce point, si ? Mais c’était la première fois qu’il voyait un joueur se faire échanger d’une manière si mystérieuse qu’il n’y avait même pas de rumeurs à ce sujet. C’était pire, d’une certaine manière, comme si c’était trop honteux pour en parler.
— Où est Johnson ? — Dans sa chambre, répondit Sven en entrant dans la pièce et en prenant la chaise à côté de lui. Il a besoin de calme. Il balaya du regard son équipe avant de s’attarder sur Morgan, le défenseur avec le plus d’expérience, et Morgan hocha la tête en retour. — Nous allons le tenir à l’œil. — Il est trop rapide pour qu’on lui fasse mal de toute façon, ajouta Santiago avant de prendre une énorme bouchée de son sandwich. La moitié de la table éclata de rire et Santiago sourit, les joues pleines comme un écureuil. Keenan détourna le regard, se demandant s’il pouvait se permettre d’aller luimême vérifier l’état de Johnson. Mais qu’avait-il vraiment à aller vérifier ? Sven venait de confirmer qu’il allait bien, ou aussi bien qu’il le pouvait. Keenan pouvait difficilement imaginer que ses anciens coéquipiers soient devenus non seulement ses rivaux, mais aussi ses ennemis. Keenan pouvait à peine imaginer la situation et que pouvait-il lui offrir ? Johnson ne l’aimait même pas. Il ne pouvait pas soutenir quelqu’un qui ne lui ferait jamais confiance et même si son instinct lui criait le contraire... Eh bien, il allait se concentrer au maximum pour garder les Titans aussi loin de Johnson que possible. Ça, il pouvait le faire.
LES TITANS SE MIRENT en position pour l’engagement avec un professionnalisme certain, mais cela ne dura pas longtemps. C’était même encore pire à cause de leur subtilité et parce qu’ils connaissaient suffisamment Johnson pour se le permettre, un rappel de leur é commun qui enfonçait encore plus le couteau dans la plaie. Et cela fonctionnait : Johnson leur échappait autant qu’il le pouvait, mais il ne jouait pas de son mieux. Il y avait quelque chose de guindé dans son jeu. Sa détermination habituellement inébranlable était devenue de glace, plus une sensation qu’un parfum. Keenan n’avait besoin de personne pour mener les matchs, mais, sans l’avantage que cela leur accordait, ils n’étaient que deux joueurs qui avaient à peine é un quart de saison ensemble contre un trio expérimenté, ensemble depuis des années et qui connaissait les jeux de Johnson mieux que sa propre équipe. Sur le banc, après le judicieux changement de trio de Coach Hernandez, Keenan risqua la colère de Johnson en lui demandant pourquoi il se fermait à lui. — Tu sais qu’on ne peut pas jouer ainsi, ajouta-t-il, aussi conciliant qu’il le pouvait. Mais Johnson ne se fâcha pas, il ne fit que tourner son regard froid vers Keenan, tout aussi sans fond que la véritable glace et tout aussi impénétrable. — C’est la seule manière pour moi de jouer ce match. La main de Keenan tressauta, mais il ne la déplaça pas. Même s’ils portaient tout leur équipement et que le peau sur peau était impossible, ce simple geste n’aurait sûrement pas été le bienvenu. — Nous allons perdre alors. La bouche de Johnson se tordit. — Tu crois que je ne le sais pas ? — Alors, laisse-moi te lire.
— Je ne... Johnson laissa son regard se perdre dans le jeu qui se déroulait devant eux avant de continuer. — Je n’ai pas suffisamment de contrôle pour ça. Pas... pas quand je ne suis pas au meilleur de ma forme. Comme pour le prouver, son parfum se répandit entre eux, aigre et accablant. Il serrait les poings comme si ce simple effluve lui en coûtait déjà trop. Il laissait Keenan avoir un avant-goût dans l’espoir que cela le découragerait. Mais il parlait de hockey et même s’il était désolé pour Johnson, rien de moins que l’excellence n’était permis. — Et qu’est-ce que ça change s’ils peuvent le sentir ? La tête de Johnson se tourna brusquement vers lui, mais ses yeux ne restèrent pas longtemps sur son visage, peut-être parce qu’il le laissait encore comprendre son état mental à travers son parfum. Mais Keenan insista. — Qu’est-ce que ça change s’ils peuvent sentir que tu es troublé ? Qui ne le serait pas ? Quel est l’intérêt d’utiliser toute ton énergie à faire semblant de ne pas être affecté par cette situation alors qu’ils se doutent bien que c’est le cas ? — Je... — Joue avec moi, lui demanda-t-il d’une voix basse et sérieuse. Montrons-leur ce que nous pouvons accomplir ensemble. C’est une bien meilleure vengeance. Il vit Johnson déglutir, ses épaules tendues et son odeur plus froide que jamais. Glacée. Elle ne s’effaçait pas, c’était seulement de la concentration. Keenan sourit : il savait ce que cela signifiait. — Je ne suis pas certain d’en être capable, dit Johnson d’un ton hésitant. — Essaie, lui demanda-t-il simplement. Johnson soupira et redressa les épaules. Pour une fois, il ne semblait pas sur la défensive même si un alpha lui disait quoi faire.
— D’accord, accepta-t-il difficilement, mais honnêtement. Keenan crut pouvoir le sentir s’armer de courage, son parfum se solidifiant comme un iceberg alors que son corps se détendait finalement. Il avait l’air dur et inflexible. Il n’avait jamais été aussi magnifique.
LA E DE THOMAS atteignit Johnson une seconde avant que Villiers, le défenseur droit des Titans, ne fonce sur lui. Johnson se tourna pour essayer de ne pas tomber, mais malgré ses efforts il ne put rester debout. Il tomba à genoux, respirant assez fort pour que Keenan le voie depuis l’autre bout de la patinoire. Keenan avait franchi la moitié de la distance vers lui quand l’arbitre cessa le jeu pour aller lui-même voir Johnson. L’oméga inspecta ses propres membres, sans réussir à camoufler complètement ses tressaillements, avant de ref promptement la pause que Keenan lui suggérait. Il rencontra le regard de Keenan avec une fureur qui renvoyait la colère qu’il ressentait pour lui au rang de bêtise enfantine. — Je vais bien, je peux jouer. Il n’était pas seulement ouvert, il explosait de colère, comme s’il n’avait pas simplement cessé de se retenir, mais qu’il avait aussi oublié la civilité élémentaire qui consistait à étouffer ses émotions pour ne pas accabler les autres. Il était en colère et se fichait bien qui le savait. Mais était-il hors de contrôle ? Il jouait parfaitement bien avant qu’on ne le fasse tomber... Keenan hésita, jetant un bref regard à Sven qui était sur le banc. Leur capitaine n’irait pas les redre quand Keenan avait la situation en mains, et c’était la première pause que Sven avait de la soirée, mais Keenan n’était pas certain de pouvoir gérer cela seul. Johnson ne semblait pas blessé, mais il était tellement furieux que des erreurs en découleraient certainement. Mais s’il insistait pour que l’oméga prenne une pause... si Johnson s’emportait contre lui, cela pourrait détruire complètement le match. Si Johnson se refermait encore sur lui-même, ils n’auraient plus aucune manière de résister aux Titans. En fait, puisque les Titans étaient reconnus pour leurs jeux rapides, envoyer Johnson réchauffer le banc et faire entrer Siuf les désavantagerait. — D’accord, dit-il. Mais tu dois me le dire si ton état s’aggrave. Johnson acquiesça, mais ils savaient tous les deux que c’était une promesse vide de sens. Pendant l’excitation d’un match, personne ne remarquait ses blessures, sauf si un os sortait de quelque part.
Le match était terminé seulement quand on était incapable de patiner. Johnson attrapa à nouveau le disque, déa l’offensive et fonça tout droit sur Ali Puccio. Il tenta de s’écarter, mais Puccio ne perdit pas sa chance : il bouscula Johnson jusqu’à ce qu’il fasse une e maladroite à Keenan qui fut rapidement interceptée par Lerroux. À partir de là, tout alla de mal en pis. Johnson avait essayé, comme il l’avait promis. Mais après son face à face avec Puccio, il semblait pouvoir à peine tenir sur ses patins. Coach Hernandez le rappela, mais ce n’était déjà plus seulement lui le problème, ils étaient tous trop troublés pour bien jouer ensemble. Pour Keenan, c’était comme s’il regardait lui aussi depuis le banc quand les Titans comptèrent un autre but et que l’aptitude prodigieuse de Bobby de prédire où serait le palet sembla disparaître. Alarski n’avait plus aucune chance une fois que leur équipe de défenseurs chevronnés cessa de fonctionner. Alors c’était terminé. Et puis, quand ils se mirent en ligne pour serrer la main des joueurs des Titans, le parfum de Johnson ressurgit de là où il l’avait camouflé dès qu’il avait été quitté la glace. Pendant un instant, Keenan regarda vraiment autour de lui pour vérifier si un feu ne s’était pas propagé avant de jeter un coup d’œil à son coéquipier. Il n’avait jamais senti quelque chose de ce genre provenant d’un être humain, cela ne ressemblait en rien à l’odeur de caramel brûlé qu’il dégageait quand il tombait sur ses nerfs, c’était plutôt une odeur de cheveux brûlés. Johnson voulait-il faire cela à quelqu’un ? Ou était-ce seulement un reflet de ses émotions ? Thomas se tenait entre eux, l’empêchant de voir le visage de Johnson, mais il n’en avait pas besoin puisque le plaisir sur la figure de Villiers en disait amplement. Il poussa Thomas et s’avança entre eux, prêt à lui déchausser quelques dents. Mais il n’alla pas bien loin : Johnson tira suffisamment fort sur son maillot pour le faire trébucher et le détourner de Villers. Les joues de l’oméga étaient rouges et ses yeux brillants, il n’allait certainement pas bien même s’il avait à nouveau enfoui son parfum au plus profond de lui. Keenan attendit que son coéquipier lui dise quelque chose, mais réalisa qu’un mouvement de la tête était tout ce qu’il pouvait lui offrir sans desserrer la
mâchoire. Il expira lentement, gardant ses yeux sur Johnson tout en ignorant les joueurs de Titans et tous les gens sur la glace. Cela ne dura que quelques secondes, mais Johnson sembla comprendre que c’était sécuritaire pour lui de se laisser aller. Keenan n’en était pas aussi certain. Son coéquipier se tourna vers son ancienne équipe, son parfum toujours aussi brûlant. Il n’avait pas l’air de se soucier que Villiers ait trente kilos de plus que lui ni de se rappeler que le fait de déclencher une bagarre pouvait lui valoir une interdiction de jouer le match suivant. Thomas les sépara avec un coup de coude dans les côtes de Johnson qui le força à détourner son regard de ses rivaux. — Arrêtez d’en faire tout un plat, c’est ce qu’ils veulent, leur siffla-t-il avec son faux sourire toujours fermement en place alors qu’il tirait Keenan pour le remettre en ligne. Keenan leva la tête et rencontra le regard d’Ali Puccio. Seulement pour une seconde, cependant, parce que les yeux de Puccio se détournèrent vers sa droite, sur Johnson, avant de revenir. Se doute-t-il de quelque chose... ? se demanda Keenan pour ensuite réaliser à quel point il était stupidement narcissique. Puccio ne se doutait de rien, il ne pouvait tout simplement pas quitter Johnson du regard. Pas même quand il fut devant Thomas, donc à la gauche de Keenan, ne put-il s’empêcher de jeter un dernier coup d’œil à l’oméga. Ils avaient dû se serrer la main sans que Keenan s’en rende compte. Keenan prit lui-même le risque de le regarder : Johnson serrait la main de Lerroux et recevait ses salutations avec un sourire forcé et un regard si fixe qu’il ne pouvait pas vraiment le regarder. Et il ne le regardait réellement pas, comprit Keenan, il détournait le regard. De Puccio. Et c’était Puccio qui avait fichu en l’air le jeu de Johnson, également. Puccio, qui était un alpha... Il ne pouvait pas poser la question à Johnson. Pas si ses anciens coéquipiers lui donnaient une odeur comme s’il voulait s’immoler et il ne pouvait visiblement pas demander aux joueurs des Titans. Pas même Lerroux, même s’il gardait une attitude professionnelle autant sur la glace qu’en dehors. Cela ne se faisait tout simplement pas. Mais il ne pouvait s’empêcher de se demander : Puccio avait-il été... ?
— Avali, tout va bien ? demanda Santiago en lui donnant un coup de coude quand il le croisa en route pour les douches. Keenan tressaillit, réalisant qu’il serrait les poings. Il avait suivi son équipe dans le vestiaire pour qu’aucun journaliste ne le voie avec cette expression sur son visage, comme le lui avait fermement conseillé Coach Sari. Il expira lentement, hochant la tête comme s’il était en pilote automatique. Santiago haussa les épaules — qui étaient complètement nues, comme le reste de son corps, nota Keenan distraitement puisque ses yeux avaient à peine enregistré ce qui aurait pu faire évanouir des centaines d’irateurs — puis il s’en alla. Keenan ne le vit pas, il s’était déjà tourné pour chercher Johnson du regard, en oubliant qu’il n’était pas censé le regarder dans le vestiaire et encore moins le chercher. Mais cela importait peu. Johnson n’était pas là. Pendant un instant, Keenan pensa à partir à sa recherche, mais juste à ce moment Sven entra en ayant l’air de mauvaise humeur et il leva les sourcils. — Tout va bien ? — Je vais survivre, ce n’est qu’un bleu, grogna-t-il en pointant sa joue qui, d’une manière ou d’une autre, n’avait pas était protégé par son équipement de gardien de but et son casque. Keenan siffla, impressionné malgré lui. — Je n’avais jamais vu quelqu’un réussir à t’atteindre directement auparavant. — Eh bien, ils essayaient vraiment. Tu devrais voir Johnson, ajouta-t-il en s’assoyant aux côtés de Keenan pour délasser ses patins. Il est multicolore. — Il va bien ? demanda-t-il d’une voix qui sortit décidément trop fort. Sven se tourna vers lui, ses yeux exprimant quelque chose de complexe. — Ce ne sont que des bleues, dit-il en étudiant le visage de Keenan. Il est sûrement davantage en colère qu’autre chose. — Ah, ouais.
Keenan déroula ses chaussettes pour détourner le regard. Il voulait aller vérifier par lui-même, et alors ? Johnson était son coéquipier, c’était naturel que Keenan s’en fasse. Après tout, cela n’avait pas de rapport avec les hormones de s’en faire pour quelqu’un. — Ces gars étaient de véritables abrutis, ajouta-t-il distraitement. Pourrait-il er par l’infirmerie sans se faire remarquer avant de retourner chez lui ? Son poignet gauche le faisait légèrement souffrir...
BOIRE APRÈS UN MATCH aussi difficile était parfois une mauvaise idée, mais quand Johnson lui-même l’avait suggéré, personne n’avait eu le cœur de le lui ref. Johnson était habituellement le solitaire et s’il voulait son équipe cette fois-ci, s’il avait besoin d’eux... Ils seraient là. Keenan se permit de finir sa première bière en quelques gorgées en se promettant de déguster plus lentement la deuxième. Il y parvint, mais cela signifiait également qu’une heure plus tard il était un des seuls suffisamment sobres pour transporter un plateau. Il trouva Johnson au comptoir. Il avait dû s’échapper du groupe quand Keenan ne le regardait pas, parce qu’il était déjà écroulé sur son tabouret, un verre devant lui qui ne contenait certainement pas de la bière... Keenan avait su qu’il était encore dans la même pièce et pas grand-chose d’autre, parce que Johnson s’était complètement refermé après le match, à tel point qu’il devait sûrement er pour un bêta. — Merci de ne pas avoir jeté ton poing à la figure de Villiers, lui dit Johnson en clignant lentement des yeux dans la direction de Keenan, comme s’il ne savait pas à quel point il était rouge ou comment... — J’ai pensé que je devais te laisser cet honneur, lui répondit Keenan en prenant le tabouret à côté du sien et en gardant les yeux sur la barmaid qui préparait ce qui semblait être un verre raffiné, ses longs cheveux caressant la courbe de son cou. Il sentit plus qu’il ne vit Johnson hausser les épaules. — Je veux d’abord le battre au hockey, dit-il. Ou ça donnerait l’impression que je suis mauvais perdant. Keenan éclata de rire et Johnson tendit la main pour tapoter son bras par-dessus son haut, assez maladroitement pour que Keenan le ressente. Il frissonna, ce qui était ridicule quand il y pensait. Mais il ne pensait pas que Johnson l’avait déjà touché sans arrière-pensées auparavant. — Je suis désolé que nous ayons perdu, s’excusa l’oméga comme s’il s’adressait au comptoir du bar.
— Moi aussi, acquiesça Keenan en prenant une gorgée de sa bière. Il détestait perdre, mais cette fois-ci avait vraiment été pénible... — C’est parce que j’ai joué n’importe comment, ajouta Johnson. Surpris, Keenan se tourna vers lui. — C’est un peu égocentrique, non ? répondit-il, plus ennuyé qu’il n’aurait dû l’être. Mais Johnson était si confiant le reste du temps que l’idée que les Titans lui fassent croire... — Il y avait d’autres personnes sur la glace en plus de toi, Johnson. — Oui, mais... — Non, l’interrompit Keenan, parce qu’il était hors de question qu’ils gagnent ça. J’ai manqué un but, devrais-je m’en vouloir pour le reste de ma vie ? — Alors c’est seulement à cause des dieux ? demanda Johnson en sonnant plus amusé que frustré. Keenan était prêt à accepter cette nouvelle attitude. Il risqua un regard dans sa direction. — Oui, c’est comme ça que ça se e. Johnson le regardait, mais il détourna le regard quand Keenan se tourna vers lui. — J’aimerais pouvoir croire ça, murmura Johnson en appuyant sa tête contre le comptoir collant comme s’il n’avait plus la force de la lever. La main de Keenan tressauta avant qu’il ne la presse sur le comptoir de bois. Ils ne portaient plus leur équipement et le toucher n’était pas du tout approprié. Même si Johnson l’avait fait en premier. Mais Keenan n’était pas saoul. — Tu crois en toi, offrit-il après un silence. Cela devrait le faire. Et peut-être que s’il avait un peu plus bu aurait-il ajouté : je crois en toi.
Il leur commanda plutôt des sodas et un verre d’eau en plus pour Johnson. Ce n’était pas beaucoup, mais au moins cela éviterait la gueule de bois le lendemain. Et cela permettait à Keenan de se sentir un peu mieux quant aux bleues qui étaient camouflées sous le chandail de Johnson et pour la manière dont il avait regardé Villiers après les paroles qu’ils avaient échangées. Pas beaucoup mieux, une partie de lui maintenait toujours qu’il avait échoué, qu’il avait laissé son... coéquipier se blesser, mais tout de même un peu mieux. C’était mieux que rien. Il était prêt à accepter cela.
Chapitre 29 : Cartwright
Les matchs à l’extérieur étaient toujours un peu plus difficiles. Ils pouvaient être reconnaissants que le vol de la Pologne vers la Slovaquie ait duré à peine une heure, ce qui signifiait qu’ils avaient une journée entière pour se remettre de leur partie désastreuse avec les Titans et de la soirée de beuverie qui en avait découlé. Carry était soulagé qu’ils quittent la Pologne. Il avait été tellement certain qu’il resterait avec les Titans qu’il avait commencé à apprendre la langue et maintenant chaque mot qu’il comprenait se rajoutait à ses souvenirs humiliants de naïveté. C’était une journée ensoleillée à Bratislava, une douce brise chaude caressant leur visage alors qu’ils se rendaient de l’autobus à l’hôtel. Ses lunettes fumées fermement enfoncées sur son nez, Carry se sentait étrangement optimiste pour cette journée. Il aurait préféré ne jamais revoir Puccio ou Villiers, mais, s’il mettait les choses en perspective, il avait survécu et même si perdre contre eux était douloureux, la différence de points n’était pas assez importante pour remettre en question leur positionnement dans la ligue. Les Flammes de l’Enfer allaient se rendre en final cette année. Il pouvait le pressentir.
LE MATCH CONTRE LES Lions n’aurait pas dû être difficile. Ils avaient de bons joueurs, Carry ne pouvait pas dire le contraire, mais une grande partie d’entre eux étaient des recrues, ce qui ne donnait pas une bonne cohésion. Les bons joueurs ne formaient pas nécessairement de bonnes équipes. Mais quelque chose s’était é avec les Lions depuis la dernière fois que Carry avait joués contre eux. Il le réalisa à la seconde où il les vit bouger en formation. Ils ne se regardaient pas. Ils n’en avaient pas besoin.
LA PRESSE SE DONNAIT à cœur joie sur le retour en force des Lions et personne n’aimait mettre dans la figure d’une équipe leur échec plus qu’un journaliste, même les irateurs de l’autre équipe se limitaient à huer ou à crier des insultes normalement. Mais ce n’était pas le cas des journalistes. Non, les journalistes ne se satisfaisaient pas de vous insulter, ils devaient vous faire revivre chaque petite erreur qui vous avait coûté le match jusqu’à ce qu’ils vous convainquent que tout cela était votre faute. Il n’y avait aucune chance que Carry ne déteste pas les journalistes en partant non plus. Il y avait quelques reporters omégas, mais la plupart étaient des bêtas et des alphas, et il avait du mal à choisir entre l’ignorance et la condescendance. — Aviez-vous vu la e de Billy ? demanda l’une d’entre eux, en souriant en se remémorant cet instant. Carry décida qu’il était content qu’elle soit une bêta et qu’elle ne possède donc pas un odorat avancé. Il était presque certain qu’il camouflait son odeur, mais la fureur vive que sa question lui avait occasionnée le faisait se sentir honteux. Il n’était pas quelqu’un de violent, sauf au hockey. Il n’aimait guère les sports qui nécessitaient un physique, mais parfois il sentait la colère montée en lui si rapidement qu’il avait peur de ne pas être capable de la contenir. — Oui, répondit-il sèchement. Quel était le but de la question de toute façon ? Elle savait qu’il l’avait vu, que le disque l’avait déé, de trop loin pour l’intercepter même si Billy Hobb n’avait pas été un géant de près de deux mètres prêt à faire tomber Carry de ses patins. La e avait fini dans leur propre but, malgré les plus grands efforts d’Alarski. Le pauvre jeune avait été rappelé par Coach Hernandez à la minute où le score avait été définitif. Il ne semblait plus savoir où il se trouvait et il aurait probablement préféré être ailleurs. Si Carry savait bien une chose à propos des gardiens de but, c’était que les autres joueurs de l’équipe le sortiraient en boîte pour le saouler plus tard. Ils l’avaient fait pour lui malgré le fait qu’ils jouaient un match peu de temps après et même si Alarski était un peu trop silencieux pour être populaire, il était l’un d’entre eux depuis plus longtemps.
— Comment cela vous fait-il sentir d’être incapable de protéger votre équipe ? continua-t-elle d’une voix égale comme si c’était une question parfaitement raisonnable. Carry déglutit et se donna cinq secondes pour se calmer avant d’être capable de répondre sur un ton assez normal : — Je me sens mal que nous ayons perdu, évidemment, mais... — Johnson joue à l’offensive, interrompit quelqu’un. Mais ce n’était pas seulement quelqu’un, comprit Carry d’un coup. Avali se tenait debout devant eux, portant seulement des chaussettes et la moitié de son équipement. La journaliste leva la tête et se redressa avec ce qui semblait être de l’inquiétude. — Ce n’est pas son travail de protéger l’équipe, poursuivit-il avec un sourire si faux qu’il devait vouloir que la journaliste s’en aperçoive. Nous sommes une équipe et nous avons perdu aujourd’hui. Mais on en perd quelques-unes et on en gagne d’autres, non ? Sinon, le jeu n’est plus un défi pour nous. Il haussa nonchalamment les épaules dans un mouvement impossible à ne pas suivre des yeux puisqu’il mettait en valeur les muscles de ses bras. La journaliste se leva. Elle faisait toujours une tête et demie de moins qu’Avali, mais pouvait au moins le regarder dans les yeux sans se briser le cou. — Pensiez-vous que les Lions seraient un défi pour vous ? demanda-t-elle en se détournant de Carry. Carry se leva à son tour, la dernière chose qu’il voulait était que les deux le dominent. Avali s’arrêta une seconde, puis hocha la tête en souriant tristement et, par Hadès, il pouvait être charmant quand il le voulait. — Nous les avons sous-estimés, it-il. Eh bien, je sais que je l’ai fait. Mais nous en tirerons des leçons et nous serons meilleurs la prochaine fois. Leur style a nettement évolué depuis la dernière fois que nous avons joué contre eux, mais nous avons plus d’un tour dans notre sac.
Carry sursauta presque lorsqu’il aperçut Avali regarder dans sa direction. Pensait-il que les journalistes ne comprenaient rien au langage corporel ? — Alors, êtes-vous satisfait de votre nouveau trio ? demanda-t-elle en lançant un bref regard vers Carry pour étudier sa réaction. Même si vous devez jouer tous les deux ensemble ? Avali se figea une seconde de trop, mais Carry lui s’était attendu à ce genre de questions, même si personne n’avait osé en parler jusqu’à maintenant. — Pourquoi ne voudrions-nous pas jouer ensemble ? demanda-t-il les yeux écarquillés, les épaules basses et une expression vide sur le visage : le masque parfait. — Eh bien..., hésita-t-elle en regardant autour comme pour qu’on ne l’entende pas. Vous êtes tous les deux sans union, cela ne fait-il pas... ? Il était tenté de lui faire terminer sa question, mais cela aurait prolongé leur conversation. S’il avait été seul, il aurait surmonté le malaise, mais avec Avali présent il en serait incapable. — Oui, comme beaucoup d’autres gens. Bizarrement, nous arrivons tous à travailler même si plusieurs de nos collègues sont sans union, ajouta-t-il sèchement. — Mais..., commença-t-elle même si elle n’allait tout de même pas insister. Elle était une journaliste sportive. Il y avait donc peu de chance qu’elle ait l’expérience d’interroger les gens sur leur vie amoureuse. Carry se demanda si elle allait s’en vouloir par la suite. Pas qu’il s’en souciait vraiment, sauf si cela signifiait que son article serait moins bourré de sous-entendus. — Notre trio fonctionne très bien, ajouta Avali comme s’il ne l’avait pas entendu. Je sais que nous n’étions pas au top de notre forme aujourd’hui, mais si vous aviez regardé les images de notre match en , je suis certain que vous ne poseriez pas le même genre de questions. — Oh, je l’ai vu, mais cela ne fait-il pas partie du problème ? À quel point votre trio est instable ? Un match vous êtes en feu et le suivant...
Carry sentit son cœur s’arrêter, puis repartir de plus belle comme pour compenser. Mais Avali ne fit que lui rire au nez. — Ainsi va la vie, mademoiselle, lui dit-il. Carry n’en voulait même pas à l’alpha pour son ton condescendant. La femme devait être du même âge qu’Avali. — On s’entraîne jusqu’à ce que tout soit parfait, poursuivit-il, et on espère ensuite que le vent ne change pas de direction ou que notre karma ne soit pas instable ou que notre Chi ne soit pas déréglé et que tout soit fichu en l’air. Carry l’observa, attendant de voir si Avali avait réussi à la convaincre. Elle n’avait aucune odeur, alors il ne pouvait que se fier à son visage : elle pinçait les lèvres, mais ses épaules se détendaient déjà. Carry pouvait parfaitement comprendre qu’il était difficile de garder l’esprit clair quand on parlait à un homme à moitié nu, avec des pectoraux qui semblaient être faits pour être léchés, mais il était aussi un peu ennuyé. — Alors vous pensez que ce n’est que de la chance ? demanda-t-elle sur un ton plus doux, distrait. Avali la regarda dans les yeux. — Je pense que c’est stupide de penser que se démener signifie que l’on gagnera à tous les coups. À notre niveau, nous sommes tous d’excellents joueurs, mais cela veut-il dire que nous pouvons être une excellente équipe dans un match en particulier..., dit-il en haussant les épaules. Oui, ce sont aux dieux d’en décider. Et ça me va. Je continuerai à tout donner et ils feront ce qu’ils veulent de cela. Il ne regarda pas Carry cette fois-ci, mais ce dernier le comprit tout de même parfaitement.
AVALI AVAIT RÉPONDU à l’interview sans même lancer un regard à Carry pour vérifier que cela lui allait. Il n’avait jamais caché son aversion pour les journalistes, mais cela ne voulait pas dire qu’Avali avait le droit de lui enlever tout pouvoir des mains comme s’il savait ce qui était le mieux pour lui. Il ne pouvait cependant pas vraiment dire quoi que ce soit à ce sujet dans un vestiaire ouvert aux journalistes. Alors il entra dans une cabine pour se changer en un temps record parce que se changer devant ses coéquipiers était une chose, mais se changer devant des inconnus en était une autre. Puis, il quitta l’aréna, le pire derrière lui. Ses coéquipiers étant restés pour prendre un verre. Carry se sentait mal de laisser tomber Alarski en ce dur moment, mais il ne pouvait pas er de socialiser après un tel désastre. Pas après avoir joué et perdu contre les Titans seulement deux jours auparavant. Il était à peine dehors qu’il envoyait un message à Avali. Il s’était peut-être échappé de la pièce, mais ses pensées l’avaient suivi. [C’était quoi ça ?] L’absence de réponse ne fit qu’augmenter sa fureur. Il pouvait sentir ses épaules se tendre lentement alors que son téléphone demeurait silencieux. Il savait qu’il avait abandonné Avali dans un vestiaire plein de journalistes prêts à tout pour avoir son attention et qu’en tant que capitaine adt il s’était sûrement t au groupe qui s’apitoierait sur son sort. Mais il ne pouvait s’empêcher de se sentir ignoré. Sur la glace, Avali l’aurait regardé à la seconde où Carry l’aurait voulu. [Quoi encore] fut la réponse qu’il reçut au bout d’un moment et Carry s’arrêta net au milieu de la rue bondée proche de la station de métro. Il prenait les transports en commun, puisque le reste de l’équipe prendrait l’autobus pour se rendre à l’hôtel. Il ferma le message et l’appela. Avali finit par répondre. — Hé... — Tu ne géreras certainement pas mes interviews, cracha Carry en le coupant. — Pardon ? Mais tu n’étais visiblement pas à l’aise et...
— Si tu remets la faute sur tes pulsions..., l’avertit Carry. — Mes pulsions ? répéta Avali, incrédule. Ma décence ! Elle te faisait er un mauvais quart d’heure et je voulais seulement... — Penses-tu que je n’ai pas l’habitude ? l’interrompit à nouveau Carry. Ils me font toujours er un mauvais quart d’heure, Avali, c’est ce qui arrive quand on est un oméga dans le sport professionnel. — Eh bien, c’est injuste ! répondit sèchement Avali. Il ne faisait aucun effort pour cacher sa frustration et c’était... c’était agréable de le voir en colère pour Carry. Et inutile. Complètement inutile parce que ça ne changerait rien à rien. — Je peux parfaitement gérer, merde ! dit-il à Avali en faisant sursauter un père de famille qui ait par là. Il lança à Carry un regard noir, mais ce n’était pas son problème, il était déjà tard pour se promener avec ses enfants de toute façon. — Je le sais bien, Johnson, ne penses-tu pas que nous avons regardé tous tes enregistrements avant ton échange ? Qu’ils ne m’ont pas demandé si je pouvais jouer avec toi? siffla furieusement Avali. Était-il en colère parce qu’ils avaient senti le besoin de le lui demander ou... ? Puis, quelque chose lui traversa l’esprit. — Tu as dit oui, dit-il en le réalisant, comme s’il avait perdu son filtre quelque part. Il s’arrêta à l’entrée, trop accaparé par sa conversation pour risquer de laisser tomber son téléphone en cherchant sa carte de métro. — Évidemment que j’ai dit oui ! répliqua Avali en ayant l’air offensé. Je t’ai vu jouer. Et je n’avais jamais... Il semblait perdre de son élan, mais continua tout de même : — Je ne pensais pas que ce serait un problème. Pour moi. Que tu sois un oméga.
— Le regrettes-tu ? demanda Carry sans le vouloir. Cela le mettait à nu, mais il n’avait pu s’en empêcher. — Est-ce que tu plaisantes ? N’as-tu pas vu tout ce que nous pouvons accomplir ensemble ? Je suis plus que reconnaissant de ne pas l’avoir su plus tôt. Carry vacilla. Il ne pouvait pas lui dire la même chose en retour. Pas parce que c’était faux, mais... — Ça en vaut la peine, laissa-t-il échapper finalement. Si nous pouvons y arriver, cela en vaudra la peine.
ÇA AVAIT ÉTÉ UNE SEMAINE pénible, alors évidemment, à l’instant précis où Carry arriva chez lui et eut une minute pour se reposer, son corps se rebella. Il se retourna sur le ventre, les couvertures s’entortillant autour de lui, une fine couche de sueur couvrant déjà sa peau. Il se sentait douloureux et ankylosé et... vide. Il était dur, bien sûr, mais le sentiment de vide prédominait. Habituellement, il avait un peu de temps avant que ses chaleurs ne se concentrent là-dessus... À bout de souffle, il grogna : il s’en fichait bien. Il tâtonna en direction de la table de chevet jusqu’à ce qu’il trouve son téléphone et compose le numéro qu’il avait enregistré. Il avait mémorisé le numéro d’identification de l’alpha qu’il avait choisi et la personne à l’autre bout du fil prétendit ne pas remarquer qu’il était incapable de formuler des phrases complètes et lui dit que son escorte serait à sa porte d’ici une trentaine de minutes maximum. Il avait dû perdre la notion du temps, car il se rendit ensuite compte que les lumières vacillaient lorsque le son strident de la cloche le réveilla. L’alpha était arrivé. Carry n’avait aucune idée si cela avait pris moins d’une demi-heure, ou une journée entière, mais à part sa bouche sèche et ses jambes tremblotantes, ainsi que le vide insoutenable en lui, il ne se sentait pas trop mal. Enfin, pas quand il se disait que le soulagement l’attendait à la porte. Il ouvrit la porte d’entrée avant de réaliser que l’homme était dans le vestibule et qu’il devait lui ouvrir avec l’interphone avant, puis il le fit avant même de vérifier de qui il s’agissait. L’air frais du corridor le réveilla quelque peu, suffisamment pour le faire réaliser qu’il était assoiffé et qu’il devait faire quelque chose pour y remédier. — Allô ? entendit-il alors qu’il lâchait le verre dans l’évier. Il était tellement excité que boire son eau avait été une expérience sensuelle. — Mx Johnson ? La voix était râpeuse et grave et c’est seulement quand Carry se retourna qu’il réalisa qu’il n’avait jamais demandé sa photo. Cela importait peu, l’odeur de tarte au citron le frappa de plein fouet et ses genoux étaient près de céder sous
son poids. L’homme traversa la pièce et l’attrapa dans ses bras avant qu’il ne tombe. Confus, Carry cligna des yeux avant de se souvenir qu’il avait signé un contrat pour permettre à l’autre homme de le toucher. — Tu es brûlant, dit l’alpha. — C’est... c’est arrivé très vite, expliqua Carry en réussissant à se redresser suffisamment pour tenir sur ses jambes avant de s’effondrer à nouveau contre le torse de l’alpha. Il y avait un morceau de peau exposée contre sa joue et ensuite... Il se souvenait du sexe et de l’alpha, Peter, le faisant boire et, un peu plus tard, le faisant manger également, mais c’était encore plus flou que d’habitude. Comme s’il avait été fiévreux. Il se reposait entre les bras de l’alpha après l’acte, repu, mais insatisfait et mal à l’aise : son corps avait besoin du , mais son esprit s’affairait dans tous les sens pour trouver quelque chose à dire à l’étranger qui ait ses doigts dans ses cheveux. Il voulait presque que cela cesse, même si cela détendait ses muscles davantage que le sexe ne l’avait fait. — Est-ce que c’est inclus ? demanda-t-il finalement. Peter n’arrêta pas et ne fit que lui répondre calmement, comme s’il était habitué aux omégas étranges qui l’interrogeaient après ce genre d’effort physique vigoureux. — Oui, un oméga doit se sentir en sécurité après l’acte. Pour Carry qui avait les yeux fermés, l’alpha n’était qu’une voix, un parfum, sans visage parce qu’il l’avait à peine regardé. Il pensait que ses yeux étaient noirs, mais il n’en était honnêtement pas certain. En quoi cela importait-il de toute façon ? Il se posait la question quand Peter ajouta d’un air triste : — Et ça me fait du bien de te donner ce dont tu as besoin. — Mais tu n’en as pas besoin, dit Carry à moitié endormi. Il ne savait pas pourquoi il protestait. La main de Peter contre son cou hésita,
mais n’arrêta pas. — Non, c’est seulement... une bonne manière de revenir sur Terre après le sexe. Carry pouvait difficilement argumenter contre ça, ou contre un professionnel attentif. Peter était payé pour l’aider et il était naturel qu’il fasse de son mieux pour convaincre Carry de réitérer l’expérience. Ce n’était qu’un bon sens des affaires. Il se recroquevilla davantage et ferma les yeux. Il était au chaud, suffisamment en sécurité et son corps en avait terminé avec ses demandes incessantes. Il voulait dormir, pas parce qu’il était fatigué, quoiqu’il aurait sûrement eu besoin de sommeil, mais parce qu’il voulait qu’il soit l’heure de se lever et d’aller s’entraîner. Il avait payé le prix et dès le lendemain matin, il en serait récompensé.
COUCHER AVEC UN INCONNU était étrange, parce que c’était insignifiant. Cela ne resta pas dans son esprit comme ses nuits avec Puccio et Avali, cela ne le hantait pas. Et il n’y avait aucun souvenir. C’était bien. Excepté qu’il devait encore le dire à Avali. Il ne lui devait aucune explication. Mais c’était faux : Avali lui avait offert son aide et Carry l’avait accepté. S’il avait trouvé une meilleure manière, c’était logique de lui dire. La véritable question était de savoir s’il pouvait véritablement se le permettre. S’ils pouvaient eux le lui permettre. Avali serait-il capable de gérer ces nouvelles circonstances sans que cela n’affecte leur jeu ? Ce jeu qui reposait complètement sur la qualité de leur connexion psychique ? Ils venaient de perdre deux matchs d’affilée et il y en avait un autre avec une des équipes originales qui arrivait. Et ce n’était pas comme si Carry allait à nouveau avoir ses chaleurs de sitôt et, pour rendre les choses encore plus sûres, c’était un match à domicile. Il n’avait pas besoin d’Avali quand il pouvait avoir l’agence d’escorte. Avali le comprendrait, si quelque chose arrivait. Pas que cela serait le cas, il ne verrait Avali à l’entraînement qu’une fois par jour pour les trois prochains jours avant qu’ils n’aient à jouer ensemble et il venait seulement de sortir de ses chaleurs avec Peter. Il était en sécurité et il pouvait se concentrer sur le hockey. Si Avali avait été au courant, c’est ce qu’il aurait voulu, il en était certain.
Chapitre 30 : Keenan
Il était soulagé que Johnson n’ait pas eu de chaleurs le mois dernier. Ils avaient é de terribles moments sur la route, d’abord avec les Titans et ensuite avec ces Lions sanguinaires qui avaient finalement décidé de sortir les griffes. Maintenant, ils avaient si peu de points accumulés que le prochain match pourrait les éliminer et ils devaient jouer contre l’une des meilleures équipes de toute la ligue. Ils avaient collectivement un mauvais karma, ça, c’était certain. Il se demanda s’il devait essayer de faire une autre donation à une œuvre charitable, parce qu’il n’avait certainement pas le temps de faire du bénévolat, pas d’ici l’été en tout cas. C’était dommage, parce que c’était une des rares choses en dehors du hockey qui pouvait vraiment lui changer les idées, mais les gens s’attendaient à ce qu’il fasse preuve d’une certaine attention routinière et de cohérence. À la manière dont fonctionnaient leurs entraînements, il se considérait chanceux de pouvoir manger son dîner assis plutôt qu’affalé contre un mur ou un canapé en regardant d’un air absent la télévision, son cerveau toujours concentré sur les enregistrements que Sven et lui étudiaient presque aussi intensément qu’ils jouaient. Cela frappait encore plus les recrues. Ils étaient jeunes et avaient une tonne d’énergie, mais ils n’avaient pas appris à se contrôler, saison après saison, à faire ce job et cela se voyait dans les cernes sous les yeux de Santiago et dans la perte de poids tellement importante d’Alarski que Coach Sari le faisait maintenant boire des boissons protéinées avant et après les matchs. Mais Johnson fut le premier à manquer un entraînement. Keenan n’avait pas remarqué que Johnson avait l’air particulièrement fatigué ces temps-ci. Il l’avait vu tressaillir une fois ou deux quand on pressait les ecchymoses que lui avait signalées Sven, mais c’était tout. Il arrivait à l’heure et jouait d’une manière méthodique et efficace, travaillant dur en se couvrant de sueur, mais sans jamais déer le point où ses joues devenaient rouges. Ce n’était pas comme si Keenan aurait pu manquer cela. Mais il avait dû manquer quelque chose, parce que le lendemain de leur retour, jour de congé, Coach Hernandez leur annonça que Johnson manquerait l’entraînement du matin et de l’après-midi. Il n’avait pas expliqué pourquoi, et
Keenan n’avait pas vraiment de raison pour poser des questions : si Johnson avait été sérieusement malade, leur entraîneur leur aurait fait savoir. Et il était désormais de retour, mais semblait un peu plus fragile, comme on pouvait s’y attendre en cette période de l’année. Autrement, il semblait bien. Il avait salué de la tête Keenan quand il avait rencontré son regard en entrant dans le vestiaire et avait commencé les échauffements comme d’habitude. Puis, quand ils prirent une pause pour s’hydrater et respirer un peu, il avait patiné vers lui et surprit Keenan en s’assoyant à côté de lui. — Écoute, j’ai réfléchi et... nous devons leur montrer. — Leur montrer ? — Ce que nous sommes capables de faire, expliqua-t-il en prenant une gorgée d’eau. Keenan fronça les sourcils. Il savait que Johnson avait une faible opinion des autres, mais savait que les journalistes avaient remarqué ce dont ils étaient capables et il ne pouvait pas imaginer que leurs entraîneurs ne l’avaient pas remarqué également. — Johnson, ils l’ont vu dans chaque match que nous avons joué. Je suis assez certain qu’ils l’ont remarqué. Mais Johnson se retourna et le regarda dans les yeux, les siens plus bleus et plus près qu’il ne les avait jamais vu. — Nous devons en parler à Thomas, au moins. Nous pourrions utiliser un troisième joueur au courant. Et nous en aurons besoin si nous voulons avoir une chance contre les Rivières. — D’accord pour Thomas, concéda-t-il en détournant le regard. Mais personne d’autre... Enfin, nous pourrions le dire à Sven. Cela réglerait au moins le léger problème qu’était sa promesse non tenue. Pas qu’il ne faisait pas confiance à son ami, mais... Le genou de Johnson cessa de bouger, captant l’attention de Keenan encore
mieux que son tic nerveux l’avait fait. — Qu’y a-t-il ? demanda-t-il, soudainement inquiet. Johnson détourna lui-même rapidement le regard. Cet homme était impossible : un instant, il vous regardait comme s’il voulait vous clouer du regard et le suivant il évitait tout visuel comme s’il était devant Méduse. — Je ne vois pas pourquoi nous devrions en parler à Binker, dit-il d’une voix si minutieusement neutre que c’était évident qu’il était troublé. Il ne peut rien y faire. — Il y a une seconde, tu voulais le dire à toute l’équipe ! s’écria Keenan un peu sèchement. — Quoi ? Non, je voulais parler des entraîneurs et de Thomas. Pourquoi voudrais-je dévoiler notre secret à toute l’équipe ? dit-il en chuchotant alors qu’ils étaient seuls, comme un bref regard autour d’eux le confirma. — C’est notre équipe, ils ne feraient jamais... Johnson renifla avec dérision. — Tu crois vraiment qu’on peut faire confiance aux gens pour que cela ne leur échappe pas et qu’ils le disent à tout le monde ? Les gens ne sont jamais doués pour être discrets, ils n’ont pas besoin d’être des enfoirés, ils peuvent juste oublier. — Et c’est ce qui est arrivé avec les Titans ? demanda Keenan sans réfléchir. Johnson se redressa comme s’il venait d’être électrocuté. — J’en parlerai à Thomas, dit-il entre ses dents serrées. Ce sujet était donc interdit. À la manière dont Johnson avait réagi devant Puccio et Villiers, cela semblait également vrai. Peu importe Villiers, Keenan voulait tuer Puccio. Comment un alpha pouvait-il laisser cela arriver à un oméga qu’il avait... ? Peut-être que Johnson avait raison sur le fait que les gens étaient généralement
négligents, mais il ne pouvait pas croire cela d’un alpha. Les alphas avaient un instinct protecteur envers les omégas. Ne pas respecter cet instinct ne pouvait être que délibéré. Et si Puccio l’avait vraiment voulu, il n’avait aucune excuse. Et Keenan ne voyait aucune raison de lui pardonner.
THOMAS HOCHA LA TÊTE en écoutant les explications de Carry, ne semblant pas très surpris que ses coéquipiers aient une forte connexion psychique. Thomas était un homme très détendu, certes, mais Keenan s’était au moins attendu à... Il ne savait pas vraiment, mais à quelque chose au moins. Étaient-ils si peu subtils ? Sven avait déjà remarqué qu’il observait trop souvent Johnson, en étant capable de sentir leurs parfums ce n’était pas trop difficile de sauter aux conclusions, mais cela n’aurait pas dû être le cas pour Thomas. — Alors tu veux me mettre dans le coup ? demanda-t-il à Johnson. Il n’avait pas laissé Johnson prendre le dessus sur leur trio, et il n’avait pas de sentiment de culpabilité à réprimer comme Keenan, mais il était toujours prêt à l’écouter avant de mettre ses idées en pièces. — Mais comment ? Je suis un bêta. Johnson s’humecta les lèvres, jetant un coup d’œil vers Keenan même s’ils n’avaient pas préparé cela. Connexion psychique ou non, Keenan n’avait aucune idée de la raison pour laquelle il cherchait son approbation. — Avali me laisse diriger son jeu, expliqua Johnson, faisant comprendre à Keenan son hésitation. C’était vrai, mais était-ce vraiment nécessaire de l’expliquer de cette manière ? Thomas lança un regard surpris à Keenan. — C’est comme ça que ça fonctionne, précisa-t-il rapidement. Johnson est vraiment doué avec ce genre de truc psychique et je suis nul, alors il... demande ce qu’il veut. — Alors c’est pour ça que nous utilisons toujours tes stratégies ! s’exclama le bêta à Johnson. Il parlait un peu trop fort, mais ils avaient attendu d’être seuls pour en parler, alors cela importait peu. — Pardon ?
— Vous êtes toujours en train de vous disputer pendant les entraînements, comme pour faire la formation parapluie. Puis, dans un match vous faites tous les deux ce que Carry voulait. Je pensais seulement que tu avais le béguin pour lui, mais..., taquina-t-il Keenan avant d’éclater de rire devant son expression. Johnson, lui, ne trouvait pas cela si amusant. En fait, il semblait horrifié. — Je ne voulais pas te forcer à le faire, dit-il à Keenan ses yeux se perdant dans tous les sens. Keenan détourna le regard, incapable d’en er autant. — C’est bon. Peut-être que Thomas réalisa qu’il était tombé sur quelque chose avec sa blague, parce qu’il attira l’attention de Johnson. — Eh bien, tu ne peux pas me forcer à faire quoi que ce soit, alors nous en parlerons à voix haute, avec des mots. — Oui, évidemment, répondit Johnson. Je voulais simplement te dire que nous échangeons nos impressions pour que tu en tiennes compte. Thomas fronça les sourcils. — Tu veux dire que si je fais une e à Keenan, tu sauras qu’il a le palet ? Même s’il est en dehors de ton champ de vision ? vérifia-t-il. — Oui, répondit simplement Johnson. — Et tu le saurais aussi ? lui demanda Thomas. — Eh bien, oui, si Johnson veut que je le sache. — Bien sûr que Carry veut que tu le saches, lui dit Thomas. L’information, c’est le pouvoir ! Johnson haussa les épaules. — Ce n’est pas si simple, si je dois marquer...
— Tu veux que Keenan assure tes arrières ! l’interrompit Thomas. — Oui, it Johnson d’un ton agacé entre ses dents serrées, mais je dois me concentrer sur autre chose. Je n’aurais pas besoin de lui, alors... — Mais tu auras besoin de lui, insista Thomas. Tu as besoin de lui pour éloigner l’autre équipe. N’est-ce pas comme ça que cela fonctionne ? Tu en as besoin, alors il le fait pour toi ? Johnson tressaillit et Keenan n’eut pas besoin de sentir l’odeur de caramel brûlé pour voir qu’il était mal à l’aise. Mais il ne pouvait imaginer une meilleure manière de le dire et, de toute façon, Johnson se mettait toujours en colère quand Keenan essayait de l’aider. — C’est davantage comme..., tenta-t-il d’expliquer en s’arrêtant pour se craquer les doigts. Si je veux son attention et que je lui fais savoir... il pourra ensuite le faire. Ce n’était pas non plus un mensonge, sauf qu’il ne donnait pas vraiment le choix à Keenan. En effet, dès que Johnson demandait ou exigeait quelque chose de lui, ou même quand il ne faisait qu’en faire allusion, Keenan voulait désespérément le faire pour lui. Keenan ne pensait pas que cela venait uniquement de lui, mais comment pouvait-il en être certain ? Évidemment, il voulait que Johnson marque, mais comment savoir s’il le voulait à cause de Johnson, de lui-même ou bien des deux ? — Tu réalises que cela signifie seulement que je vais devoir t’en convaincre, si ? dit Thomas, l’air amusé et apparemment indifférent à la nervosité de Johnson. Et il avait raison, Johnson avait dit cela. — Ce n’est pas que je ne comprends pas ton point de vue, répondit Johnson en haussant les épaules, mais quand je suis sur le point de marquer, je ne peux pas vraiment diviser mon attention ainsi et Avali serait sûrement déjà en train de suivre le disque, non ? Thomas ouvrit la bouche pour la refermer aussitôt. — Keenan, cela te dérangerait-il d’aller nous chercher quelque chose à boire ?
Cela prit une seconde avant que Keenan ne réagisse, mais ce fut beaucoup plus rapide pour Johnson dont l’odeur tourna aigre immédiatement. — D’accord, acquiesça-t-il avec un peu trop d’enthousiasme. Il ne voulait pas être dans le chemin quand Johnson se fâcherait. Thomas était incapable de sentir son odeur, donc même s’il avait été d’une grande aide, Keenan ne se sentait nullement mal de le laisser seul pour affronter la tempête. — Un aux fraises, fruits de la ion et bananes et un aux liches et pommes ? vérifia-t-il. — Et banane, précisa Thomas, sûrement pour retarder le moment où il serait seul. Ou peut-être pas, il semblait complètement inconscient de sa propre mort imminente. Keenan hocha la tête et sortit du vestiaire. Thomas s’était lui-même mis dans cette situation et était un adulte, il pouvait gérer Johnson. Keenan était presque certain que la violence ne serait que métaphorique. Il y avait un comptoir à smoothies permanent à seulement deux coins de rue de l’aréna et il prit son temps pour marcher jusqu’à là-bas et en revenir et même pour choisir quelle saveur il prendrait pour lui-même. Il finit par choisir pastèque, qui était nouveau et un peu décevant après des années de framboise. Quand il fut enfin de retour dans le vestiaire, il était réconcilié avec son breuvage sucré. Il commençait à l’apprécier. Puis, il sentit le parfum de caramel de Johnson et il comprit qu’il ne se sentait pas vraiment aventureux : ça faisait seulement partie de son nouveau désir insatiable. Merde. Au moins Johnson ne sentait plus la colère et pouvait entendre le ton affable de Thomas à travers la porte, donc il avait survécu. — Avali ! Amène-toi ! l’appela Johnson. C’était logique qu’il se soit aperçu de sa présence, mais Keenan sursauta quand même, faisant s’échapper un peu de sa boisson à la pastèque sans couvercle. Il entra, léchant son verre, son autre main occupée à porter les autres smoothies. Thomas pouffa.
— Ça suffit, chaton, donne-nous ça. Keenan redressa la tête et leva les yeux en l’air. — Voilà pour vous, messires, leur dit-il. — Merci, répondit Johnson sans relever la tête des croquis de jeux sur la table. — Oui, nous apprécions votre service, le taquina Thomas en retour.
LEUR ENTRAÎNEMENT FUT merveilleux. Il ne savait pas comment Thomas avait convaincu Johnson, mais c’était comme s’il était é de recevoir de simples coups d’œil à un regard fixe. C’était troublant, mais une amélioration sans aucun doute, puisqu’il était maintenant au bon endroit au bon moment pour ce que Johnson voulait. Excepté que Thomas n’était pas heureux que Johnson le contrôle et était apparemment déterminé à ce que Johnson arrête de diriger les jeux de Keenan également. Il les arrêta après le premier jeu pour que Keenan en suggère un, puis il força Johnson à l’utiliser comme plan de jeu plutôt que de l’ajuster. Johnson eut quelques difficultés au début avant de prendre le rythme, mais Keenan, lui, eut plus de facilité à jouer selon son propre style et ils obtinrent à peu près la même performance. Ensuite, Thomas suggéra lui aussi un scénario hypothétique et ses contremesures et ils le jouèrent. Il n’y avait personne d’autre sur la glace, et pas de gardien de but non plus parce qu’ils s’entraînaient à faire des manœuvres qui nécessitaient trois joueurs, comme dans un vrai match. Mais Keenan quitta la glace avec un sentiment de joie et un peu déé par tout ce qu’ils avaient accompli en une seule séance. Thomas continua la conversation alors qu’ils entraient dans le vestiaire et Johnson y participait avec joie. Keenan hésita quand il remarqua qu’ils étaient assis l’un à côté de l’autre pour continuer leur discussion, il se tourna donc vers son coin habituel, suffisamment loin pour qu’il n’ait pas besoin de garder ses yeux sur le plancher pour ne pas le reluquer accidentellement. Cependant, Thomas l’interpella. — Où vas-tu ? Johnson s’était instinctivement tourné pour le regarder, lui aussi, et quand Keenan se tourna vers eux, leurs regards se rencontrèrent. Johnson ne détourna pas les yeux pendant un long moment, sa bouche se tordant légèrement de détermination comme s’il essayait de lire quelque chose sur son visage. Et puis, si subtil que Keenan pensait que Thomas serait incapable de le voir du coin de l’œil, il hocha la tête. Keenan secoua la tête vers Thomas.
— C’est l’habitude, expliqua-t-il en haussant les épaules. Puis, il s’assit en face d’eux, à un bon trois mètres de l’oméga. Il s’assura de s’asseoir directement devant Thomas et pas devant Johnson, mais son ailier droit ne pourrait pas s’opposer : après tout, il était encore leur interprète. Quand ils eurent terminé, Thomas insista pour qu’ils aillent dîner ensemble pour fêter cela et Johnson accepta volontiers, presque avec enthousiasme. Pas qu’il n’aurait pas dû, si on mettait de côté le malaise de se changer à côté de lui, Keenan ne pouvait s’empêcher de sourire. Il aurait simplement souhaité accepter en premier, il aurait alors pu être sûr qu’il y allait parce que Thomas était un homme bien et qu’ils devenaient un bon trio, pas parce qu’à chaque fois que Johnson était près de lui, le corps de Keenan voulait désespérément s’approcher encore davantage.
Chapitre 31 : Cartwright
Thomas était un génie . Carry aurait pu l’embrasser. Il s’était immiscé entre eux depuis le début comme si de rien n’était, comme si cela ne le dérangeait pas. Il les avait fait parler quand Carry se sentait si mal à l’aise avec Avali qu’il pouvait à peine le regarder. Et aujourd’hui, il avait réussi d’une manière ou d’une autre à leur faire déer tout ça : après leur entraînement, Carry avait pu échanger avec Avali sans colère, et puis, au restaurant, il l’avait gentiment taquiné sur le fait qu’il n’avait jamais mentionné auparavant que Carry pouvait le bouger comme une marionnette sur la glace. Avali avait semblé si choqué pendant une seconde que Carry avait cru avoir déé la limite, mais son coéquipier avait ensuite levé les yeux en l’air pour rétorquer qu’il ne pouvait pas être incriminé quand Carry ne pouvait s’empêcher de tout contrôler. Il n’avait pas eu l’intention de diriger complètement le jeu d’Avali au point d’enlever à l’autre homme ses propres aptitudes et son style de jeu. C’était seulement que personne ne l’avait préparé à rencontrer son âme sœur ou à gérer une connexion si ce n’est en lui disant qu’il saurait instinctivement comment le gérer. Mais ce n’était pas le cas. L’instinct de Carry semblait seulement servir à bouger sur la glace et à trouver le bon angle pour faire une e. Il ne l’aidait aucunement à gérer un homme qui l’attirait beaucoup, au point que ses hormones le poussaient à le baiser, alors même qu’il était lui-même incertain de ses intentions. C’était trop d’information, dont la moitié contredisait le reste et le reste impossible à interpréter. Et cela le mettait d’autant plus en colère que son corps le poussait vers l’irrationalité, vers le manque de contrôle. Évidemment qu’il avait voulu contrôler Avali, c’était lui qui lui faisait perdre contrôle. Mais il n’avait pas voulu faire ça et il n’allait pas le refaire, il pouvait d’ailleurs remercier l’Univers pour Thomas, même si cela signifiait d’être un peu guindé sur la glace pendant un moment. Il aimait le hockey de toute son âme, mais c’était son âme, pas celle d’Avali. Il n’en avait aucunement le droit, peu importe leur niveau de compatibilité. Il se fichait de savoir si sa capacité à contraindre Avali en lui demandant de faire des choses était encore plus naturelle pour lui que d’être nu : il ne franchirait plus jamais cette limite. C’était juste une raison de plus qui prouvait qu’avoir des liens personnels avec Avali était une mauvaise idée : qu’arriverait-il s’il faisait quelque chose du genre
en dehors de la glace ? Il avait été tellement terrifié devant l’aptitude de l’alpha à le faire obéir avec un ordre direct qu’il n’avait jamais considéré le fait qu’une connexion allait dans les deux sens. Il était tellement reconnaissant envers l’agence et Peter, pour la liberté que cela lui donnait sur son propre corps en le laissant les séparer de sa vraie vie. S’il n’avait plus besoin d’Avali, il n’y avait aucune raison qu’Avali se sente obligé de lui donner quoi que ce soit. Et avec Thomas sur la glace, en place selon la position stratégique du centre-avant dont ils avaient besoin, il ne serait que dans un environnement contrôlé, avec l’accord d’Avali. Avali consentait peut-être à ce que Carry prenne des décisions rapides et tacites pendant leurs matchs et leurs entraînements qu’il suivrait instinctivement, mais il devait tout de même y consentir. Malgré tout, il avait autant besoin de Thomas, pour sa tranquillité d’esprit et pour ses talents de hockeyeur, et cela lui allait parfaitement d’avoir besoin de ses coéquipiers sur la glace. Parler normalement à Avali aidait également, tout comme lui permettre de se rapprocher et pas seulement en lui permettant de se changer à seulement quelques petits mètres de lui, mais aussi en lui apportant son réconfort quand il le lui proposait. Après une discussion avec Avali autour de frites au sujet des équipes les plus dangereuses pour eux, il avait presque l’impression qu’il ne s’emporterait pas si Carry lui parlait de l’agence, s’il lui disait qu’il n’avait plus besoin de son aide pour ses chaleurs. Avali lui avait bel et bien dit qu’il était monosexuel, son intérêt intime envers Carry était donc bien plus artificiel que n’importe quel jeu que Carry l’avait obligé à suivre. Il serait peut-être, songea Carry, même reconnaissant de savoir qu’il ne serait plus mis dans une position où ses pulsions prendraient le pas sur ses propres préférences. Carry n’oubliait jamais vraiment le secret qu’il gardait, mais encore, c’était pour cela qu’il ne devait pas coucher avec ses coéquipiers. Excepté que ses chaleurs avaient rendu Carry stupide. Enfin, cela rendait tout le monde stupide. Légalement, c’était une substance qui altérait l’esprit et autant les omégas que les alphas ne pouvaient signer un contrat sous son influence. Le mois dernier, il y avait eu beaucoup de bruit quand on avait empêché une étudiante universitaire de retirer un gros montant de son compte en banque pour faire un dépôt sur sa chambre, parce qu’un des dirigeants de la banque avait été un alpha et il avait senti qu’elle en était au début de ses chaleurs. La jeune fille avait fini dans une auberge de jeunesse – Carry avait peine à imaginer pire
endroit pour er ses chaleurs qu’un lieu semi-public – et ses parents poursuivaient maintenant la banque pour avoir mis leur fille en danger. Personne n’avait fait plus qu’une allusion discrète à la loi elle-même étant le problème. Évidemment, on ne pouvait pas faire confiance aux omégas pour prendre des décisions pendant leurs chaleurs. Et Carry pouvait-il vraiment s’y opposer ? Il avait mis en danger sa carrière pour du sexe une fois et après en avoir subi les pires conséquences, ses chaleurs l’avaient poussé à recommencer. Mais... il avait eu envie de coucher avec un alpha. D’accord, le désir provenait de ses chaleurs, mais il avait décidé de faire encore la même chose et de er l’agence d’escorte alors qu’il était parfaitement sobre. Aurait-il payé un alpha pour coucher avec lui dans un bar ? Peut-être, peut-être l’aurait-il même fait s’il ne gagnait pas autant d’argent. Mais il ne pensait pas vraiment que c’était un problème pour les omégas en chaleurs, les alphas ne se préoccupaient pas vraiment de leur orientation sexuelle et de leurs préférences quand leurs phéromones étaient décuplées, alors pour quoi demanderaient-ils de l’argent ? Peut-être était-ce logique d’interdire aux omégas de conduire ou d’utiliser de la machinerie lourde quand ils étaient indisposés, mais sortir de l’argent de son compte ? On n’interdisait à personne de sortir de l’argent pour se procurer des médicaments, si ? Par Hadès et Perséphone, si on était un toxicomane et qu’on en avait les moyens, on pouvait se présenter complètement défoncé et le caissier devait donner l’argent. Mais pas les omégas. Les omégas devaient être protégés. Surtout d’eux-mêmes. Thomas lui donna un coup de coude, subtil, mais pas très gentil, et Carry réalisa que Coach Hernandez venait de s’adresser à lui. L’entraîneur fronçait les sourcils, réalisant visiblement que Carry ne l’avait pas écouté. — Es-tu avec nous, Johnson ? — Oui, Coach. Il força son esprit à se concentrer sur le jeu et, après quelques instants, ce fut chose aisée. Le hockey avait toujours été facile, même quand rien d’autre ne l’était. Pas même la présence constante d’Avali dans la pièce ne pouvait changer cela. Et puis, ils entraient sur la glace à la voix du présentateur et sous les cris du public maison. Ils avaient besoin de tout l’encouragement qu’ils pourraient avoir pour affronter les Rivières Rugissantes. Les Forsande Älven avaient une place
presque assurée en final. Quelque chose que leurs irateurs extatiques à l’autre extrémité de l’aréna savaient parfaitement si l’on se fiait à l’intensité de leurs encouragements. Mais Carry réalisa qu’il n’était pas stressé. Il ne pouvait pas l’être, pas en se souvenant de l’arrivée de Thomas qui avait renforcé sa connexion avec Avali, soudainement ce n’était pas simplement intense, mais un véritable va-et-vient, Thomas insistant pour que les deux lui parlent de leurs jeux. Leur ailier droit comprenait qu’en plein milieu d’un jeu il y avait suffisamment de temps pour transmettre une pensée ou une sensation, mais pas pour trouver les yeux de quelqu’un. Mais il avait tout de même fait remarquer que s’ils connaissaient tous la stratégie employée et que seulement Carry et Avali possédaient le disque, alors l’autre devait prendre une seconde pour communiquer avec Thomas. Et cela fonctionnait. Cela avait pris un peu de travail, mais maintenant Thomas était autant présent dans son esprit, sans odeur et invisible, et Carry trouvait cela encore plus facile qu’il ne se l’était imaginé de er de la manière surnaturelle qu’il avait de faire comprendre son emplacement et ses intentions à Avali et de la manière dont il pouvait lire le langage corporel qu’il avait perfectionné pour communiquer avec ses coéquipiers pendant un match. Il oubliait parfois tout ce qu’Avali savait et perdait du temps à secouer la tête et à rencontrer son regard, mais cela arrivait de moins en moins souvent au fur et à mesure qu’ils s’entraînaient. Et, de toute manière, il se disait bien que c’était une bonne manière de détourner l’attention de ceux qui pourraient les regarder. La formation des Rivières était magnifique. Ils possédaient une connaissance mutuelle des autres qui ne pouvait se faire qu’avec le temps et des heures d’entraînements et de matchs. En comparaison, la capacité de Carry à prédire ce que feraient ses propres défenseurs semblait douteuse. Évidemment, il savait où était Avali, en fait il s’était suffisamment ouvert pour que son odeur projette son désespoir haut et fort pour quiconque sur la glace puisse sentir. Et il faisait toujours attention à Thomas, les entraînements qu’ils avaient réussi à suivre tous les trois ensemble avaient été payants. Soit Avali ou lui signalaient à leur coéquipier les jeux, mais c’était presque tout. Il marqua pendant un des jeux qu’ils avaient tant travaillés qu’il s’endormait en répétant les mouvements dans sa tête, et toute l’équipe surgit autour de lui comme s’ils avaient gagné le match. Mais les Rivières avaient toujours deux points d’avance sur eux et avec seulement cinq minutes restantes à la troisième période, il y avait peu de chance
qu’ils rattrapent leur retard. Le trio de Carry jouait bien ensemble, mais ils s’entraînaient dans leur nouvelle formation à moitié psychique que depuis une semaine, ils n’avaient tout simplement pas eu le temps de perfectionner diverses stratégies. Ils s’étaient plutôt concentrés sur Carry pour qu’il n’en fasse pas trop et pour qu’il apprenne à signaler ses intentions à Thomas. Thomas les entraîna à part sur le banc quand Bauer, Patel et Tyler furent envoyés sur la glace. — Faites-vous votre truc en ce moment ? murmura-t-il même si personne ne pouvait l’entendre à la manière dont la foule criait : les irateurs des Rivières étaient vraiment bruyants. Avali hocha la tête. — Oui, on le fait. Johnson se donne au maximum, assura-t-il sincèrement à leur ailier droit. Carry lui lança un regard de surprise, même s’il savait qu’il n’y avait aucune chance qu’Avali ne le remarque pas... C’était seulement agréable que son travail soit reconnu, se dit-il. — Nous n’avons tout simplement pas assez de jeux, nous ne nous sommes jamais vraiment entraînés, expliqua-t-il en grimaçant à la vue des Rivières déjouant la stratégie de Patel si aisément que son coéquipier ait presque pour un enfant. Patel n’était même pas encore un vétéran, pas vraiment, même si à vingt-six ans il semblait âgé aux yeux de Carry. Mais il n’avait pas atteint tout le potentiel qu’il avait en lui. — Nous ne nous sommes pas suffisamment entraînés, acquiesça Avali, le visage sombre. Mais c’est sûrement mieux que rien. Thomas lui tapota l’épaule avec un énorme sourire, toujours prêt à voir le verre à moitié plein. — Allons leur montrer de quel bois on se chauffe. Quelques minutes s’écoulèrent avant que l’on frappe Bauer suffisamment fort
pour qu’il ait besoin d’une pause. Leur entraîneur changea le trio au complet et Carry sentit son optimisme revenir : il n’y avait rien de comparable à entrer sur la patinoire en supériorité numérique et en plus c’était un des défenseurs des Rivières qui était sorti pour les deux prochaines minutes. Carry reçut un coup d’œil de Thomas et il comprit : un tir de près sous un angle surprenant était sa spécialité. Il continua à patiner sans même regarder Avali, qui venait de remporter l’engagement, et la e se fit aisément avant d’atterrir parfaitement contre son bâton. Il échappa au défenseur restant et n’eut même pas besoin d’une pause avant de lancer. Le gardien bégayait, ses yeux rivés sur Thomas qui était un mètre plus près du but que Carry lui-même. Les lumières du but s’allumèrent. Carry se sentit plus qu’il ne s’entendit éclater de rire par-dessus la foule tonitruante et, avant qu’il ne s’en rende compte, il était de retour au centre de la glace. Avant qu’ils n’aient le droit de bouger, il attira l’attention d’Avali, lui demandant les deux prochains jeux pour qu’il soit au courant et reçut en retour un parfum d’air salin. S’ils avaient un jour à parler de leurs parfums, Carry l’aurait taquiné en disant qu’il sentait littéralement le brûlé quand il jouait de son mieux pour les Flammes. Carry serait donc responsable de signaler le jeu à Thomas et il devrait le faire dès qu’Avali volerait le palet et serait libéré. Avali amorça la stratégie et perdit promptement le disque devant leur centreavant, la joueuse étoilée Siritha Rochester. Thomas ne regarda pas en direction de Carry. Il s’élança plutôt vers le palet avec une détermination violente et, juste comme ça, leur jeu s’effondra. Mais, contre toute attente, Thomas réussit à voler le disque à Rochester et l’amena plus loin. Avali patinait déjà à reculons pour le recevoir au moment où Carry se ressaisit et se tourna pour bloquer le chemin au défenseur qui venait seulement de revenir sur la glace. Et puis, il y eut Molière, beaucoup trop près du but adverse pour que ce soit sûr. Mais il souriait comme un fou et poussa même gentiment Carry en ant pour qu’il retourne se battre pour le palet. Carry l’écouta et accéléra en direction du but où Thomas et Avali se dirigeait déjà, comme l’oméga le savait déjà sans même regarder. Ils s’échangeaient le disque aussi peu que possible et avec une
précision telle qu’ils semblaient posséder un lien psychique eux aussi. Puis, Avali fit la e en direction de Carry, le disque ant entre les jambes de l’ailier droit des Rivières pour atterrir directement sur son bâton. Au moment où la femme se tourna, Carry avait déjà parcouru la moitié de la patinoire, mais les défenseurs, ne le sous-estimant sûrement pas à nouveau, étaient déjà autour du but. Il savait exactement où se trouvait Avali, mais avec la patinoire aussi remplie, il n’en était pas aussi certain pour les autres joueurs. Cela lui prit une demi-seconde pour réaliser que Thomas était directement en face de lui et faisait semblant de se tenir derrière l’ailier gauche alors qu’il tenait son bâton bien droit, prêt à faire une embardée et à surprendre son rival. Puis les bras de Carry firent le reste : ils envoyèrent le disque filler rapidement avec plus de force qu’ils n’en possédaient habituellement. Le palet atterrit contre le bâton du bêta avec un bruit retentissant et Thomas tira. Ce fut fort et brutal. Et il rebondit en tournant comme hors de contrôle, excepté que si c’était bel et bien le cas, c’était un palet chanceux, parce que juste à ce moment, Avali réussit à se libérer de son escorte et le lança vers le but. Les défenseurs s’étaient déjà avancés pour essayer d’attraper le rebond, mais c’était trop tard. Le disque entra et les lumières s’allumèrent à nouveau, mauves et bruyantes pendant que leur côté de l’aréna, croulant sous leurs irateurs excités, s’extasia en criant et en jetant des trucs sur la glace malgré le risque de se faire sortir du stade. Sous la pluie d’écharpe et de fleurs, Carry patina jusque dans les bras d’Avali et leurs corps s’emboîtèrent comme si Avali avait su exactement d’où il arriverait. Même avec tout l’équipement, cela emplit ses veines d’adrénaline comme de l’huile sur du feu. Cela brûla si fortement en lui qu’il tourna son visage vers celui d’Avali et leurs casques se rencontrèrent. Voir le reflet de sa propre joie dans ses yeux sombres le troubla suffisamment que cela lui prit quelques secondes avant d’entendre les cris et de sentir le poids du reste de son équipe se presser contre lui. Et puis, Avali riait, ouvertement et fort et si proche de Carry qu’il pouvait sentir sa chaleur. Leurs casques se frappèrent l’un contre l’autre à nouveau et il comprit qu’il s’était approché de lui. Pas seulement approché, il avait relevé la tête pour compenser la différence de grandeur entre eux. Il se figea, ses yeux fuyant le visage souriant d’Avali, sentant au moins trois bras
différents se presser contre son épaule, mais ne sentant que le parfum d’Avali, comme si son nez filtrait la masse de corps couverts de sueur et le guidait vers la seule odeur qui comptait réellement.
Chapitre 32 : Keenan
Il était naturel que la presse commence à leur porter plus attention après une victoire inespérée comme celle-ci. Les Rivières avaient eu l’air si surpris par leur succès qu’ils en avaient oublié d’être en colère. Keenan se rappelait avoir serré la main de Rochester, qui était une des vétéranes de la ligue et une légende avant même qu’elle ne mène son équipe à deux Coupes de suite. Elle l’avait regardé comme si elle tentait de le comprendre, mais elle ne semblait pas lui en vouloir, elle était seulement intriguée. Même s’il leur était loyal, Keenan était capable de reconnaître que les Flammes étaient encore une jeune équipe qui n’avait pas terminé de se former, c’était donc la première fois qu’il gagnait contre elle, même s’ils avaient joué l’un contre l’autre auparavant. C’était bien différent de serrer la main de son héroïne de jeunesse quand c’était elle qui vous offrait ses félicitations. Il n’y avait qu’un seul problème avec leur victoire miraculeuse : la presse voulait désespérément les interviewer. Après le match, il n’y avait aucun problème puisqu’ils ne faisaient que répéter des variations de « mais comment avez-vous pu accomplir ça ? » et « pensez-vous pouvoir le faire à nouveau ? ». Cependant, la semaine suivante, Keenan n’hésita pas à demander aux entraîneurs de faire la plupart des interviews, mais, comme Coach Hernandez le souligna, Johnson devait en faire un peu ou sinon la presse inventerait une raison pour expliquer ce qu’il cachait. Ils ne pouvaient pas empêcher les journalistes, ou même n’importe qui, de s’intéresser à eux. Tout le monde voulait en savoir davantage sur le joueur qui avait changé la dynamique de l’équipe de manière si drastique avec sa simple arrivée. Johnson n’avait pas fait beaucoup de vagues avec les Titans, disaient-ils, mais quelque chose avait cliqué avec les Flammes. Plus aucun d’entre eux n’avait besoin de dire que c’était avec Keenan qu’il avait accroché, c’était plus que sous-entendu maintenant et c’était même vrai, en fait. Keenan voulait désespérément être là pour lui, même si ce n’était que dans la même pièce que lui, juste au cas où... Mais même si Johnson l’avait permis, et Keenan n’avait pas besoin de lui demander pour savoir à quel point c’était peu probable, il n’avait pas besoin qu’on lui dise qu’être surprotecteur était la pire chose à faire pour la carrière de son coéquipier. Surtout devant des gens qui ne savaient même pas à quel point Keenan l’avait déjà compromis.
Johnson le lui avait demandé, plus que simplement demandé, même s’il n’avait pas les idées claires. Mais Keenan avait accepté et il ne pouvait s’empêcher de se sentir responsable. Il tenait à l’équipe comme à la prunelle de ses yeux, tout comme il tenait au A sur son jersey et cela ne suffisait pas de vérifier que les nouveaux s’en tiennent à leur exercice de physiothérapie ou qu’ils ne soient pas abusés par leurs irateurs hystériques quand ils avaient trop bu. Son équipe était sa famille et son instinct lui criait de la protéger coûte que coûte, de quoi que ce soit. Il avait proposé de protéger Johnson, mais ne le mettait-il pas en danger ? Si l’on apprenait que Johnson couchait avec un alpha, ce serait une chose. Mais si on apprenait qu’il s’agissait de son coéquipier... Keenan n’était pas stupide, certes un peu naïf en ce qui concernait tout ce que la presse pouvait faire, mais il savait depuis le début que la réputation de Johnson n’était pas perçue de la même manière que la sienne. Il ne pouvait poser aucune question sur Puccio. Il savait très bien que Johnson ne ferait que lui dire de se mêler de ses affaires, s’il était poli, et il aurait raison. Mais en ce moment, les soupçons qu’il avait depuis le match contre les Titans s’étaient solidifiés pour devenir une inable certitude. Et si c’était la vérité, si on avait renvoyé Johnson parce que lui et Puccio avaient... La dernière chose dont il avait besoin était de revivre la même situation. Dans cette optique, il était plus surprenant que Johnson se soit ouvert tout à l’équipe que cela lui ait pris des mois pour le faire. Keenan n’avait jamais joué dans une autre équipe professionnelle et l’idée d’être échangé, même s’il y avait peu de chance, l’emplissait d’effroi. Comment se sentirait-il si sa première équipe se débarrassait de lui à cause de quelque chose qui n’avait rien à voir avec le hockey ? Et ils avaient évidemment gardé Puccio, même s’il avait au moins six ans de plus que Johnson et qu’il avait manifestement abusé de sa recrue. Même si malgré son inexpérience, c’était Johnson qui avait l’étoffe d’un grand joueur. Il ne pouvait même pas se demander pourquoi Johnson ne faisait pas plus attention cette fois-ci : les attentes qu’un oméga ne couche pas avec un alpha, les bêtas n’étant pas considérés comme dangereux, n’étaient pas basées sur rien. Ou, en tout cas, n’avaient pas encore été réfutées. Les omégas juraient que faire l’amour pour la première fois rendait leur libido insatiable et qu’être loin de leur compagnon pour trop longtemps était atroce, ce qui était en fait la raison pour laquelle Keenan n’avait jamais considéré avoir une relation sérieuse auparavant.
Mais Johnson était allé de l’avant, en écoutant probablement les cinglés qui chantaient haut et fort que cela ne changeait rien pour un oméga de coucher avec un alpha ou en étant tout simplement un enfant seul et tellement désespéré qu’il s’en fichait. Et maintenant il était coincé. Une fois, Keenan était tombé sur son cousin au début de ses chaleurs, les yeux sombres et une mine comme s’il venait de se faire rouler dessus. Il était é avec les courses que sa tante lui avait demandé de lui apporter, sans penser à l’avertir que la raison pour laquelle Indrajit ne pouvait aller chercher sa propre nourriture ou s’en faire livrer n’était pas un mauvais rhume, mais plutôt qu’il ne faisait pas confiance au supermarché ou à la pizzéria du coin pour ne pas envoyer un alpha. Parce qu’il n’y avait pas d’adolescents avec un plus grand besoin d’action que les jeunes alphas, pleins d’agressivité réprimée et de besoins troublants. Indrajit s’était moqué de lui. — N’es-tu pas toujours en train de dire que tu es monosexuel ? lui avait-il demandé avec un sourire complice. Il n’était même pas au courant qu’Indrajit et lui étaient compatibles, mais puisqu’il était bel et bien monosexuel, la seule chose que Keenan avait ressentie était de la pitié à la vue des cercles sombres sous les jolis yeux de son cousin. — Je n’avais pas réalisé que Tante Avni me croyait, it-il plus amusé qu’autre chose. Il n’y avait pas une trace de doute en lui à ce moment que les hommes pouvaient l’attirer sexuellement. — On dirait bien que c’est le cas. Ou elle a encore oublié que ta mère est adoptée, dit Indrajit en haussant les épaules et en laissant ses yeux glisser le long du torse de Keenan avant de les détourner avec de faibles excuses. Peux-tu mettre ça dans la cuisine ? Cela avait été si facile de résister au soupçon de pain frais dans le parfum d’Indrajit, tellement simple de rester pendant un moment pour lui réchauffer sa nourriture. Cela ne lui avait jamais traversé l’esprit qu’avec un degré de
compatibilité légèrement plus élevé, son esprit serait peut-être incapable de résister aux demandes de son corps. Et maintenant, il en était à un point où il ne pouvait même plus savoir : étaientce ses hormones qui l’obligeaient à s’offrir ainsi à Johnson ? Était-ce seulement son instinct protecteur pour son équipe qui le rendait désespéré à l’idée de ne pouvoir aller vérifier pourquoi il avait manqué un entraînement ? Non pas que cela ait de l’important. Quoiqu’il ressente, et, quelle qu’en soit la source, il n’avait aucunement le droit d’espérer quoi que ce soit de Johnson.
Chapitre 33 : Cartwright
Quelque chose fonctionnait bien. Thomas l’avait enclenché, certes, mais Avali mettait également beaucoup de son temps dans leur partenariat. Carry se surprit à sourire devant un énième smoothie se matérialisant devant lui. Avali ne semblait plus étonné par ses gestes de remerciement, ne faisant que hausser ses épaules à moitié sous son sweat à capuche. C’était une veste de l’équipe, sûrement parce qu’Avali n’avait pas le temps de chercher des vêtements à sa taille et il y avait bien seulement les équipes de hockey qui pensaient à tenir compte des bras de sa longueur. Carry ne pouvait manquer l’attirance qui existait encore entre eux, mais c’était comme s’ils s’étaient tacitement mis d’accord de laisser-aller, d’ignorer les regards insistants et, pour Carry, le parfum qui transformait la pièce où il se trouvait en mini plage dès qu’il entrait. Parfois, Avali lui lançait un regard d’excuse et Carry haussait les épaules comme pour lui dire « on ne peut pas faire grand-chose, si ? » et essayait de détourner son attention en parlant à quelqu’un d’autre. Les quelques fois où Thomas avait été incapable de remplir sa mission d’interprète et qu’ils avaient été seuls, il avait camouflé son parfum et avait commencé à lui parler de hockey. Avali se calmait habituellement dès que le mot « but » était prononcé et même s’ils ne se regardaient pas dans le blanc des yeux très souvent, la plupart du temps Carry pouvait dire sans mentir que c’était parce qu’ils étaient occupés à regarder la feuille de papier où ils inscrivaient les plans des prochains jeux. Ils n’avaient jamais annulé leur « accord » et Avali n’avait même pas fait allusion à la manière dont Carry ait ses chaleurs. Mais évidemment, cela ne pouvait pas durer. Deux mois après leur dernière nuit ensemble, ils avaient un voyage d’une semaine de prévu et dès la première soirée, on cogna doucement à la porte de sa chambre d’hôtel. — Salut, l’accueillit-il en faisant de son mieux pour garder son calme. Avali ne le regardait pas directement. Il avait plutôt les yeux fixés sur sa
chambre derrière lui, habillé de son jean habituel et d’un haut bleu qui faisait briller sa peau cuivrée. — Puis-je entrer ? Carry comprit en un seul instant qu’il ne s’agirait pas d’une discussion à propos de leur nouvelle formation. Merde. Il se recula du cadre de porte et lui fit signe d’entrer. Avali s’assit sur le fauteuil en face de la cheminée. Ils étaient à Padoue, là où Carry avait déménagé à quinze ans pour jouer avec l’équipe junior des Terremoti del Ghiaccio et il avait prévu tenter d’en profiter pour visiter sa gelateria préférée. Le mois d’avril en Italie n’était que légèrement frais, mais Avali observait les bûches inutilisées dans l’âtre comme s’il voyait quelque chose en elles. Il soupira bruyamment, les mains serrées sur ses genoux et son corps tendu en attente de quelque chose. — Je suis désolé pour tout ça. Tout va super bien ces temps-ci, la dernière chose que je souhaite c’est de foutre tout ça en l’air. Il lança un coup d’œil à Carry comme pour l’assurer de sa sincérité, mais il le fit trop rapidement pour que leurs regards se rencontrent vraiment. — Alors, ne le fais pas, suggéra Carry, toujours debout. Il était complètement habillé et réprimait à peine l’envie de croiser les bras. Il n’avait même pas complètement refermé la porte. Et ce n’était pas comme s’il avait peur d’Avali : l’homme était un peu irritant parfois, certes, et il se prenait parfois pour un autre, mais il ne toucherait jamais Carry sans qu’il le lui demande et il n’essayait pas de le contrôler, sauf la fois dans le couloir. Et même Carry pouvait maintenant ettre que sortir seul au plus fort de ses chaleurs avait décidément été stupide. Avali soupira longuement avant de rentrer dans le vif du sujet. — D’accord, alors je vais te le demander. Et je n’ai pas besoin... Je ne te le demande pas parce que... Je veux seulement être certain que tu es en sécurité, réussit-il finalement à articuler avec une voix rauque comme si parler lui demandait un effort.
Il se penchait vers l’avant comme s’il voulait se recroqueviller sur le fauteuil, son t-shirt suffisamment serré que Carry pouvait voir la ligne de sa colonne vertébrale. — Pourquoi maintenant ? demanda-t-il alors même qu’il s’était promis de tout dire à Avali il y avait de cela des mois. — À notre dernier voyage... Enfin, je ne sais trop, je crois que c’est tout le temps que nous avons é ensemble ? dit Avali en se redressant un peu et en inclinant la tête pour regarder Carry, mais sans la tourner suffisamment pour y arriver. — Merde, jura Carry en se sentant complètement stupide. Je pensais que c’était le baiser. — Ça... n’a sûrement pas aidé, hésita Avali. — Alors, tu crois que tu vas déclencher mes chaleurs à nouveau ? demanda Carry, son esprit courant dans tous les sens devant les possibilités. Qu’allait-il faire ? L’agence d’escorte était flexible : pourrait-elle lui envoyer quelqu’un de compatible, peu importe l’endroit où se trouvait Carry quand son exposition à Avali le rattraperait ? Sa dernière remarque attira finalement l’attention d’Avali qui se retourna vers lui, semblant ne vouloir rien d’autre que de sortir de la chambre. Carry devait bien l’ettre, ça demandait des couilles d’ettre ressentir quelque chose et de rester. Et la seule raison pour le faire était qu’Avali se faisait du souci pour lui. Et il n’était pas stupide, ce n’était pas une question d’équipe. Si ça avait été le cas, Avali aurait simplement pu attendre que Carry ait ses chaleurs à nouveau et qu’il n’ait pas le choix de l’appeler, cela lui prendrait moins d’une nuit pour remettre Carry sur pieds et il pourrait... Mais apparemment, ce n’était pas la priorité d’Avali. Ses yeux étaient sombres et orageux comme la mer la nuit venue et ses lèvres étaient pincées. Il était frustré, pensa Carry. — J’ai... J’ai lu un peu, la proximité avec un partenaire compatible les rend plus fréquentes. — Et nous sommes bien plus que simplement compatibles, acquiesça Carry en se permettant de s’adosser contre la porte, le bruit de la serrure se refermant contre son dos comme un coup de feu.
Avali ne dit rien et quand Carry leva son regard sur lui, il semblait seulement attendre, son visage ouvert à toute offre. Carry n’était pas certain de ce que pourrait être l’offre. Du sexe ? Mais encore une fois, pourquoi l’avertir si c’était ce qu’il voulait ? — As-tu des idées ? — Nous pourrions chacun sauter des repas, proposa Avali. Ses yeux allaient dans tous les sens, comme s’il était incapable de parler à Carry et de le regarder en même temps. Ils s’étaient pourtant tellement améliorés en ce sens dernièrement, songea Carry avec regret. — D’accord, oui, faisons cela. Autre chose ? La bouche d’Avali trembla avant qu’il ne balbutie ce qui le tracassait : — Tu as eu des chaleurs depuis, n’est-ce pas ? — Oui, it simplement Carry sans excuses ni explications. Il ne lui devait rien. Mais il ne pouvait s’empêcher de se crisper devant le nouveau parfum d’Avali, aigre comme du lait viré. Il dut se rendre compte de la flagrance de sa réaction, parce qu’il se a une main sur le visage, se frottant les yeux en respirant fortement tout en cachant son expression. — D’accord, dit-il la voix tellement rauque qu’il dut déglutir pour continuer. Alors, tu vois quelqu’un. Pendant une seconde, Carry songea à le nier. Il pouvait expliquer le rôle de l’agence... Et puis il revint à la raison : c’était exactement ce dont ils avaient besoin, une barrière encore plus impénétrable que leur propre détermination à faire ce qui était juste. Avali n’était pas un enfoiré, s’il pensait que Carry voyait quelqu’un... Et, bien sûr, Carry saurait à quel point il était proche et que le sexe avec lui était bien meilleur qu’avec Peter ou Josia, mais il pouvait être gentil. Il pouvait le laisser partir en douceur. Ce n’était même pas de la gentillesse, vraiment, parce qu’il avait besoin d’Avali comme coéquipier, trop pour le risquer maintenant ou pour toute autre raison. Il n’avait pas besoin d’un amant. Et c’était tout ce qu’Avali avait besoin d’entendre pour qu’il arrête de se demander s’il trouverait Carry en détresse à nouveau dans un couloir.
— Oui. Avali tressaillit en l’entendant, son corps entier se crispant comme s’il venait d’être frappé. — Merde, dit-il, comme une sorte d’excuses ou bien peut-être l’expression de sa douleur, puisque sa voix semblait enrouée. Je suis désolé, je n’ai pas... Je ne suis pas... Il respirait bruyamment et son odeur démontrait parfaitement l’ampleur de sa détresse. — C’est bon, je comprends, ton corps croyait que cela signifiait quelque chose, lui dit Carry aussi gentiment qu’il le put. C’était la même chose pour moi. Il lui devait bien d’ettre cela et c’était agréable d’ajouter un peu de vérité à toute cette fiction, comme des excuses pour ce qu’il était en train de faire. Pour la manière dont il le blessait, sans que ce soit intentionnel et c’était même pour son bien, mais il le blessait tout de même. — Mais ça va er, leur promit-il à tous les deux. Et puis nous pourrons nous concentrer sur le hockey. Cela ne le faisait pas se sentir moins coupable ni ne rendait la douleur évidente d’Avali moins angoissante à regarder. Avali ne répondit pas tout de suite, respirant toujours avec difficulté contre les paumes de ses mains. Le corps tout entier de Carry voulait qu’il le réconforte, mais il agrippa plutôt encore plus fermement ses propres coudes et attendit que cela e, l’ignorant comme il s’était entraîné à ignorer ses points de côté et la brûlure de la sueur dans ses yeux. Ce n’était pas si différent. Quand il n’était pas en chaleurs, son corps était sous son contrôle. Il pouvait résister à ses impulsions de manger, de dormir ou de se reposer. Ou de toucher. Il n’allait pas toucher Avali. Et il ne le fit pas, mais après une longue minute, il devint évident qu’Avali était incapable de se ressaisir, que d’une manière ou d’une autre, peut-être à cause du choc, il était incapable de reprendre le dessus sur ce qui le recroquevillait dans le fauteuil comme s’il venait de recevoir un coup. En tout cas, pas assez longtemps
pour retourner à sa chambre ou pour dire quoi que ce soit à Carry. Il ne pleurait pas, Carry était au moins certain de cela. Mais il couvrait tout de même son visage et il avait commencé à trembler légèrement, comme s’il ne pouvait même plus er de garder la même position. Et son parfum... Ce n’était pas seulement aigre, mais maladif, comme des fleurs écrasées et des œufs pourris et... Il inspira, refermant son esprit autant qu’il le pouvait pour pouvoir se concentrer. Il devait faire quelque chose. Pour aider... Et puis, il comprit : il ne pouvait pas le réconforter, pas de la manière dont Avali avait vraiment besoin. Mais il pouvait lui donner du temps et de l’espace. — Je vais descendre prendre un verre, annonça-t-il. Juste... Ferme derrière toi quand tu seras prêt. Je vais ensuite aller à la salle de jeux, alors... Il s’en tint à ça et prit son téléphone et son portefeuille sur la commode, sans s’encombrer d’une veste. Cela lui semblait détestable, à lui faire retourner l’estomac, de laisser quelqu’un ainsi, encore moins quelqu’un qu’il... Il ouvrit la porte sans ménagement et la claqua derrière lui, un peu trop fort, mais il en avait besoin. Le soulagement que lui procurait cette solide planche de bois entre eux était presque suffisant pour le faire tomber à genoux, mais il ne se permit pas cette faiblesse. Il avait dit à Avali qu’il partait, il ne pouvait pas rester dans le couloir comme un fichu harceleur. Quand il atteint le bar au rez-de-chaussée, il avait vraiment besoin de ce verre.
Chapitre 34 : Keenan
C’était purement physique . Une montée hormonale après du sexe de chaleurs, un symptôme de l’évolution voulant que les alphas retournent auprès des omégas avec qui ils avaient couché et, supposément, fécondé. Son corps ne comprenait pas les contraceptifs, n’était pas au courant qu’un monde où du sexe sans attaches avec des omégas s’ouvrait à lui. Et ça, c’était seulement son corps, parce que Keenan lui-même n’avait jamais eu de problème avec le temporaire, même quand il avait souhaité quelque chose de plus permanent, il avait été capable d’y aller sans attaches tant qu’il savait que c’était ce qu’on lui proposait. Et cela ne pouvait aller autrement dans le cas présent parce que Keenan était monosexuel . Et même s’il y avait un peu de vérité dans ce que disaient les bisexuels, à savoir qu’apprendre à connaître quelqu’un rendait des choses comme leurs organes sexuels complètement futiles, Keenan ne connaissait pas Johnson. Pas vraiment. Ils partageaient un espace et ils parlaient de hockey, ils étaient donc des collègues, pas des amis, encore moins... C’était tout simplement absurde. Johnson avait raison : son corps insistait sur le fait que c’était une catastrophe, qu’il avait besoin de récupérer Johnson. Mais son corps était un idiot qui n’avait pas cru que Keenan était incapable de faire cent abdominaux à huit ans. Il lui avait dit d’aller se faire foutre parce que le hockey l’exigeait et maintenant il pouvait le refaire. Cela avait été douloureux à l’époque et cela l’était toujours aujourd’hui. Il pouvait le faire, il pouvait er par-dessus ce sentiment d’inexactitude, de trahison... il le pouvait et il le ferait. S’il y avait bien quelque chose dont il ne manquait pas, c’était de détermination. Il était retourné à sa chambre il ne savait trop comment et avait tâtonné pour ouvrir sa porte suffisamment rapidement pour s’effondrer sur son lit et pas sur le sol, tellement épuisé qu’il avait l’impression que quelqu’un l’avait débranché de sa source d’alimentation. Pendant qu’il dormait, son corps le trahit à nouveau, ses rêves se remplissant de mains et de lèvres et d’une odeur plus douce que tout. Puis, il se réveilla, dans le noir, le parfum de Johnson toujours présent dans ses narines et son goût sur ses lèvres. Il savait qu’il l’imaginait, mais le goût était réel, l’odeur était réelle. Mais ce n’était qu’un rêve.
Johnson n’était pas au petit-déjeuner le lendemain, et même s’ils n’avaient pas conclu une entente formelle, Keenan proposa à Sven de déjeuner avec lui dans un petit bistro local reconnu pour ses fruits de mer. Même si cela marchait bien pour prévenir d’autres chaleurs, cela ne fit qu’aggraver le choc qu’il ressentit à le voir plus tard cet après-midi dans le vestiaire. Sven ne dit rien, mais il n’y avait aucune manière de faire taire Santiago quand il demanda à Keenan pourquoi il était devenu aussi pâle. Il inventa un problème d’estomac, trop ennuyant pour que quiconque s’inquiète plus qu’il ne fallait. Il garda les yeux baissés pendant qu’il se changeait et il n’aperçut Johnson qu’une fois qu’ils étaient tous les deux sur le banc des joueurs. Le trio de Mike commençait le match et Keenan était bien heureux de céder sa place ainsi, mais il aurait encore préféré que Thomas ne leur ait pas donné l’habitude de s’asseoir ensemble quand ils patientaient. Thomas était assis entre eux, à la fois pour diriger les conversations et garder une saine distance entre leurs corps. — Il s’améliore. Son maniement du bâton a énormément évolué depuis son arrivée, disait Johnson. Keenan était presque certain qu’il parlait de Mike, mais il avait perdu la première moitié de ce qu’il disait à cause du vif soulagement qu’il avait ressenti à entendre sa voix. Son odeur était discrète, encore plus qu’à son habitude sur le banc ou peut-être était-ce seulement Keenan qui était pathétiquement désespéré à l’idée de sentir un effluve. Thomas lui donna un coup de coude. — Quoi ? demanda-t-il. — Réveille-toi Keenan, lui répondit le bêta en levant les yeux au ciel. Nous serons sur la glace dans une minute.
SENTIR JOHNSON S’OUVRIR à lui était comme tremper dans de l’eau fraîche après des heures sous le soleil. Il faillit perdre l’équilibre, réussissant à peine à prendre sa place au centre de la glace et quand il perdit l’engagement, il sentit la déception de Johnson comme une gifle. Cela ne fit que se dégrader à partir de là. Johnson demandait des choses et Keenan ne voulait que les lui donner et cela importait peu que Johnson signale ses propres jeux ou ceux de Keenan ou ceux de Thomas : le sentiment de le savoir si proche de son esprit troublait Keenan. Il avait été en paix avec cela pendant des mois, mais maintenant, tout d’un coup, il comprit ce que cela signifiait. Sven l’avait dit auparavant, ils avaient une connexion psychique, la même chose qui pourrait devenir une union, mais Keenan s’était toujours voilé la face. D’une manière ou d’une autre, il s’était forcé à croire que la manière dont l’esprit de Johnson touchait le sien n’était pas plus intime que partager des stratégies au-dessus d’une table ou d’échanger des regards sur la glace. C’était complètement insensé et maintenant que cela s’était imprégné dans son esprit, il ne pouvait arrêter d’y penser. Mais à quoi avait-il bien pu penser ? Il avait é des mois à renforcer une connexion psychique avec un oméga au point de déclencher les chaleurs de ce dernier et de coucher avec lui, même s’il n’était pas attiré par les hommes. Et ce, à deux reprises. Il avait été si inquiet pour lui par la suite qu’il s’était senti obligé d’aller le voir pour lui poser des questions sur sa vie sexuelle pour être capable de bien dormir. Et évidemment, sa réaction en apprenant que Johnson voyait quelqu’un d’autre en disait long. L’idée seule lui donnait l’impression qu’on le poignardait, une douleur saisissante qui l’avait rendu incapable de respirer pendant un long moment, puis qui était restée en lui, sourde et impossible à déloger, un vide au fond de son estomac qu’aucune nourriture ne pouvait remplir, qu’aucun répit ne pouvait combler. Et après cela, il avait prévu de tout recommencer. — Avali, es-tu malade ? demanda Johnson, son visage un masque de confusion, d’une voix aiguë et préoccupée. Il avait dû être capable de le lire assez facilement, puisque Keenan n’avait aucune idée de la manière dont il pouvait bloquer son odeur et qu’il était tellement troublé qu’il n’arrivait même pas à se souvenir du visage de sa propre mère. Le trio de Mike était sur la glace, appelé à la hâte par Coach Hernandez quand il avait vu son premier trio s’effondrer sans aucune raison apparente, et
Thomas était assis de l’autre côté de Keenan. Ce ne fut qu’à ce moment qu’il réalisa que Johnson n’était pas seulement assis proche de lui, mais plutôt directement à côté de lui. Ce qu’il ne faisait jamais. — Avali, répéta-t-il. Son inquiétude se corsait dans l’air. Pourquoi projetait-il encore ses émotions ? — Arrête, le supplia-t-il en se massant le front. Je ne... Arrête, c’est tout. Après avoir réitéré sa demande, il pointa de son autre main dans la direction de la tête de Johnson. L’oméga soupira et, en un seul battement de cœur, Keenan se sentit enfin soulagé de voir la large présence de son inquiétude disparaître complètement. — Quelque chose ne va pas avec la... connexion ? murmura Thomas. Et comment Keenan était-il censé expliquer que leur connexion était exactement la même, mais que c’était plutôt lui le problème, qu’il avait vu quelque chose en leur connexion qu’il avait niée depuis le début et que maintenant il ne pouvait plus le er ? Comment pouvaient-ils jouer sans elle ? Il ne pouvait pas leur faire ça, pas à eux et pas à l’équipe tout entière. S’il demandait à Johnson de cesser de projeter, ils perdraient. — Thomas, peux-tu nous laisser seuls une minute ? demanda Johnson. Ce n’était pas comme si Thomas pouvait aller bien loin, mais Johnson dut juger que c’était suffisant parce qu’il se remit à parler, suffisamment près de Keenan pour qu’il puisse sentir son souffle contre son cou. — Qu’est-ce qui ne va pas ? Je peux te sentir... Je sais que tu es contrarié, expliqua-t-il et Keenan dut laisser entrevoir quelque chose parce qu’il continua aussitôt en s’excusant. Je ne peux rien faire, tu projettes comme jamais auparavant, tu sens... Est-ce que c’est ma faute ? Je me suis complètement fermé, peux-tu le sentir ? Keenan réussit à hocher la tête. — Alors, qu’est-ce que c’est ? Tu allais bien, nous étions..., hésita Johnson. Oh,
merde, c’est parce que je te l’ai dit. Keenan n’avait aucun intérêt à répondre, à seulement quelques centimètres l’un de l’autre il n’y avait aucune chance que Johnson ne remarque rien. L’haleine de Johnson effleura ses narines après qu’il eut poussé un long soupir et Keenan réalisa qu’il avait penché la tête vers lui, espérant désespérément sentir son parfum même s’il avait lui-même demandé à Johnson de le camoufler. Il était tellement dans le pétrin. — Non, non, disait Johnson et Keenan songea que seulement sa voix pouvait pénétrer les brumes de son esprit en ce moment. Non, ne... Ne flippe pas, Avali, je t’en prie. Mais c’était comme supplier la marée. Keenan pouvait sentir sa respiration s’accélérer et devenir de plus en plus difficile et il ne savait même pas pourquoi il flippait. En plein milieu d’un match, rien de moins. — Je... Je ne vois personne, lui avoua Johnson. Il sentit comme un éclair lui traverser la colonne vertébrale et leva la tête pour dévisager Johnson avant même de comprendre ce qu’il venait de dire. — Quoi ? demanda-t-il, la voix rauque comme s’il avait crié. Les joues de Johnson étaient tachées de rouge et ses yeux se détournèrent. — J’ai cru que... cela faciliterait les choses, confessa-t-il en haussant les épaules. Juste une raison de plus pour ne pas le faire. — Mais cela a fait..., commença à protester Keenan. Mais Johnson secoua sèchement la tête. — Non, tu t’en es sorti, parfait, alors concentre-toi sur le jeu. Keenan cligna des yeux et regarda autour de lui pour voir le chronomètre. Il restait deux minutes à la deuxième période et personne n’était venu les voir pour savoir ce qui n’allait pas. Il rencontra le regard de Thomas qui était à quelques mètres d’eux quand il se retourna pour vérifier que tout allait bien. Une chaleureuse gratitude l’envahit à la pensée de son coéquipier et quand il se
tourna à nouveau vers Johnson, il se sentait un peu plus en confiance. Il déglutit et acquiesça, se concentrant à nouveau sur le match devant lui. — Je suis désolé. Johnson balaya de la main son excuse. — Tu ne pouvais rien y faire, tu vas mieux maintenant ? Il était encore proche de lui et gardait un ton sérieux, mais inquiet. Avait-il vraiment été froid auparavant ? Keenan ne pouvait sentir son parfum, mais il n’en avait pas besoin. Il hocha la tête avant de le prévenir : — Je ne sais pas si je peux faire le..., hésita Keenan en faisant un signe de la tête. L’inquiétude de Johnson était écrite sur son visage quand Keenan lui lança un bref regard, mais il ne fit que demander : — Veux-tu quand même essayer ? Keenan hésita, puis il secoua la tête, se sentant comme s’il avait à s’exc. Johnson hocha la tête. — Nous nous connaissons beaucoup mieux maintenant, l’encouragea Johnson. Ça va fonctionner. Ils entrèrent sur la glace pour le dernier changement, recevant des regards inquiets de la part du trio de Mike. Johnson avait à la fois tort et raison : ils se connaissaient davantage, Thomas également, beaucoup plus que la dernière fois où ils avaient tenté de jouer sans connexion. Mais cela ne fonctionna pas, pas parce qu’ils en étaient incapables, Keenan en était certain, mais parce qu’ils ne s’étaient jamais entraînés ainsi. C’était un stupide oubli et, alors qu’il manquait un autre tir, il songea à demander à Johnson de s’ouvrir suffisamment pour pouvoir le trouver plus facilement sur la glace, mais la seule idée lui donna mal au cœur. Il se sentait comme un accro qui se faisait offrir une dose, prêt à tout pour l’avoir tout en sachant qu’il ne
serait jamais capable d’arrêter s’il commençait, alors il ne dit rien. Et il ne dit rien. Puis, ils furent à égalité, et eurent ensuite un point de retard, dans une position plus précaire que le trio de Mike les avait laissés, puis ils avaient deux points de retards et finalement les dieux eurent pitié d’eux puisque le chronomètre était complètement écoulé. Ses yeux trouvèrent ceux de Johnson de l’autre côté de la patinoire et son coéquipier fit un geste maladroit vers le haut avec sa main gantée. Il cligna des yeux avant de réaliser ce que c’était : le signe des dieux. Excepté que ce n’était pas vrai, pensa-t-il en écartant le réconfort vide de sens que lui offrait Johnson, parce qu’il n’avait pas donné son meilleur. Pour la première fois de sa vie, il avait eu trop peur de se blesser pour donner le meilleur de lui-même sur la glace.
Chapitre 35 : Cartwright
Il s’attendait à ce qu’Avali demande une discussion en privée dès qu’ils auraient quitté la patinoire, mais, à la place, son centre semblait trop perdu dans ses pensées pour remarquer que Carry était dans la même pièce que lui. C’était stupide, mais cela l’avait blessé. Il avait é des années à espérer échapper à l’attention des autres et à leurs regards, mais il s’attendait maintenant à retenir l’attention d’Avali. Et maintenant, même le parfum d’Avali était atténué. Il en était tellement perturbé qu’il ne remarqua même pas la présence de Thomas jusqu’à ce que l’autre homme s’assoie lourdement sur le banc à côté de lui, le faisant suffisamment sursauter pour qu’il lève un sourcil. Il haussa les épaules. — Je suis complètement épuisé, expliqua-t-il avant de retourner à ses chaussettes. — Vas-tu me dire ce qui s’est é ? — C’était une mauvaise journée, répondit Carry. — Sans blague ? siffla Thomas. Il donna un coup de coude pas très agréable à Carry, comme s’il avait oublié qu’il ne portait plus leurs équipements, mais Carry refusa de relever la tête. — N’essaie pas de me raconter des salades, Johnson. Je ne peux lire l’esprit de personne, mais je n’en ai pas besoin. Il est complètement... Carry lui donna à son tour un coup de coude et releva la tête seulement pour le dévisager du regard. Mais Thomas ne se laissa pas impressionner. — Quelque chose ne va pas, dit-il doucement, et je peux aider. Carry jeta un regard autour de la pièce bondée, Santiago faisait l’imbécile, sûrement pour leur remonter le moral, et presque tout le monde riait à ses plaisanteries. Ce n’était pas le cas d’Avali, remarqua-t-il, ses yeux le cherchant d’eux-mêmes. Il se massait l’épaule de manière distraite, là où un défenseur de l’autre équipe l’avait plaqué suffisamment fort que Carry aurait fini au sol s’il n’avait pas été là.
— Comment peux-tu aider ? Sais-tu seulement ce qui ne va pas ? — Non, it volontiers Thomas. Toi, le sais-tu ? Carry soupira et cessa de faire semblant d’attacher ses lacets pour la troisième fois. — Oui, mais je ne peux pas en parler. — Pourquoi pas ? s’enquit Thomas. — C’est privé et ce n’est pas à moi d’en parler. Je ne peux... Enfin, je ne lis pas dans ses pensées, mais je comprends ce qu’il peut ressentir. Je ne peux pas en parler. — Et s’il était d’accord ? Carry cligna lentement des yeux. Au moins cela voulait dire que Thomas n’avait pas deviné à quel point tout était fichu en l’air entre Avali et lui. — Écoute, je sais que tu veux aider et tu en as déjà fait beaucoup... — Sais-tu pourquoi ? — Parce que tu es une bonne personne ? tenta Carry. Thomas leva les yeux en l’air. — Je voulais dire : sais-tu pourquoi je peux t’aider ? expliqua-t-il sans attendre de réponse. Parce que je ne suis pas à l’intérieur de cet étrange lien qui vous unit. Je suis impartial. Je peux réellement réfléchir à ce que vous dites sans être distrait par votre parfum ou votre absence de parfum. Et je ne sais pas vraiment ce qui est le pire en ce moment pour Keenan. L’absence de parfum. Parce qu’il avait tellement refermé son esprit qu’il avait réussi à contrôler les phéromones que son corps exsudait. Cela ne lui avait jamais traversé l’esprit que ça pouvait être gênant. Ou peut-être Thomas avait-il tort, parce qu’Avali lui avait lui-même demandé de le faire aujourd’hui. Pour Carry, c’était un soulagement de prendre une pause dans le déferlement émotionnel constant qu’il recevait des autres. Mais... et si on savait que l’autre
personne pouvait nous lire parfaitement et qu’on pouvait deviner ce qui lui traversait l’esprit ? Il aimait certainement avoir le dessus et si personne ne prenait la peine d’apprendre... Thomas hocha la tête. — Tu ne le savais pas, n’est-ce pas ? — Comment le sais-tu, toi ? rétorqua-t-il en fermant son sac d’un geste rude même si la fermeture à glissière était magnétique. — Carry, je vous regarde vous entraîner en utilisant cette union depuis des semaines, soupira Thomas. Il ne faut pas un génie pour remarquer que Keenan n’est pas à l’aise quand tu commences à transmettre et quand tu arrêtes de le faire. C’était tellement évident, vraiment. Que pouvait voir un observateur quand ils parlaient de leur connexion à voix haute ? Carry n’avait pas besoin de voir le visage d’Avali et il s’était habitué à l’éviter : c’était déjà assez intime de savoir ce qu’il pensait, il ne voulait pas voir ses yeux sombres s’éclairer ou s’éteindre, ses lèvres se courber en un sourire ou grimacer de colère. — Ce n’est pas une union, répliqua-t-il, les dents serrées. — Parfait, alors ça fait partie de votre relation de travail, déclara Thomas. Et tu dois ettre que je suis un expert en la matière. Carry tressaillit. Thomas s’était véritablement donné à fond, il ne pouvait le nier. — Pourquoi ne me laisses-tu pas régler cela par moi-même ? — Oh, tu veux dire que tu allais faire quelque chose à ce sujet ? demanda son coéquipier avec un ton qui ne laissait rien supposer de bon. Je pensais que tu allais seulement rentrer chez toi pour te cacher et que tu reviendrais demain pour l’entraînement en espérant que ce qui le dérange ait disparu. — Ce n’est pas... Ce n’est pas juste. La main de Thomas atterrit sur son épaule. Il n’hésitait jamais à toucher Carry et, étrangement, c’était quelque chose qu’il chérissait. La désinvolture de ce geste.
— Écoute mon pote, je suis heureux de te laisser gérer ça. Mais gère-le, ne le repousse pas à plus tard, n’invente pas d’excuses, ne prends pas de pause. Je suis ici pour de bon et nous avons une véritable chance de nous rendre en finale si nous ne fichons pas ça en l’air. Et nous avons besoin de vous deux. Avec des pouvoirs psychiques ou non, mais à votre meilleur. Carry ne pensait pas qu’il y ait une chance qu’ils soient au meilleur de leur forme sans cette connexion, mais il acquiesça tout de même. Il pouvait au moins promettre d’essayer.
IL N’ENVOYA PAS UN message à Avali, il alla plutôt à sa rencontre sans faire d’effort pour camoufler le parfum normal que dégagerait un oméga et que n’importe quel alpha pourrait sentir. Avali fronça les sourcils dans sa direction depuis le banc où il était assis, semblant tellement perdu dans ses pensées qu’il avait oublié où il se trouvait. Au moins, il s’était changé avant de se déconnecter ainsi de la réalité. — Allez, lui dit Carry, nous devrions parler. Ils allèrent dans un restaurant et Carry demanda une table privée, puis ils commandèrent nourriture et boisson et demandèrent à ne pas être dérangés. Avali ne dit pas un mot qui ne venait pas du menu, pas même quand ils furent enfin seuls. — Je suis désolé de t’avoir menti, déclara finalement Carry. J’ai seulement... J’ai pensé que cela rendrait les choses plus faciles. — C’est bon, dit rapidement Avali, son odeur dorénavant âcre et sombre. Tu ne me dois rien. — Ce n’est pas vrai ! Je... Tu es mon coéquipier et tu m’as offert ton aide. Tu m’as véritablement aidé. Et j’ai seulement utilisé cette chose pour mieux jouer au hockey, je n’ai même pas pensé à ce que cela pourrait te faire. Cet aveu pesait lourdement sur ses épaules, il savait qu’il n’était pas doué avec les gens, mais il n’avait jamais utilisé intentionnellement une personne auparavant. — Tu m’as demandé si je voulais l’utiliser, remarqua calmement Avali. Mais son odeur était tout sauf calme, il semblait plutôt resigné et les mains de Carry tremblaient tant il voulait le toucher. Puis, Avali leva la tête pour le regarder dans les yeux, préoccupé et ouvert, et Carry se rendit compte qu’il était tellement habitué à cacher son propre parfum qu’il venait de trahir son anxiété. — Es-tu contrarié parce que nous avons perdu ? demanda Avali en fronçant les sourcils.
Carry renifla avec dérision et attrapa dans le centre de table une des fleurs délicatement sculptées dans le bois et traça son contour avec ses doigts. Il avait déjà voulu apprendre à lire le braille, mais ses mains étaient déjà trop usées par le hockey pour cela. — M’as-tu déjà parlé ? Suis-je contrarié à cause de notre défaite ? Évidemment ! Il soupira, puis posa la fleur pour ne pas la briser. — Mais je suis plus inquiet parce que j’ai commencé en utilisant cette... cette union, ajouta-t-il fermement. À quoi bon l’appeler autrement ? Ce n’était pas permanent, mais c’était une connexion physique basée sur leur compatibilité élevée. C’était une union. Et c’était dangereux. Avali déglutit, posa son regard sur la table, puis le corrigea doucement, mais fermement : — Nous. — Pardon ? — Nous avons commencé. Tu ne t’attribueras pas tout le mérite pour ça, Johnson, expliqua-t-il sur un ton qu’il voulait désinvolte. — Penses-tu que..., commença-t-il à demander avant de secouer la tête. Je crois que nous devons arrêter. Avali redressa la tête, l’inquiétude marquant son visage. Son odeur n’était pas beaucoup mieux, amère et salée à la fois. Il ne voulait pas. Ce savoir réconforta Carry et il se retira presque pour le cacher avant de lui-même poser les yeux sur la table et de laisser ses émotions jaillirent en même temps que le rouge sur ses joues. — Tu ne le veux pas vraiment, dit pensivement Avali. Tu... — J’ai un instinct comme n’importe qui, l’interrompit Carry. Cela ne veut pas dire que c’est une bonne idée ou que je le veux nécessairement. Si nous ne sommes pas prudents...
— Nous pourrions nous unir de manière permanente, termina Avali et l’envie dans sa voix fit frissonner Carry. Il savait exactement ce qu’Avali ressentait. Pas à cause de son odeur, mais parce que Carry le ressentait lui aussi. Il secoua la tête, serra la mâchoire et se leva. La pièce dans laquelle ils se trouvaient était assez petite et visiblement réservée pour des repas romantiques avec ses chandelles et ses accents floraux à l’allure onéreuse. Trop petite pour faire les cent pas. Il avait pensé à une salle de réunion, le genre avec plus de cuir et peut-être un bar, le genre d’endroit où son père l’avait parfois conduit quand il était jeune et que son père pensait encore qu’il allait le suivre en affaires ou en politique. Mais apparemment personne recevant une requête pour une table privée de la part d’un oméga et d’un alpha ne penserait... Il soupira, puis sonna la cloche pour un service sans regarder Avali. Naturellement, la serveuse était une oméga alors que Carry aurait eu besoin de l’intimité procurée par un bêta insouciant. Avali la remercia chaleureusement et elle rougit. Carry put à peine réprimer son élan de possessivité. Peut-être avait-ce été une terrible idée de demander un endroit privé, après tout. Mais comment auraient-il pu discuter autrement ? Étaient-ils censés avoir Thomas entre eux qui serait incapable de suivre une moitié de la conversation puisqu’ils ne la partageaient pas à voix haute, puis lui demander de trouver une solution à un problème qui n’avait aucun sens ?
Chapitre 36 : Keenan
Il dut boire d’un coup la moitié de son verre de porto, qui était beaucoup plus fort que ce qu’il avait l’habitude de boire, avant de pouvoir répondre. — Je ne sais pas ce qui m’arrive. Johnson ne releva pas la tête de son propre apéritif qu’il buvait également rapidement. Il avait sûrement camouflé à nouveau son odeur à cause de la serveuse, songea Keenan, et il ne pouvait vraiment le blâmer de vouloir cacher ses émotions à une étrangère, mais il voulait le sentir à nouveau. Il avait besoin de quelque chose pour savoir s’il fichait tout en l’air, s’il avait complètement tort... Johnson avait dit qu’il ne le voulait pas, certes, mais son odeur avait bien indiqué que c’était un mensonge. Il pouvait sentir l’attraction de leur union. Leur union, c’était agréable de le nommer ainsi. La vérité, pour une fois. Il prit une dernière gorgée de courage. — Je suis monosexuel, je n’ai jamais... Pas même après que nous... Je n’aime pas les hommes de cette manière. Je ne vois tout simplement rien en eux... Il avait l’impression de trop insister, mais Johnson ne l’interrompit pas et Keenan n’avait aucune idée de ce qu’il pensait, son visage était vide d’expression et son odeur n’était toujours pas revenue. Puis, il dut dire les mots qui le troublaient le plus : — Seulement en toi. Le couteau de Johnson fit un bruit strident contre la porcelaine quand il le posa. Il pinçait les lèvres quand il leva la tête vers Keenan. S’il tentait de camoufler son inquiétude, c’était raté. — Oui, à cause des chaleurs. Seulement durant les chaleurs. Keenan soupira, se sentant comme s’il était sur le point de sauter d’une falaise. Il ouvrit la bouche pour répondre avant de réaliser qu’il était incapable de prononcer les mots. Il secoua plutôt la tête. Il voulait regarder Johnson pour voir sa réaction, pour voir si le silence pesant à l’autre bout de la table était dû à la surprise ou... Mais il ne voulait pas prendre ce risque. Son cœur battait si rapidement que c’en était douloureux et ses poings étaient serrés contre ses
genoux. — C’est..., sembla s’étouffer Johnson, mais Keenan ne pouvait savoir quelle émotion le faisait réagir de la sorte. — Cesse de te cacher, siffla-t-il soudainement en colère. Ce n’était pas vraiment la faute de Johnson s’il avait décidé de faire ça, mais cela donnait cette impression. Cela donnait l’impression que Johnson avait le pouvoir de cacher ses émotions et qu’il l’utilisait contre Keenan. Il lança un coup d’œil à son compagnon. Les yeux de Johnson s’agrandirent de surprise et son odeur envahit la pièce d’un coup avant qu’il ne la contrôle mieux avec un effort visible. — Tu as dit... Je peux te dire ce que je veux dire. Tu n’as pas besoin... Il avait réagi à son ordre, réalisa Keenan à moitié horrifié, avant de se souvenir qu’il était désavantagé dans cette situation. Ce n’étaient pas les sentiments de Johnson qui étaient exposés à tout vent. — Mais tu ne me dis rien et je ne te dis rien. Tu peux... c’est injuste. — Je peux t’apprendre, lui proposa Johnson de manière incongrue. — Pardon ? — Je peux t’apprendre à camoufler ton odeur et ensuite... — Et ensuite tu n’auras pas à gérer mes sentiments compliqués ? compléta amèrement Keenan avant de repousser sa chaise si fort qu’elle tomba derrière lui sur le plancher de bois. — Non ! s’exclama Johnson en se levant à son tour. Je veux seulement que ça soit juste. Tu as dit... — J’ai dit que j’avais des sentiments pour toi, cracha Keenan. Et toi, tu as changé de sujet, putain. — Des sentiments ? répéta Johnson en montrant ses dents. C’est comme ça que
tu appelles ça ? Tu veux me baiser. Ce ne sont pas des sentiments, Avali. Ce sont tes foutues pulsions ! Et ce n’est rien de nouveau, n’est-ce pas ? Je fais comme si ce n’était rien depuis des mois ! — Mais, tu peux le sentir toi aussi, dit Keenan. Tu... Je ne pensais pas que c’était le cas, tu me le caches complètement et je pensais... — Les pulsions ne sont pas des sentiments, répéta Johnson. Et je ne laisse certainement pas ma queue décider de ma vie. — Tu n’as pas tes chaleurs en ce moment, souligna Keenan. Raisonnable, sois raisonnable. — Non, dit Johnson beaucoup plus calmement que ce dont Keenan était capable. Mais nous sommes tout de même compatibles et tu te souviens encore de ce que sont les chaleurs. Ne penses-tu pas que cela joue un rôle là-dedans ? — Évidemment, rétorqua Keenan. Et alors ? Nous ne parlons pas d’un investissement à la banque ! Pourquoi ne pourrais-je pas être partial ? Les sentiments ne sont pas le fruit d’un calcul. Et qu’est-ce que ça change si c’est à cause de tes chaleurs ? C’est tout de même vrai. Je te veux quand même. Johnson tressaillit comme si on venait de le gifler et, quand il plongea son regard dans celui de Keenan, le sien était flamboyant. — Eh bien, pardonne-moi si je veux un peu plus de mon partenaire qu’il aime seulement mon odeur quand je suis hors de contrôle, siffla-t-il. Mais tu es chanceux, si tes critères sont aussi bas, tu n’auras aucun problème à trouver quelqu’un d’autre ! — Je ne veux personne d’autre ! répliqua Keenan. Son ton était trop colérique, mais celui de Johnson l’était tout autant. — C’est triste alors, répliqua Johnson sur un ton définitif, parce que je ne suis pas intéressé. Puis, il laissa son parfum s’échapper librement : amer et brûlé et si terrible que Keenan eut un mouvement de recul. Il ne mentait pas. Si Keenan le faisait sentir
de cette manière, c’était encore plus étrange qu’il n’ait pas demandé à se faire complètement changer de trio. Il se pencha en avant, posant ses bras sur la table pour er son poids, se souvenant vaguement que sa chaise n’était plus là. Il l’avait su. Il avait su que Johnson ne le désirait pas, ne l’aimait pas, mais ça... Ce genre de dégoût était autre chose. Il ne leva pas la tête quand Johnson partit, il en était incapable même si Johnson avait repris le contrôle de son odeur. Le seul souvenir de son parfum était encore gravé en lui et les émotions semblaient brûlées dans son âme.
IL NE DÉCROCHA PAS quand son téléphone sonna et vit que l’appel venait de Sven que lorsqu’il regarda l’horloge des heures plus tard. Il avait le regard plongé par la fenêtre qui occupait la majeure partie du mur gauche de sa chambre depuis trois heures, le lever du soleil et l’heure où il aurait dû prendre sa douche derrière lui depuis un bon moment. Il était en train de se demander s’il était trop tard pour le rappeler quand son téléphone vibra. Ce n’était pas Sven, mais avec le téléphone toujours entre les mains, ses yeux suivirent les mots qui s’affichèrent avant qu’il ne puisse décider s’il voulait vraiment les lire. [Es-tu partant pour des leçons psychiques ? Thomas a dit qu’il sera là.] Keenan regarda fixement le message comme s’il venait d’une autre planète, et qui sait ? Peut-être était-ce le cas, parce que cela ne ressemblait en rien à ce que dirait l’homme qui l’avait abandonné dans la salle privée d’un restaurant pour qu’il boive démesurément. [Cet après-midi.], répondit-il d’une manière lisible seulement grâce à la correction automatique. [Quatre heures ?], reçut-il quelques minutes plus tard. [Quatre heures.], acquiesça Keenan avant de se rouler sur le lit jusqu’à ce qu’il puisse atteindre ses gouttes analgésiques sur la table de chevet.
LES ENTRAÎNEMENTS N’AVAIENT jamais été aussi gênants, pas même quand Keenan était un débutant stupide et qu’il se présentait sans avoir dormi la veille. Sven entra dans le vestiaire et alla directement vers Keenan, prenant le siège à côté de lui sans même prendre son maillot de son casier. — Tu as l’air dans un de ces états, lui dit son capitaine d’un ton préoccupé. Keenan ne pouvait lui en vouloir, il avait utilisé un peu de maquillage pour cacher les cernes sous ses yeux, mais il n’avait aucune manière de camoufler son odeur à l’autre alpha. Il ne savait pas comment il allait pouvoir s’en remettre. — Je ne me sens pas bien, it-il simplement et honnêtement parce que Sven était son ami. Peut-on en parler plus tard ? Sven pinça les lèvres, puis soupira. — Dois-je aller dire aux entraîneurs que tu rentres chez toi ? Keenan secoua la tête. Il savait que s’il quittait l’aréna maintenant, il n’y retournerait pas pour la petite leçon de Johnson et, bien que ce soit ironique à souhait, les leçons de Johnson étaient son seul espoir de survivre à Johnson luimême. — Il suffit de... changer les trios ou quelque chose du genre. Keenan n’avait pas besoin de regarder son ami, l’inquiétude de Sven était palpable dans le nuage amer qu’il dégageait à présent. — D’accord, dit-il, je vais le faire. Être sur la glace avec Johnson, même si c’était dans un trio différent, était comme patiner sans regarder où il allait. Il ne marqua pas et crut avoir empêché Thomas, qui était toujours avec lui, de marquer en se mettant sur son chemin. Coach Sari l’arrêta ensuite et l’interrogea sur son sommeil, son alimentation et ses temps de repos. Keenan émit les bons bruits et jura les bonnes promesses. Il
n’avait aucune idée de s’il allait les tenir parce qu’aussitôt qu’il les prononça, elles sortirent de son esprit. Puis, les autres partirent et il se retrouva seul avec Thomas et Johnson. Gênant ne suffisait plus à décrire la situation. Mais c’était complètement sa faute, Sven avait raison : c’était exactement pour cette raison qu’on ne sortait pas avec un coéquipier. Ou on n’essayait pas, dans son cas. Keenan n’avait jamais été aussi ouvertement et définitivement rejeté auparavant pour ensuite retourner essayer d’apprendre quelque chose d’aussi intime que de bloquer son odeur par cette même personne. Thomas était là, comme promis, et il était assis entre eux dans une salle de conférence cachée dans les recoins de l’aréna. Il était un peu trop sur son téléphone pour être véritablement considéré comme un chaperon, mais Keenan était presque reconnaissant qu’il ne porte pas plus attention aux instructions beaucoup trop formelles de Johnson et à la manière dont Keenan était incapable de le regarder en face. Johnson était un bon professeur, beaucoup moins impatient qu’il l’était habituellement sur la glace. Avec sa propre odeur complètement camouflée, Keenan pouvait prétendre être n’importe qui sauf l’homme qu’il avait invité la veille. Keenan pouvait comprendre que quelqu’un ne soit pas attiré par lui, il était en forme, mais personne n’est au goût de tout le monde, mais il ne pouvait pas... Il ne pouvait pas comprendre que Johnson soit vraiment attiré par lui, mais qu’il le déteste au point que l’idée de sortir avec lui le dégoûte. Mais il était d’accord, il pouvait le faire, il était prêt à tout pour le hockey. S’il ne le regardait pas. — D’accord, disait Johnson. Sa voix n’aidait aucunement, même s’il avait encore la même capacité à commander, contrairement à ce qu’on attendait d’un oméga, sur un ton doux qui rendait Keenan... — Compte avec moi et imagine-toi reculer d’un pas à chaque fois.
Keenan ferma les yeux et fit ce qu’on lui dit. Un. Deux. Trois. Quatre. Cinq. Il ferma la porte dans son esprit et la verrouilla jusqu’à ce qu’il entende un clic. Puis, il ouvrit les paupières et rencontra le regard de Johnson. Il n’avait pas prévu de le faire, mais quand il vit un sourire étirer ses lèvres, il ne put regarder ailleurs. — Tu y es arrivé ! Johnson sauta sur ses pieds d’excitation, mais Keenan était incapable de bouger. Peut-être Johnson ne pouvait-il pas savoir ce qu’il ressentait, mais Keenan ne pouvait s’échapper, puisque c’était inscrit clairement sur le visage de Johnson. — Et tu disais que tu étais mauvais à ça, ajouta Johnson en le réprimandant gentiment. Thomas posa sa main sur l’épaule de Keenan, le faisant sursauter, mais cela aida parce que dans sa surprise il se tourna vers son ailier droit ce qui fit disparaître Johnson de son champ de vision. Le sourire de Thomas se dissipa quand il aperçut le visage de Keenan. — Qu’est-ce qui ne va pas ? Keenan secoua la tête, se léchant les lèvres en essayant de trouver les mots. Cela lui semblait bizarre, comme s’il se tenait extrêmement droit et que sa colonne vertébrale allait éclater. — Je me sens... C’est bizarre, déclara-t-il en faisant bien attention de ne pas regarder à nouveau dans la direction de Johnson.
— On s’habitue, lui promit l’oméga d’un ton toujours aussi enjoué. Maintenant, défaisons cela... — Non, décida Keenan en s’appuyant contre la table pour se relever. Je vais bien, vraiment, assura-t-il à l’épaule de Johnson. Je vais m’occuper de la suite. — Mais... C’était Thomas qui s’y opposait et Keenan se tourna pour lui lancer un faible sourire. — C’est mon esprit, mon vieux. Je vous le dirai si j’ai besoin de plus d’entraînement. Et c’était tout ce qu’il fut capable de dire avant de s’en aller. Au moment où il sortit de l’aréna, il réalisa qu’il n’avait remercié aucun des deux et au moins Thomas l’aurait mérité. Mais ils étaient ses coéquipiers, ils lui pardonneraient sa grossièreté et il ne pensait réellement pas être capable de se rapprocher physiquement de Johnson à nouveau. Il avait dû se blesser une autre fois à l’épaule en faisant trop ses exercices de rééducation pour qu’il comprenne : parfois, on a simplement besoin d’un instant de repos, peu importe si le moment était mal choisi et si la peine était sévère. Si on ne prend pas cette pause quand elle est nécessaire, cela ne fait que s’envenimer, que s’aggraver jusqu’à ce qu’on soit forcé de se reposer. Et à ce moment-là, il était souvent trop tard pour autre chose qu’un congé maladie. En règle générale, Keenan n’était pas le genre de personne qui prenait des journées de congé pour sa santé mentale — il était beaucoup plus du genre à se faire plaquer contre la bande ou à faire une chute — mais il connaissait les signes et en ce moment, ils clignotaient violemment. Il ne dit pas à Coach Hernandez exactement ce qui n’allait pas, il lui fit simplement savoir qu’il ne se sentait pas assez bien pour l’entraînement et qu’il manquerait également le jour suivant. Sans surprise après sa performance pathétique sur la glace du matin même, son entraîneur lui donna la permission sans poser de question.
DEUX JOURS, IL S’ÉTAIT promis deux jours complets pour se remettre. Il aurait pu s’en permettre davantage, s’opposait son cerveau, mais Keenan ne voulait pas compter là-dessus. S’il se permettait d’avoir peur de Johnson à nouveau, il n’arrêterait jamais de se trouver des excuses. Il n’y avait rien d’effrayant chez Johnson : il avait repoussé ses avances, d’accord, mais ce n’était pas comme si ce n’était jamais arrivé auparavant. Ça n’était peut-être pas arrivé depuis un bon moment, évidemment, avec tous ses irateurs et son corps musclé par le sport professionnel, mais ce n’était pas non plus impossible. Et il n’était pas assez égoïste pour que cela le vexe en soit. C’était seulement qu’il s’agissait de Johnson et il pouvait... Johnson le connaissait, c’était évident : il donnait parfois l’impression de er plus de temps à suivre l’esprit de Keenan que le palet lui-même. Que dirait-on si quelqu’un qui était fasciné par son cerveau, quelqu’un qui ettait le trouver également de son goût, ne voulait même pas considérer sortir avec lui ? C’était quasi impossible de ne pas se sentir vexé. Mais une vie amoureuse ne fonctionnait pas de cette façon, il le savait, personne n’était obligé de le trouver de son goût. Pas même l’homme qui avait couché avec lui deux fois, en plus de er ses journées à guider mentalement Keenan sur la glace. Mais Keenan ne lui avait fait aucune promesse non plus. Il n’était pas obligé de laisser entrer Johnson dans sa tête. Ce soir-là, il reçut ce qu’il pensait être un message, mais qui s’avéra finalement être plusieurs. [Ne t’en fais pas. Je sais ce que ces fichues hormones peuvent faire et tu sais que ce n’est pas vrai, parce que tu penses que je suis un enfoiré.] [Désolé d’avoir flippé.] [Je vais mieux gérer ça.] [Tu es un bon hockeyeur et une bonne personne aussi.] Et puis, quelques heures plus tard.
[Prenons un peu de distance et nous irons mieux. Nous irons en demi-finale et puis ce sera l’été.] Keenan ne répondit pas, il ne pensait pas être capable de formuler quoi que ce soit de conciliant et il ne voulait pas non plus revenir sur ses paroles et accepter l’excuse que lui proposait Johnson à propos des hormones. C’était stupide parce que jusqu’au moment où il lui avait fait des avances, il s’était toujours juré que ce n’était que ses hormones. Il s’était promis qu’il ne laisserait pas son corps le contrôler, puis il avait compris qu’il ne voulait pas seulement coucher avec Johnson, il voulait l’embrasser et lui parler. Le serrer contre lui. Le garder près de lui. Il savait que c’était à cause du sexe et de la connexion, non, de l’union. Johnson ne la voulait peut-être pas, mais cela ne voulait pas dire qu’elle n’existait pas. Et l’union n’était que le début. Il savait qu’ils s’étaient drôlement rapprochés et que la plupart du temps ils étaient proches d’une manière qui n’impliquait pas de parler. C’était le contraire de ce qu’une relation amoureuse était censée être, mais cela ne rendait pas leurs rapprochements moins vrais, cela n’aidait pas à changer ce qu’il ressentait à l’idée de Johnson avec quelqu’un d’autre... Ou pire encore, de savoir qu’il n’était avec personne, mais qu’il avait menti pour se débarrasser de Keenan. Cela aurait été plus simple s’il s’était seulement agi d’une étrange pulsion sexuelle, même si c’était dû à lui et non exclusivement à ses chaleurs. Peut-être ses hormones l’avaient-elles mené à Johnson comme à un aimant, mais, peutêtre tout aussi stupidement, c’était Keenan qui voulait rester. Il ne pouvait prétendre que c’était son instinct qui l’avait fait pleurer quand Johnson lui avait dit qu’il voyait quelqu’un d’autre. Son instinct d’alpha aurait dû le mettre en colère, pas le plonger dans la tristesse. Le sentiment de trahison venait complètement de la part de Keenan. C’était la réaction d’un amant, pas de la possessivité, seulement le sentiment d’être blessé... Parce qu’il ne voulait pas seulement baiser Johnson, il voulait qu’il le choisisse lui.
LE MATIN DU DEUXIÈME jour, plusieurs messages l’attendaient à son réveil. [Si nous jouons avec un handicap, nous avons vraiment besoin de nous entraîner.] [Tu n’es pas vraiment malade, n’est-ce pas ?] [Personne d’autre ne peut mieux réceptionner mes es] [mais je ne dis pas que tu dois cesser d’être malade parce que j’ai besoin de tes talents de hockeyeur] [mais si tes vitamines te remettent sur pied, tu es le bienvenu à l’entraînement.] [Thomas te e le bonjour.] [Je ne sais pas ce que je fais de mal, mais si tu me le dis je vais essayer de faire mieux] [désolé, je n’avais pas vu l’heure.]
Chapitre 37 : Cartwright
Quand Avali se présenta à l’entraînement, il affirma avoir eu la grippe, puis se changea sans donner de signe de maladie. Même Carry savait qu’il mentait, et ce, en dépit de ses aptitudes psychiques. Soit Avali n’avait vraiment pas porté attention en classe, soit il n’avait jamais trouvé de véritable motivation auparavant, parce qu’il avait appris à bloquer son odeur aussi bien qu’il apprenait de nouveaux jeux au hockey. Il ne dégageait presque aucun parfum, ce qui fit inspirer profondément Carry comme pour en attraper un soupçon. Il n’en avait aucunement le droit, c’était sa propre faute si son centre avait manqué les entraînements des deux derniers jours. Et il était déterminé à faire mieux. L’odeur d’Avali demeura camouflée même quand leur entraîneuse leur dit qu’ils allaient s’entraîner avec leur trio et cette fois Binker ne décida pas soudainement d’enlever Carry du premier trio, ce qui lui semblait être un bon signe. Carry maintint ses boucliers au même niveau, pas aussi intensément qu’il le pouvait, mais se laissant ouvert autant qu’Avali avait déclaré acceptable. C’était comme jouer avec une personne complètement différente : Carry savait toujours où il était, comme avec n’importe quel alpha, mais il ne pouvait pas voir ce qu’il allait faire ou lui laisser savoir ce qu’il pensait lui-même faire avec une brève image mentale du prochain jeu. Et ne pas le faire était difficile, il devait se retenir consciemment, et cela détournait son attention du palet et le rendait plus maladroit également, vacillant aux moments décisifs. Après quelques minutes de es manquées et de faux départs, leur entraîneuse les arrêta pour leur demander ce qui n’allait pas. Carry s’adossa contre la bande, incapable de trouver une réponse, mais Avali intervint. — C’est ma grippe, je suis encore un peu dans les vapes, expliqua-t-il. Coach lui lança un regard sceptique, sans paraître le moins du monde convaincue. — Eh bien, retournez vous entraîner, suggéra-t-elle sans ménagement. Je ne vous ai jamais vu joué de cette manière. Avali se retourna et se dirigea à nouveau vers la glace, mais Thomas attrapa le bras de Carry pour l’empêcher de le suivre.
— Avez-vous encore oublié d’informer votre bêta de service ? demanda-t-il en blaguant seulement à moitié. Carry grimaça. Il avait tellement essayé de travailler avec un de ses coéquipiers qu’il en avait oublié l’autre. — C’est seulement que nous n’utilisons plus rien de psychique. Je lui donne de l’espace. — C’est comme ça que vous jouez sans magie ? s’horrifia Thomas. — Ce n’est pas de la magie, siffla Carry. Et c’est comme si nous jouions avec un handicap. Nous nous y habituerons quand nous arrêterons de penser que nous en savons plus qu’il en ait. Thomas secoua la tête. — Eh bien, vous allez devoir vous y mettre rapidement. Je ne resterai pas encore tard pour compenser votre dernier drame. — Ne t’en fais pas, tu n’auras pas à le faire, rétorqua Carry avant de patiner vers Avali. Ils allaient devoir utiliser la bonne vieille méthode : parler. — Avali. La voix de Carry était atténuée par son casque, mais elle était bien perceptible. Mais Avali ne réagit pas jusqu’à ce qu’il l’appelle une seconde fois en montant le ton. — Quoi ? — Nous devons beaucoup plus communiquer, expliqua Carry en tentant de cacher l’irritation de sa voix. — D’accord, accepta facilement son centre. À propos de quoi ? — De tout, comme toi qui dois me signaler comme tu le ferais pour Thomas. Fais-moi savoir quel jeu tu feras.
Avali hocha la tête, il ne regardait pas Carry en face et, après ces quelques semaines à se détendre en sa compagnie, cela ressemblait plus à une dérobade qu’à de la politesse. — Je suis prêt à rester plus tard si tu veux, lui proposa Carry. Il ne pouvait plus demander à Avali de lui dire quoi faire, pas en personne, pas quand Avali pouvait utiliser sa voix d’une certaine façon pour faire figer le cerveau de Carry jusqu’à ce qu’il obéisse. Il l’avait fait au restaurant, simplement parce qu’il était en colère que Carry puisse masquer son odeur et pas lui. Il avait vu la surprise d’Avali et ne pensait pas que l’alpha, qui n’avait jamais même insinué qu’il pouvait lui donner des ordres, l’avait fait consciemment. Mais il en était capable. Et ça faisait toute la différence : c’était la raison pour laquelle Carry était dans ce pétrin en partant, vraiment. Il n’allait pas avoir une relation avec quelqu’un qui pouvait lui donner des ordres, même s’il semblait décent. Il n’allait certainement pas s’unir par une véritable cérémonie pour donner sa vie en échange, comme si c’était romantique d’annoncer au monde entier qu’un alpha le tenait au bout d’une laisse. Avali regarda dans sa direction trop rapidement pour que leurs yeux se rencontrent, puis il haussa les épaules. — Essayons à nouveau. Numéro quatre. Ils essayèrent. Thomas était le seul qui n’était pas complètement perdu et même lui avait du mal à s’adapter au manque flagrant de coordination entre Avali et Carry. Il ne cessait de regarder en direction de celui qui était le plus près de lui pour savoir ce qui se ait, pour les trouver tout aussi perdus que lui. Les mots et les signes ne les avançaient en rien. Leur entraîneuse voulut naturellement leur parler après l’entraînement et elle n’avait rien de bon à dire. Ils avaient pourtant progressé, mais c’était le genre de progrès qu’on attendait d’un nouveau trio et qui n’était rien de moins que pathétique pour trois joueurs qui patinaient ensemble depuis des mois et qui s’étaient déjà adaptés aux styles des autres avec une facilité remarquables au départ. C’est Thomas qui réussit à faire cesser la tirade et il y parvint grâce à son
charme, — Nous restons un peu plus longtemps, Coach. Ce n’est qu’un petit pépin. Promis, dit-il à Coach Sari. Elle sembla le croire, d’une manière ou d’une autre, alors qu’elle n’avait pas cru Avali. Ou peut-être avait-elle décidé qu’ils avaient beaucoup trop foiré pour que ce soit autre chose qu’un pépin. Carry savait bien que de l’extérieur, ils devaient avoir l’air de joueurs complètement différents avec leur dynamique peu naturelle et hésitante tandis qu’une semaine plus tôt ils avaient joué contre l’équipe la plus forte de la ligue et gagné. — Voyez ce que c’est, déclara-t-elle en les laissant seuls. Thomas attendit qu’elle ait bel et bien quitté la glace pour se tourner vers ses coéquipiers. Carry ne l’avait jamais vu avec un regard aussi sinistre. — Bon, j’ai enduré bien des choses. Vos hauts, vos bas et vos fichus travers à tous les deux, dit-il avant de détourner son regard d’Avali pour le poser sur Carry. Tu ne ficheras pas en l’air notre trio avant les demi-finales. C’est tout, ça n’arrivera pas. Dites-moi pourquoi vous n’utilisez pas vos tours de e-e mentaux. Je pensais qu’on avait eu cet entraînement privé pour éviter tout ça. Incertain, Carry déglutit et Avali prit la parole à sa place. — Les tours de e-e me font perdre la tête. J’ai demandé à Johnson de me laisser une pause. Mais ne t’inquiète pas, tout sera de retour à la normale pour le match. — Comment peux-tu le savoir ? lui demanda Thomas sans en démordre. Tu réalises bien que les entraînements sont pour les matchs, n’est-ce pas ? Pour que les pépins arrivent maintenant et pas là-bas. Avali était tellement refermé que Carry dut le regarder pour compenser, il le vit donc déglutir. Il s’étouffa un peu quand Avali rencontra son regard, mais les yeux de l’alpha se détournèrent pour se concentrer sur quelque chose derrière Carry avant qu’il ne lui demande : — Tu voudrais qu’on fasse une démonstration ?
Carry hocha la tête, la bouche aussi sèche que du papier de verre. Après trois buts marqués contre lui en trois minutes, Thomas it à contrecœur qu’ils y parvenaient encore. Avali avait été heureux après chacun des buts, mais son humeur redescendait rapidement quand ils arrêtaient de bouger. Au moment où ils sortirent de la patinoire, il était à nouveau tout confus et ne ressentait plus qu’un vague mécontentement. Il n’était pas en colère, pas du tout, et pas contre Carry, mais cela donnait cette impression. Il se sentait coupé et rejeté et... triste. Ce qui en soi était triste, après tout. Mais il le voulait à nouveau. Et c’était complètement stupide parce que ce n’était pas à lui de le ravoir, cela n’avait jamais été à lui, peu importe le nombre de fois où il avait couché avec Avali ou que leurs esprits s’étaient frôlé ou que leurs corps avaient été en parfaite harmonie. Ils n’étaient même pas amis, pas vraiment, et si Carry n’était pas prudent ils ne seraient même plus des coéquipiers.
Chapitre 38 : Keenan
Le prochain match se a bien, voire même très bien. Ils jouèrent contre les Летещі Чайкі sur leur propre patinoire à Odessa. Entourés d’irateurs ukrainiens en furie reconnus pour leur soutien parfois violent à leur équipe, les Goélands Virevoltants jouèrent à fond. Mais les Flammes de l’Enfer l’emportèrent. Ils gagnèrent, ce qui était le but, même si, en termes de nombre de buts ils auraient pu faire mieux. Johnson et lui avaient été assez ouverts pour échanger leurs incroyables es, pour que ça fonctionne. Et cela ne le dérangeait pas trop. Pendant un match, aucun d’entre eux n’avait vraiment le temps de ressentir quelque chose qui aurait dû rester privé de toute façon. Et cela aidait un peu, bêtement, parce qu’il s’était habitué à leur union d’esprit, la pression constante et seulement... la présence d’une autre personne encore plus près que près sur la glace. C’était sûrement mauvais pour lui, pour eux deux, mais cela ne donnait pas cette impression, il supposait que les drogués disaient la même chose. C’était un peu plus difficile pendant les entraînements avec l’équipe parce que cela devint assez évident pour eux tous que les entraîneurs n’allaient pas ignorer leur performance pendant les entraînements seulement parce qu’ils marquaient une fois les matchs venus. Et cela semblait tout simplement bizarre — comme ce journaliste l’avait déjà fait remarquer — qu’ils puissent jouer comme si les dieux eux-mêmes leur avaient donné une tonne de bon karma un jour, pour que le suivant ils s’écroulent. Et être bizarre était la dernière chose qu’ils pouvaient se permettre avec un secret aussi grand que le leur. Alors Keenan donna à Johnson son approbation pour y aller avec ce qu’ils appelaient le « niveau trois », pas le niveau d’ouverture avec lequel ils jouaient pendant un match, mais pas non plus le premier qui réduisait leur connexion pour à peine sentir la présence de l’autre. Jusqu’à présent leurs entraîneurs avalaient qu’ils étaient au ralenti pendant les entraînements pour analyser plus facilement leurs jeux. Et en vérité, la diminution d’attention sur eux leur permettait de se concentrer sur ce qu’ils voulaient réellement savoir : comment jouer sans leur union. Ce n’était pas ce dont Keenan avait besoin, ce n’était pas un détachement complet de l’esprit de Johnson, mais il faisait avec ce qu’il avait. Et c’était
mieux, même s’ils s’entraînaient en privé deux fois par semaine avec Thomas quand ils jouaient à domicile et, dans l’ensemble, Keenan ait plus de temps avec Johnson que jamais auparavant. Étrangement, les moments où Johnson faisait comme s’il était un bêta et où Keenan faisait de son mieux pour masquer son propre esprit étaient les plus gênants. Keenan n’arrivait pas vraiment à expliquer pourquoi l’absence des émotions de base de Johnson le déconcertait autant. Pourtant, Johnson les camouflait depuis des mois maintenant avec seulement quelques soupçons de ses véritables émotions s’échappant à travers leur union une fois de temps en temps quand il craquait. Seulement en regardant Johnson et Thomas discuter autour d’un smoothie le jour suivant, il lui vint à l’esprit que ce n’était pas Keenan qui avait perturbé leur relation. C’était Johnson qui avait ce handicap, et il le gérait aussi mal parce qu’il n’était tout simplement pas doué pour lire les autres. Il se tourna alors vers Thomas en fronçant les sourcils, mais s’il avait manqué l’exaspération de Thomas c’était parce qu’il avait l’habitude d’observer à travers les fenêtres quand ils parlaient ou d’avoir le regard fixé au-dessus de sa tête. Thomas soupira et se répéta d’une voix patiente qu’il utilisait souvent avec Johnson, réalisa Keenan. — Comme si nous avions besoin de chance. — Oh, dit Johnson en souriant légèrement au compliment fait à leur équipe qui était pourtant vrai, parce que s’ils continuaient ainsi, ils n’auraient pas besoin de chance. Après l’avoir vu une première fois, il ne pouvait cesser de le remarquer : Johnson se perdait pendant de longs moments, puis il demandait parfois des éclaircissements et la plupart du temps c’était parce qu’il ne regardait pas en face la personne qui lui parlait. À d’autres moments, c’était le ton emprunté qui lui ait tout droit au-dessus de la tête à un point tel où Keenan pouvait presque le voir se demander si c’était une blague. Ses coéquipiers ne semblaient aucunement surpris, quoique certains étaient plus patients que d’autres. Keenan ne l’avait jamais remarqué auparavant, trop préoccupé par les manières
brusques de Johnson à son égard, mais maintenant que Johnson faisait tout pour être cordial, voire même gentil, Keenan ne sentait plus le besoin de détourner le regard dès qu’il l’entrevoyait. C’était maintenant aussi plus facile de regarder l’autre homme quand il n’avait pas peur qu’il apprenne la moitié de ce qu’il ressentait et il doutait qu’il en était lui-même la cause. Non pas qu’il lui restait beaucoup de secrets en ce qui concernait ses sentiments pour Johnson, mais c’était une chose de savoir qu’une personne se remémorait un souvenir embarrassant — ou plusieurs — et c’en était une autre de savoir qu’il vivait un nouveau moment gênant juste devant leurs yeux. Il ne pensait pas que Johnson était stupide, pas du tout. Le type parlait au moins trois langues étrangères, ce qu’il aimait bien montrer à tous parce que Johnson n’avait pas une once de modestie dans son corps talentueux. Il possédait également un esprit stratégique qui ravissait Keenan même quand il le rendait fou à vouloir combiner des jeux de différentes équipes sans prendre en compte les compétences qu’ils avaient déjà en tant que joueurs. Il semblait surtout distrait, perdu dans un monde qui lui était propre. Et puis, il y avait des moments où il était attentif, comme sur la glace, et son attention précise transformait tout ce qu’il touchait en œuvre d’art. Il ne voulait pas vraiment se concentrer sur cela, indépendamment de son besoin déroutant pour Johnson. Mais évidemment, en refusant qu’il lise son esprit, il avait empêché Johnson d’avoir accès à sa plus grande source d’information sur Keenan. Et Johnson détestait ne pas savoir ce qui se ait, il l’avait compris très tôt. Alors Johnson commença à écouter. Pas seulement quand Keenan parlait de hockey, mais aussi quand il parlait de lui-même ou même quand il se disputait amicalement avec Sven ou un autre coéquipier près de lui. Johnson s’était toujours fait un devoir de rester à l’écart, mais dorénavant Keenan le voyait se rapprocher, regardant souvent ailleurs, mais ses oreilles toujours penchées vers Keenan. Et puis, ils essayèrent de prévoir une nouvelle séance d’entraînement privée et Johnson fronça les sourcils en lui faisant remarquer qu’il avait un contrôle chez le physiothérapeute ce mercredi. Et c’était vrai. Johnson ne faisait pas de demi-mesures. Quand il pensait savoir quelque chose, il avait souvent raison. — Je dois y aller, annonça Thomas.
Il se leva depuis la banquette du coin qu’ils avaient déclaré leur et haussa les épaules quand Keenan lui lança un regard. — Je vois ce gars, avoua leur coéquipier d’un ton gêné. Keenan haussa les sourcils pour le taquiner. — On dirait bien que tu fais plus que seulement le voir. — Oh, tais-toi, c’est encore assez nouveau. — C’est l’avocat ? demanda alors Johnson. Il n’était pas du genre à taquiner les autres, mais il semblait toujours plus à jour sur la vie romantique de Thomas que Keenan l’était. — Oui, dit Thomas avec un sourire qui aurait pu illuminer la pièce à lui seul. C’est un amour. Johnson éclata de rire. — C’est exactement ce à quoi je pense quand on me parle d’avocat, commenta-til pince-sans-rire. Il était doué pour l’ironie, sa tendance naturelle à regarder de haut n’importe quoi et n’importe qui rendait ses remarques plus aiguisées que ce que Keenan aurait été capable de faire. Et d’une manière ou d’une autre, comme Johnson était à moitié méprisant envers le monde entier, ses blagues pouvaient être de petites piques sans qu’elles soient agressives. — Hé, il faut de tout pour faire un monde, protesta Thomas en attachant sa veste sans attendre. On se voit demain les gars.
APRÈS LE DÉPART DE Thomas, Johnson se tourna vers Keenan plutôt que de s’en aller pour le suivre. Keenan ne savait pas pourquoi il n’avait pas lui-même essayé de s’en aller, mais il était trop tard maintenant. Il n’allait pas s’enfuir non plus. — Avec combien de personnes est-il sorti depuis que tu le connais ? demanda-til, un léger sourire toujours aux lèvres. — Tu crois que je tiens le compte ? répondit Keenan du tac au tac. Johnson pouffa de rire. — Je comprends, concéda-t-il. J’imagine que je suis seulement jaloux. Keenan resta figé pendant une seconde et il vit Johnson se raidir du coin de l’œil. Il n’avait pas voulu dire ça à voix haute, songea-t-il. — Ouais, les bêtas ont la vie facile, répondit-il avec un ton aussi détendu que possible. — Exact, dit Johnson une seconde plus tard. Sauf en ce qui concerne les super pouvoirs psychiques, ajouta-t-il en lançant un bref sourire à Keenan. Keenan sourit à son tour. Ce qu’ils pouvaient accomplir sur la glace valait beaucoup plus que de pouvoir sortir avec n’importe qui, il pouvait bien avouer que Johnson avait raison sur ce point.
C’ÉTAIT DÉCONCERTANT d’être l’objet d’une attention aussi intense. De plus, elle venait de Johnson, celui qui avait é les cinq derniers mois depuis leur rencontre à soit donner des ordres à Keenan, soit à faire comme s’il n’existait pas, entrecoupé avec quelques séances de sexes incroyables. C’était surréaliste. Aussi troublant que cela puisse paraître, Keenan attendait avec impatience le moment où, sur la glace, Johnson serait autorisé à projeter ses émotions librement autour de lui, quand Keenan n’aurait pas besoin de claquer la porte imaginaire de son esprit. Cela lui semblait naturel, ce qui était le cas, supposaitil, puisque c’était ainsi que les alphas et les omégas étaient censés interagir. Sur la glace, il n’y avait aucune question, aucune hésitation ou confusion, tout était facile et sans obstacle. Sur la glace, Johnson ne manquait rien et même si Keenan n’avait pas les mêmes capacités avec leur union, le nouveau sens du franc-jeu de Johnson faisait en sorte qu’il en laissait plus paraître que jamais auparavant. Maintenant, Keenan ressentait la bouffée d’émotion intense que Johnson dégageait après un but, mais aussi à chaque petit jeu payant et même quand c’était ceux de Thomas ou de Keenan, surtout quand c’était grâce à l’assistance de Johnson, mais souvent seulement pour leur simple beauté. Parfois, cela donnait l’impression que quitter la glace était comme laisser le véritable Johnson derrière, comme si, sans leur union, il était littéralement coupé en deux, hors de portée de Keenan. Mais Johnson avait dit non et, quand il y pensait rationnellement, Keenan savait qu’il lui avait rendu un service. Il ne pouvait pas parier tout son futur sur des hormones lui disant qu’il aimait un autre homme, son coéquipier qui plus est. C’était beaucoup trop de risque pour peu de récompenses. Peu importe ce que son entrejambe en disait, il était trop intelligent pour se faire avoir.
Chapitre 39 : Cartwright
Parler était difficile . Carry n’avait jamais été très sociable, mais il n’avait jamais ressenti quelque chose d’aussi fort que ce qu’il vivait avec Avali. Être entouré d’un alpha avec qui il était hautement compatible l’avait distrait du fait qu’il était si facile à comprendre. Depuis des mois, il s’était tellement concentré sur le contrôle qu’Avali pouvait exercer sur lui, sur son attirance pour lui et sur les conséquences sur sa propre libido qu’il avait ignoré son aptitude à répondre aux sentiments d’Avali. Mais maintenant, il l’avait bien remarqué. C’était impossible de ne pas le voir. Maintenant, si Carry voulait savoir ce qui se ait dans l’esprit d’Avali, il devait écouter. Et ce n’était pas qu’il voulait savoir — il pensait être capable de renoncer à ça — mais c’était plutôt qu’il en avait besoin s’ils voulaient garder une chance de jouer ensemble sans leur union. Et, encore une fois, ils en avaient besoin. S’ils continuaient à exploiter leur union, même si ce n’était que sur la glace, Carry allait tomber dans ses chaleurs et probablement finir avec la queue d’Avali en lui à nouveau. Cette image le fit frémir alors qu’il fut inévitablement tiré de ses pensées pour le ressentir. Mais ce n’était pas le sexe qui lui manquait. Ou, en tout cas, pas seulement le sexe. Il s’ennuyait de la facilité qu’il avait à être près d’Avali, à quel point... ses émotions étaient accessibles. Il n’avait jamais vraiment aimé Avali auparavant, mais il avait été en mesure de savoir quoi dire et quoi faire avec une certitude qu’il avait rarement rencontrée dans le é. Il tenta de ne pas penser à Puccio et à comment il avait été à l’aise avec lui également. Avali avait toujours fait ressortir en lui un lot d’émotions contradictoires, trop pour que ce soit facile, mais ça avait été difficile parce que Carry n’avait pas été capable de décider s’il voulait coucher avec lui, l’étrangler ou le pousser pour qu’il exécute un jeu que Carry avait en tête. La vraie bataille se jouait dans l’esprit de Carry. Mais maintenant, il avait l’impression qu’il parlait à travers un téléphone cassé, seule la moitié de ses mots étaient intelligibles. Encore pire, la moitié de ces mots semblaient provenir d’une langue étrangère qu’il ne connaissait pas, parce que, sans l’écho des émotions d’Avali, il n’arrivait pas à comprendre ses expressions faciales. Non pas qu’il se sentait prêt à le regarder en face. Il ne pouvait toujours pas totalement se remettre de ce qu’Avali avait dit, sur la manière dont il s’était entiché de lui. Mais tout de même, quand il réussissait à le regarder, c’était tellement étrange de
ne pas ressentir l’émotion derrière son sourire qu’il ne pouvait pas comprendre avec seulement ses expressions s’il le taquinait ou s’il était content. En fait, il pouvait voir la différence jusqu’à un certain point, mais il ne pouvait jamais en être complètement certain et savoir qu’il y avait une manière d’en être sûr et qu’il n’avait pas le droit de l’utiliser le rendait fou. Mais les bêtas s’en sortaient sans, n’est-ce pas ? Alors, il fit davantage d’efforts, il écouta même quand Avali ne lui parlait pas et il posait des questions sans rapport avec le hockey et cela aida, comme tout ce qui est fait de manière constante et régulière. Un peu comme des béquilles aidaient une jambe brisée, mais au moins il progressait. Ils aient techniquement autant de temps qu’avant à utiliser leur union, mais il semblait que la nouvelle capacité d’Avali à bloquer sa présence mentale le reste du temps faisait la différence dans l’esprit ou le corps de Carry parce qu’il n’avait pas eu ses chaleurs au cours des deux derniers mois. Cela aurait dû être une bonne chose, mais à la place il se masturbait tellement souvent qu’il avait peur de s’en fouler le poignet et il était dans un état de frustration constant qui le faisait se demander si l’agence envoyait quelqu’un même s’il n’avait pas ses chaleurs. Il se demandait s’il y avait un genre de règlement à ce sujet. Est-ce que payer pour du sexe était correct seulement quand les pulsions sexuelles étaient suffisamment intenses pour nous mener à l’hôpital si rien n’était fait, mais ce n’était pas acceptable quand on avait de simples besoins sexuels ? Il ne pensait pas que cela ferait une différence pour les alphas qui travaillaient pour l’agence. Après tout, du sexe sans chaleurs avec un oméga devait tout de même être bien pour eux et ils seraient quand même payés. Mais cela semblait un peu trop, un peu... triste. Il ne voulait pas de relations amoureuses, certes, mais cela ne voulait pas dire qu’il ne pouvait pas se trouver quelqu’un pour la nuit. Il était assez confiant de son aptitude à camoufler son odeur, mais pas suffisamment pour parier sa carrière sur elle ou il ne se serait jamais fourré dans ce genre de pétrin. Mais les bêtas ne pouvaient rien sentir d’une manière ou d’une autre et rendu où il en était avec les rumeurs sur Avali et lui, ce serait même peut-être une bonne chose qu’il soit pris en flagrant délit avec un bêta dans un bar. Certaines personnes n’aimaient pas quand les omégas se permettaient ce genre de choses, même avec les bêtas, mais ils avaient tendance à considérer cela des folies de jeunesse.
L’article qu’il avait lu en diagonale quelques jours plus tôt avait répété les mêmes suggestions ennuyantes, lançant subtilement des hypothèses sur leur « alchimie » incroyable qui rendait leur trio aussi instable, merveilleux un jour et désordonné le suivant sans raison apparente. Apparemment, ils avaient réussi à oublier que les Flammes avaient gagné leurs cinq derniers matchs en grande partie grâce au travail de leur trio. La seule nouvelle chose dans l’article était la blague sur leur nom de couple qui sonnerait vraiment bizarrement. Carry avait été dans des bars pour bêtas dans le é, quand les Titans l’avaient laissé tomber. Mais il avait essayé de noyer sa peine dans l’alcool et il n’avait assurément pas été dans une humeur propice après ce que le sexe lui avait déjà coûté... Puccio, se remit-il en tête, pas le sexe. Mais cela n’avait rien changé. Il était au courant que toute la propagande sur les omégas vierges était des conneries, mais à quel moment un mensonge cessait d’en être un si tout le monde y croyait ? C’était la leçon à retenir dans la moitié des contes de fées, non ? Dans tous les cas, la raison principale pour laquelle il n’avait jamais été tenté était qu’il n’avait jamais rencontré un bêta qui l’attirait auparavant. Mais la main de quelqu’un d’autre pouvait sûrement aider et une queue était une queue même si elle avait besoin de lubrifiant pour entrer. Ça valait le coup, ne serait-ce que pour sortir de son appartement.
LE CLUB ÉTAIT TROP sombre pour qu’il ne voie plus que des silhouettes, mais Carry estima qu’il pourrait s’en servir pour se guider et avoir une meilleure idée en s’approchant. Il y avait quelques alphas, mais aucun d’entre eux ne faisait quoi que ce soit pour cacher leur odeur et même dans cette masse transpirante de déodorant et de parfum, ils étaient faciles à éviter et ils avaient peu de chance de trouver Carry dans la foule de danseurs même s’ils le sentaient malgré ses boucliers mentaux. Il posa son attention sur un homme grand, aux épaules larges, qui semblait assez baraqué pour jouer en défense, mais après une inspection de plus près, pas suffisamment musclé pour être un sportif professionnel. Il n’attendit pas une seconde de plus : il se dirigea vers ce groupe et, en ant le doigt dans sa ceinture, le tira vers lui pour avoir son attention. Les yeux de l’inconnu étaient verts et écarquillés quand il se tourna pour trouver Carry près de lui. Pas si mal, les lèvres un peu minces et un visage commun, mais ses yeux étaient ravissants et il semblait suffisamment impressionné par Carry pour attiser son ego. Carry sourit, sachant parfaitement de quoi il avait l’air : environ deux têtes de moins et semblant petit sous son chandail trop grand malgré la musculature que son haut vert révélait en dessous. « Un verre ? » proposa-t-il d’un geste, puisqu’il y avait trop de bruits pour parler, et sa question fut répondue avant même d’être posé. Mais il ne put jamais l’acheter, parce que moins de dix minutes plus tard, on le poussait dans un recoin à moitié caché et on lui examinait les amygdales. Et c’était bon. Complètement différent de ses chaleurs, il ne se sentait pas malade de désir, à la place il se sentait légèrement gêné d’être pressé contre un parfait inconnu d’une manière aussi intime, mais en même temps il en était ravi. C’était ce dont les gens parlaient quand ils discutaient de sexe, la lente montée qui l’amenait à vouloir s’enfoncer jusqu’à ce qu’il vienne. Il ne ressentait aucun désir d’être pénétré. Non, ce qu’il voulait c’était d’être sucé, décida-t-il impulsivement. Son nouveau compagnon était heureux de le faire, ses larges épaules camouflant le bas du corps de Carry de la vue de tous, ou en tout cas, suffisamment pour que personne ne se plaigne. Ou peut-être qu’ils ne se plaignaient pas parce qu’ils les regardaient. L’idée qu’il puisse faire ce genre de chose en public, qu’il pouvait risquer de se faire voir et que personne ne lui en
tiendrait rigueur, que personne n’en ferait de cas... C’était presque aussi libérateur que de choisir de faire l’amour sans raison, sur un coup de tête et non à cause d’un désir insatiable. Il ne pouvait rien entendre par-dessus le martèlement de la musique en arrièreplan et, même s’il détestait les conventions sociales l’entourant, les pulsions physiques de Carry avaient toujours suivi le modèle biologique oméga. Mais il n’avait pas ses chaleurs maintenant et il semblait... Il resserra sa prise dans les cheveux du bêta et fut avalé plus profondément en retour, ce qui le poussa à donner des coups de reins dans la chaleur humide de la gorge de l’autre homme suffisamment fort pour qu’il lui gémisse une excuse. Au lieu de s’écarter, l’autre homme ne fit que lever ses yeux aux larges pupilles dilatées vers les siens. Puis, ses mains se posaient sur son derrière pour le pousser vers lui. Carry haleta, ses orteils se recroquevillant en un effort pour se retenir, mais le message était limpide : le bêta ne voulait pas qu’il hésite. Il voulait que Carry lui défonce la gorge. Alors, il le fit, faisant des va-et-vient puissants et rapides en gardant un œil sur son visage au début, puis en fermant ses yeux et en agrippant les cheveux de l’autre homme pensant qu’il prenait tout ce qu’il lui donnait avec un abandon absolu, sans contrôle ou faux-semblants. Le rythme n’était pas loin de celui pour baiser, mais être de l’autre côté, donner au lieu de demander... Il explosa longuement et profondément pour ce qui sembla être un long moment et il sentit la gorge du bêta se resserrer autour de lui. Dès qu’il parvint à relâcher sa prise, une langue s’approcha pour le lécher jusqu’à ce qu’il soit propre et cela le fit frissonner : trop sensible pour être touché, mais trop excité pour se dégager. L’homme lui remonta son pantalon et Carry le tira dans les toilettes pour lui rendre la pareille en le branlant et en le caressant. C’était presque étrange de s’occuper du plaisir de quelqu’un d’autre quand il n’était lui-même pas excité, mais il aimait les baisers et il adorait sans aucun doute le sentiment qu’il ressentait quand il arrêtait pour ajuster son poignet et que son partenaire le suppliait de recommencer.
Chapitre 40 : Keenan
La rousse dans le coin ne cessait de regarder dans sa direction, mais Keenan n’était pas certain qu’elle l’observait lui avant que leurs yeux ne se rencontrent à travers la pièce et qu’elle se lèche les lèvres sans détourner le regard. Après cela, il n’eut qu’à lui sourire et accepter le verre qu’elle lui offrait. Ils finirent par s’embrasser dans le coin sombre de la pièce, puis elle le ramena chez elle et le fit la baiser contre son canapé, incapable d’attendre assez longtemps pour arriver dans la chambre. C’était excitant, elle était ravissante et son cul était une merveille qu’il soupçonnait venir d’un entraînement rigoureux. Il faillit faire un commentaire à ce sujet, mais il ne la connaissait pas et certaines personnes aimaient faire semblant que leur corps était naturel plutôt que d’ettre qu’elles faisaient un effort pour se rendre attirantes. Ils se rendirent dans le lit pour la deuxième fois et Keenan dut lui enlever son soutien-gorge et tenir sa poitrine dans ses mains pendant qu’il s’enfonçait dans sa chatte étroite et brûlante. C’était sa position préférée et empoigner ses cheveux aidait également. Amusant, mais pas vraiment exceptionnel. Ce fut la même histoire pour les deux autres femmes avec qui il coucha. Cela lui fit se poser des questions sur les hommes, mais il n’en avait tout de même jamais rencontré un qui l’attirait. Il pouvait irer certains traits de manière esthétique, mais c’était tout et peut-être... C’était seulement qu’il ne pouvait pas s’enlever de la tête ce qu’avait été le sexe avec chaleurs et il ne pouvait s’empêcher de se demander si la vie sexuelle de Johnson en dehors de se chaleurs était tout aussi... tranquille. Évidemment, Johnson pouvait coucher avec tous les alphas qu’il voulait. Tout comme Keenan pouvait coucher avec des omégas, réalisa-t-il en se sentant un peu idiot. Johnson était le seul oméga qu’il avait rencontré avec qui il était parfaitement compatible d’accord, mais il y en avait bien d’autres, beaucoup de femmes. Et si Johnson était heureux de coucher sans attaches, pourquoi certains d’entre eux ne pourraient-ils pas ressentir la même chose ? Il pouvait même sortir avec quelqu’un. Il ne pensait pas que même le plus indépendant des omégas serait heureux avec
un compagnon d’union partant pendant de longs week-ends sur la route, mais peut-être que seulement en voir un serait correct. S’il y avait des agences complètes dédiées à trouver des alphas consentants aux omégas sans union, il y en avait sûrement là-dedans qui serait heureux d’avoir un petit-copain à la place tant que ce petit-copain était heureux de ne pas s’unir avant un long moment. Cette révélation lui sembla magique et pendant quelques jours, cette seule idée le maintint à flot pendant ses séances de branlette. Puis, il réalisa qu’il n’avait aucune idée de la façon de rencontrer une oméga de ce genre.
EN FIN DE COMPTE, IL rencontra Amalia de la même manière qu’il rencontrait la plupart des gens avec qui il ne travaillait pas : à une fête de famille. La famille de Keenan était pleine d’entrain, pour rester poli, et le genre de famille qui se faisait dénoncer par les voisins pour bruit excessif, pour être honnête. Cela ne dérangeait pas Keenan, sauf quand la police se présentait et qu’ils devaient tous présenter leurs plus plates excuses et promettre de faire le ménage communautaire pour le prochain mois en guise de compensation. La sœur de Keenan avait invité Amalia à la dernière fête même si c’était Tante Avni qui l’organisait et pas leur mère. Pour eux, cela revenait au même, quand ils étaient enfants et que leur père allait se faire opérer pour une raison quelconque ou que leur mère était déprimée, ils aient des mois à vivre chez leur tante. Il n’y avait pas de véritables liens de sang puisque la mère de Keenan était adoptée, mais les deux sœurs étaient si proches même à l’âge adulte et si semblables que la plupart des gens qui l’apprenaient refusaient d’y croire. Keenan et Tzeera avaient toujours été heureux d’avoir une deuxième maison quand une crise survenait chez leurs parents. Le père de Keenan avait souffert d’une lésion de la moelle épinière quand il était jeune et il utilisait un fauteuil roulant. Il pouvait faire presque tout par lui-même, mais, comme il aimait le dire, il y avait quelques failles dans le système. Les problèmes de sa mère étaient surtout dans sa tête, mais quand elle avait un problème, c’était bien plus difficile de comprendre ce qui avait mis à mal son équilibre. Et que leurs amis ne se contentent pas de les accueillir à leur retour, mais leur offrent toute l’aide possible pour les aider à traverser cette période difficile témoignait du charisme de ses parents. Leurs problèmes ne disparaîtraient jamais complètement, mais les personnes qui les épaulaient non plus. Et leur couple demeurait fort. Aux yeux de Keenan, cela semblait valoir la peine, même quand il était un enfant qui rêvait d’avoir la même chose, une personne qui ne partirait jamais. Les bêtas se moquaient toujours de ce genre d’union magique entre un alpha et un oméga, ils insistaient même sur le fait que les études portant sur les enfants nés de couples unis qui seraient plus heureux que les autres étaient biaisées, ou
mal faites, ou juste des conneries. Mais Keenan n’avait pas besoin de preuve scientifique pour le croire : il l’avait observé toute sa jeunesse. Puis, il avait vu Amalia entourée de sa famille, sa peau chocolat un peu plus foncée que la plupart des gens dans la pièce et ses yeux lumineux alors qu’elle regardait autour d’elle avec une certaine inquiétude. Keenan pouvait la comprendre, sans avoir vu sa famille depuis un certain temps, même lui trouvait que le volume sonore des conversations atteignait un seuil inquiétant. Il savait qu’elle était un oméga même à travers la pièce, l’air était lourd de son parfum de fleurs exotiques. De la cardamome, songea-t-il, et cela ne pouvait qu’être logique que son cerveau tente de lui dire que cette femme était comme de la famille en insistant pour lui donner un parfum de biscuits faits maison. Il ne pouvait pas l’approcher directement : cela aurait été acceptable dans un bar tant qu’il gardait une distance raisonnable entre eux, mais ils étaient dans un espace familial et elle était là en tant qu’invitée, pas pour rencontrer des étrangers. Mais Tzeera n’avait pas été assez cruelle pour la laisser seule dans cette foule et Keenan avait à peine pu voir sa sœur dernièrement, alors il devait bien aller la saluer. Elle se tourna pour le serrer dans ses bras, le tenant fort contre elle pendant un instant. Elle était allée étudier à Toulouse pendant un certain temps et, cette année, Keenan avait été dans le coin seulement une fois, en plein milieu de sa session d’examen. Elle se tourna vers son amie et pointa Keenan avec un air tellement supérieur qu’elle semblait presque vouloir l’écarter sèchement, mais elle souriait toujours. — Voici mon frère, Keenan, le grand joueur de hockey. La jeune femme sourit, premièrement devant le manège de Tzeera, puis à Keenan lui-même. — Enchantée de te rencontrer, dit-elle en lui offrant sa main, ce qui respectait parfaitement le protocole des alphas et des omégas, évidemment. Elle était habillée d’une manière qui criait le professionnalisme et, dans ce contexte, les omégas avaient pris l’habitude de serrer les mains et de rester détendus pour combattre les préjugés selon lesquels elles devraient rester dans la cuisine. Keenan lui serra la main pendant qu’elle terminait de se présenter, son accent français ressortant davantage.
— Amalia Collier. — Enchanté également, l’assura Keenan en lui souriant. Pendant ce bref peau contre peau, il ressentit ce que son nez savait déjà : ils étaient compatibles. Jusqu’à un certain point, en tout cas. Le sourire qu’elle lui envoya en retour, les yeux dans les yeux, lui fit comprendre qu’elle était au courant et qu’elle n’était certainement pas déçue.
IL AVAIT EU BEAUCOUP d’espoir, mais n’avait pas pensé se retrouver à voir sérieusement Amalia seulement quelques semaines plus tard. Mais elle n’était pas le genre de personne à attendre qu’on lui demande quelque chose. Elle était avocate au cabinet où Tzeera faisait son stage et elle avait décidé de er du bureau de Toulouse à celui de Londres pour voir un peu plus le monde, bien qu’elle ît sans problème qu’elle travaillait tellement qu’elle allait sûrement voir le monde seulement depuis la fenêtre de son bureau. Keenan pouvait certainement comprendre ce genre de dévouement et ce que cela impliquait pour sa vie sociale en retour. Avant même qu’il n’en prenne conscience, ils commencèrent à se rapprocher en parlant des gens qui ne comprenaient tout simplement pas et qui se frustraient devant leur manque de disponibilité. Après leur deuxième rencard, elle s’était rapprochée de lui à sa porte et l’avait embrassé. Il l’avait tout de suite embrassé en retour, sans l’hésitation qu’il aurait ressentie quelques mois auparavant. Malgré tout, Johnson lui avait appris à vivre dans l’instant présent. Sans s’en rendre compte, ils s’étaient embrassés langoureusement, sa menue poitrine pressée contre son torse et ses mains agrippant le col de sa chemise pour l’attirer plus près. Elle s’était reculée, la respiration saccadée, et l’avait observé avec un regard nouveau. — Parfait, avait-elle déclaré. Maintenant que c’est fait... Keenan avait éclaté de rire. — C’est quand vous voulez, maître Collier. Elle avait levé les yeux au ciel, mais son regard brillait d’amusement, coloré de miel et absorbant toute la lumière de la pièce. Elle travaillait ardemment et aimait parler de sa carrière même quand elle n’était pas au bureau. Cela ne dérangeait pas Keenan, il aimait également le faire, et si elle était prête à l’écouter parler de mêlées sur la glace, il pouvait très bien s’asseoir et poser des questions sur le fonctionnement de ses cas. Keenan avait rarement rencontré quelqu’un qui l’avait compris aussi rapidement, pas même sa sœur. Il était proche d’elle et elle prenait toujours du temps pour voir ses amis, même si ce n’était que pour une trentaine de minutes avant un
examen ou son boulot. En dehors du travail, Keenan, lui, ne prenait du temps que pour voir sa famille. Il adorait les membres de sa famille et ce n’était pas une corvée de les voir, mais il le faisait au moins autant parce qu’ils le lui demandaient. La plupart du temps, il voulait jouer ou préparer des stratégies. Il n’avait aucunement besoin d’un e-temps et n’avait aucun ami en dehors de l’équipe. Tzeera était grandement amusé d’avoir présenté Keenan à sa petite-amie et ne ratait pas une occasion de lui rappeler sa « dette ». Mais un peu de taquinerie fraternelle n’était pas bien cher payé. Le sexe avec Amalia n’était pas du sexe de chaleurs, mais c’était certainement mieux que ses coups d’un soir. Cela s’expliquait en partie parce qu’elle était importante aux yeux de Keenan et qu’il préférait être avec quelqu’un qu’il aimait autant au lit qu’en dehors, et ce, malgré la réputation qui l’avait suivi quand il était plus jeune. C’était une autre raison pour laquelle sortir avec Johnson avait été une mauvaise idée. Et cela s’expliquait aussi parce qu’elle était une oméga et qu’ils étaient compatibles. Elle avait sorti un condom la première fois qu’ils avaient couché ensemble et quand Keenan était demeuré hésitant, elle avait soupiré et expliqué : — J’ai aussi une puce. — Oh, d’accord, très bien. Je veux dire... Elle avait levé la main pour la poser contre ses lèvres en secouant la tête. — Tu as le droit de savoir. Il avait hoché la tête, ses doigts l’empêchant toujours de parler, et quand elle n’avait toujours pas bougé, il lui avait léché la paume de sa main. Cela l’avait fait tellement rire que le sexe avait été légèrement décalé au profit d’une bataille de chatouilles, mais il ne pouvait pas dire qu’une petite séance de lutte collante comme préliminaires le dérangeait. Elle avait dit qu’il avait le droit de connaître ses contraceptifs et il pouvait comprendre cela. Mais il n’avait posé aucune question sur ses chaleurs, même si cela l’affectait s’il était avec elle quand cela arriverait. Elle n’avait toujours pas soufflé un mot sur le sujet. Et que se erait-il s’il n’était pas là ? Est-ce que le
fait qu’Amalia couchait avec des alphas — et il ne faisait aucune illusion sur le fait qu’il avait été le premier — signifiait qu’elle couchait avec des alphas pendant ses chaleurs ? Ou était-ce seulement le sexe en chaleurs qui rendait les prochaines plus intenses ? Il avait essayé de lire sur le sujet quand il avait voulu aider Johnson, mais il semblait y avoir tellement de théories sur les omégas, dont tellement peu étaient prouvées. Il pouvait attendre qu’elle lui en parle. Il pouvait lui faire confiance et, qui sait ? Peut-être ne serait-il plus dans les parages ou elle était peut-être une de ces omégas qui n’avaient pas de chaleurs. Les femmes omégas pouvaient même avoir des enfants sans ces dernières et beaucoup d’entre elles disaient que leurs chaleurs n’étaient que vestigiales, un peu comme les appendices, un souvenir du temps où la mortalité enfantine obligeait chaque oméga à avoir autant d’enfants qu’ils le pouvaient pour transmettre leurs gènes et faire augmenter la population.
Chapitre 41 : Cartwright
Coucher avec des bêtas était mieux que de ne coucher avec personne, mais c’était un peu comme manger de la nourriture sans sel. Cela permettait de combler la faim et c’était à peu près tout ce qu’on pouvait en dire. Mais cela faisait vraiment le travail et Carry n’avait-il pas toujours souhaité une vie sans les pulsions de ses chaleurs ? Et puis quoi si sa vie en dehors de la glace lui semblait un peu... terne ? Sa vie n’avait pas à être constamment excitante, une situation de vie ou de mort à s’en tirer les cheveux avant de tout risquer. Le hockey servait à cela : un jeu où il pouvait exercer tout son besoin d’aventures palpitantes grâce à des compétences qu’il avait perfectionnées pendant des années de pratique et où le pire qu’il pouvait subir était une commotion cérébrale ou un bras cassé. Et c’était magnifique, également, quelque chose de magnifique que Carry pouvait faire et qui n’avait rien à voir avec ce pour quoi il était fait. C’était son propre choix, son propre dur travail et c’était son propre mérite. Il se fichait bien de ce que disaient les journalistes, ce n’étaient pas les hormones de Carry qui marquaient pour lui et tous ceux qui comptaient le savaient parfaitement. Et sur la glace, Avali était un excellent partenaire et il n’y avait aucune raison pour que Carry ne se réjouisse pas de sa présence et de son talent. C’était bien d’irer ses es et ses muscles quand il patinait, quand ils faisaient ensemble ce qu’il fallait pour gagner. Il pouvait même ettre que cela serait particulièrement satisfaisant de vaincre les Titans avec Avali près de lui, un alpha qui s’était rangé de son côté, qui le soutenait à cent pour cent et qui ne trahirait pas sa confiance. Le sexe lui manquait et l’intimité créée par l’union quand ils échangeaient en dehors de la patinoire aussi, mais ce qu’ils arrivaient à accomplir sans hormones était presque meilleur. Carry et Avali avaient formé un partenariat, sinon une véritable amitié, basé sur leur amour mutuel du jeu, et coucher ensemble n’avait pas créé cette connexion et cela ne l’avait pas non plus détruite. Ils avaient deux matchs devant eux et s’ils gagnaient l’un d’entre eux, ils allaient en demi-finales. La première équipe qu’ils affrontaient était les Orques et ils venaient jouer chez les Flammes. Et vu la manière dont Avali, Thomas et lui-même jouaient à présent, cela
semblait déjà dans la poche. Mais dans les jours suivants, Thomas attrapa un mauvais rhume — pas suffisamment sérieux pour l’empêcher de jouer, mais assez pour le ralentir considérablement — et puis, le jour précédant le match, son état empira. — Il a une pneumonie, soupira Coach Hernandez. — Quoi ? s’emporta Carry. C’est impossible, il allait bien. Avali était assis à côté de lui sur le banc à la place de Thomas, donc personne ne posait la main sur son bras pour le calmer et Carry avait l’impression que sa peau vibrait de colère. Comment avait-il pu rater ça ? Ils travaillaient ensemble tous les jours ! — Il m’avait semblé seulement un peu fatigué, dit Sven qui était juste à côté de leur entraîneur, ignorant son emportement. Mais c’était visiblement plus sérieux que ce qu’on pensait. — Est-il à l’hôpital ? demanda Santiago. Ils semblaient tous déprimés, comme s’ils venaient de perdre l’énergie qui les habitait depuis un mois. — Oui, leur répondit leur entraîneur. Il est dans un état stable, ce n’est rien de grave. Mais il n’est pas là. Il regarda dans la direction d’Avali et Carry avant d’ajouter : — Je veux que vous jouiez avec Diego pendant un moment pour vous entraîner. Nous allons devoir faire avec pour aujourd’hui. Ils n’y arrivèrent pas. Ce n’était pas tant que Tyler n’était pas au courant de leur union, ce qui les forçait à ralentir et à lui expliquer beaucoup plus que ce qu’ils faisaient avec Thomas parce qu’il ne savait pas qu’ils pouvaient lui dire ce que l’autre ferait, mais c’était surtout parce que cela semblait faux. Tous leurs jeux étaient prévus en fonction d’un joueur qui patinait plus lentement avec une portée plus longue et ils ne savaient pas comment utiliser les compétences de Tyler à part d’une manière très basique que tout le monde connaissait à force de jouer dans la même équipe. Bauer aurait été un meilleur choix, puisqu’il avait été dans le même trio qu’Avali pendant au moins deux saisons, mais Carry
comprenait pourquoi leur entraîneur avait voulu garder le meilleur joueur du deuxième trio en état. Le trio de Patel commença le match et marqua une première fois avant d’être changé. Mais à partir du moment où Avali et Carry posèrent leurs patins sur la glace, tout s’écroula. Ils étaient complètement ouverts l’un à l’autre pour essayer de compenser l’absence de leur ailier droit, mais au lieu de les aider, cela les rendit trop conscients de l’autre en excluant les autres joueurs. Cinq minutes plus tard, Carry fonça dans un défenseur et chuta. Il ne se blessa pas, mais cela contribua au mauvais sentiment général, celui qu’ils étaient incapables d’unir leur force. Les Orques virent cette ouverture et en profitèrent sans merci. Trente secondes plus tard, les lumières du but s’allumèrent de pourpre, encore une fois derrière eux. Carry n’abandonna pas, ni à cet instant ni quand les Orques marquèrent deux fois de suite : la première fois en contournant Carry et la deuxième en utilisant une tactique pour déboussoler Avali que Thomas aurait pu arrêter par la droite s’il avait été là. Pour aggraver les choses, les défenseurs recrus étaient derrière eux, parce que Schvills et Molière avaient joué pendant presque trente minutes de fil pour compenser que Patel ait son gardien substitut sur sa droite plutôt qu’un centre. Binker avait lui-même bien commencé le match, mais il n’était pas habitué à jouer pendant trois périodes, encore moins quand son équipe laissait er les joueurs adverses aussi souvent. Il n’abandonnait pas, mais il sentait la rouille et la fatigue. Cela aurait été mieux si Carry avait été capable de l’accepter, moins douloureux en tout cas, de l’avouer plutôt que de sentir chaque seconde s’écouler inexorablement sans perdre le maigre espoir de victoire. Parfois, une fois que c’était fini, il aurait aimé être capable de lâcher prise. Ils venaient de perdre leur place assurée en demi-finale. Maintenant c’était vraiment hors de leur portée. Avec une collection de légères ecchymoses comme cerise sur ce désagréable gâteau, la majorité de l’équipe voulait sortir pour oublier, soit par l’alcool ou autre, mais Carry serra les dents et lança un regard à Avali accompagné d’une
légère vague d’émotion pour attirer son attention. — Nous devrions aller voir Thomas, dit-il à son centre quand il s’approcha. Il doit mourir d’ennui en ce moment. Avali sourit d’un air las, mais accepta volontiers. C’était seulement le début de l’après-midi et ils s’arrêtèrent pour prendre un thé Chai à Thomas et quelques sucreries, comme c’était peu probable que l’hôpital lui permette de combler sa gourmandise. Ils le trouvèrent dans une chambre normale, dans une sorte de cabine qui le cachait de la vue de ses voisins, mais qui le gardait immédiatement visible depuis la porte sauf s’il fermait son rideau. Le nombre de patients dans la salle semblait indiquer que les médecins le gardaient à l’œil, mais qu’ils n’étaient pas particulièrement inquiets. Malgré cela, il avait l’air plutôt mal : de larges cernes ornaient son visage et sa peau était rouge et couverte de sueur à certains endroits malgré la température parfaitement agréable. Il semblait aussi complètement surpris. — Les gars ! Je suis tellement désolé ! dit-il beaucoup trop fort dès qu’il les vit. Carry jeta un coup d’œil à Avali pour voir s’il comprenait ce qu’il voulait dire, mais Avali avait l’air tout aussi perplexe que lui alors qu’il se faufilait pour redre le bord du lit de son coéquipier. — Désolé pour quoi ? demanda-t-il à Thomas. — Euh, d’avoir manqué le match ? expliqua Thomas en déglutissant au milieu de sa phrase. Il ne semblait pas remarquer que s’il avait de la difficulté à respirer assis sur son lit, il ne serait certainement pas en mesure de participer à un match hautement physique de hockey. — Mon vieux, dit Avali. Tu. Es. Malade. — Je sais, mais quand même. Nous aurions pu... Avali ouvrit la bouche, sûrement pour continuer à argumenter, mais Carry ne
voulait pas s’engager dans cette voie, alors il s’avança. — Regarde, nous t’avons pris un Chai, dit-il avant de se tourner vers Avali. Donne-lui les bonbons. Cela détourna facilement l’attention de Thomas. — Des bonbons ? répéta-t-il avec espoir, comme un enfant incapable de s’acheter ses propres friandises. Avali éclata de rire et ne se gêna pas pour lui dire. — Mais les friandises gratuites ont meilleur goût ! expliqua-t-il en gloussant de rire avant de commencer à tousser. — Oh, c’est... Je crois que nous devrions arrêter de parler de choses aussi excitantes que de bonbons ou tu vas avoir de vrais problèmes, décida Carry en reculant d’un pas pour laisser de l’espace à Thomas maintenant recroquevillé sur son lit et haletant comme s’il venait de courir un marathon. Je les laisse sur ta table de chevet, ça devrait être bon pour ta gorge si tu les suçotes. Il aurait voulu aider davantage, devraient-ils aller chercher une infirmière ? Thomas tenta de protester, mais finit par avoir besoin d’Avali pour boire un peu de son thé. Après cela, il perdit de son enthousiasme et accepta le livre qui était sur sa table et commença à regarder les pages en diagonales. Carry ne savait pas s’il lisait vraiment ou s’il ne faisait que regarder les images, mais dans tous les cas cela le garderait occupé tout en reposant ses poumons. — Au revoir, T, lui lança Avali en se tournant vers la porte. Carry dut se précipiter pour le rattraper. — Attends ! lui cria-t-il. Avali ralentit en se tournant vers lui, mais ne s’arrêta pas. — Désolé, je déteste l’odeur de ces endroits, expliqua-t-il en grimaçant. Mes parents sont souvent malades.
Confus par cette soudaine confession intime, Carry cligna lentement des yeux. — Ah oui ? — Oui, mon père utilise un fauteuil roulant, il a eu un accident quand il était jeune, alors c’est..., hésita-t-il avant de hausser les épaules. Parfois un problème. — Oh, alors vous n’avez jamais fait de sport ensemble ? — Jouer ensemble, tu veux dire ? Avali semblait toujours aussi angoissé, alors Carry commença à marcher plus rapidement pour lui permettre de suivre son rythme jusqu’à ce qu’ils quittent le pavillon, descendent les escaliers, traversent le corridor fluorescent et atteignent enfin le vestibule de l’hôpital. — Pas vraiment, continua à expliquer Avali, il aime la natation et les choses tranquilles dans ce genre-là. — Et ta mère ? — Elle est... Elle est fière et tout, mais ce n’est pas parce que c’est du hockey. Elle ne comprend pas ça. Pour elle, c’est bien parce que j’ai du succès et ça veut dire qu’elle peut en parler à ses amis et ses sœurs autant qu’elle le veut. Et parce que ça me rend heureux. Surtout parce que ça me rend heureux, ajouta-t-il avec un léger sourire qui fit courber ses lèvres généreuses. Carry éclata de rire. — Et pour subtilement laisser entendre qu’elle a le meilleur fils et tout ? suggéra-t-il. Mon père fait la même chose avec ma sœur, elle est dans les œuvres de bienfaisance et tout le monde la trouve ravissante. Le regard d’Avali resta un peu trop longtemps sur son visage. Pour une fois, Carry fit semblant de ne pas comprendre ce que cela voulait dire. — Ils doivent être fiers de toi aussi, pas vrai ? Carry haussa les épaules. Ils n’avaient jamais rien entendu de la sorte auparavant.
— J’imagine que oui, enfin, la paie est bonne, alors... — Non, je veux dire, tu as foncé pour y arriver et maintenant tu es au sommet de ta carrière de joueur de hockey. — C’est ainsi qu’on appelle les Flammes maintenant ? plaisanta Carry, mais Avali n’était pas prêt à le laisser filer, il avait ralenti et s’était même arrêté, les sourcils froncés. — Est-ce que c’est parce que tu as été échangé ? demanda-t-il d’un ton incertain en lançant des regards au bout du couloir. Parce que beaucoup de grands joueurs ont souvent été échangés, cela ne veut pas dire... Je ne sais pas, que tu es mauvais ou quoi que ce soit. Tu le sais, n’est-ce pas ? Carry essaya de faire comme si ce n’était rien. — Oh, je pourrais gagner tous les matchs et tous les prix de meilleur joueur, cela ne ferait aucune différence pour eux : ils ne comprennent tout simplement pas. Ils avaient finalement atteint la porte de sortie et quand elle se referma derrière eux, Avali soupira de soulagement. Il n’avait probablement pas fait exprès de laisser tomber ses boucliers mentaux et Carry ne dit rien à propos de l’odeur soudaine de sable qui monta entre eux. À ce moment, Avali s’arrêta et se tourna vers lui pour la première fois depuis qu’ils avaient quitté la chambre de Thomas. — Ça craint, avoua-t-il gentiment, mais au moins tu nous as maintenant.
Quatrième épisode : Chaleur
Chapitre 42 : Keenan
Le restaurant où ils allèrent pour parler de stratégies — à l’initiative de Johnson, mais les pensées de Keenan se remplissaient déjà d’idées — était beaucoup trop chic pour eux. Mais après avoir demandé au serveur d’enlever les chandelles sur la table et de leur apporter des bouchées à partager, cela ne comptait plus vraiment. — Avali, tu ne peux pas vraiment penser que ça fonctionnerait, râla Johnson avant de redresser les épaules et de prendre une mine renfrognée comme si c’était une bagarre. — Écoute, appelle-moi Keenan, dit-il à Johnson. C’est vraiment bizarre que tu ne le fasses pas déjà, étant donné les circonstances. Johnson plissa les yeux. — Parce que nous... — Sommes des coéquipiers, oui, l’interrompit Keenan. Il ne pouvait peut-être pas sentir le parfum de Johnson en dehors de la glace, mais il connaissait très bien cette expression tempétueuse maintenant. Il ne lui était même pas venu à l’esprit que Johnson pourrait penser à autre chose. Après tout, ce qu’ils avaient fait dans la chambre n’était rien comparé à ce qu’ils avaient accompli sur la glace. Comment pouvait-il penser que coucher avec quelqu’un était plus intime que de pouvoir inviter quelqu’un dans son esprit ? Ou de sentir l’écho de ses mouvements dans ses propres muscles ? Mais il ne savait pas comment l’expliquer d’une manière que Johnson croirait. — Tu appelles Thomas par son prénom, ce serait plus juste. — Des tas de gens s’appellent par leur nom de famille, insista Johnson. — Oui et ça va quand c’est amical, mais... Je ne sais pas. Tu m’appelles Avali seulement quand tu es en colère, alors je ne peux pas dire que j’ai les meilleurs... sentiments à ce sujet. — D’accord, peu importe, Keenan, répondit Johnson en levant les yeux en prononçant son prénom.
Mais s’il voulait essayer de prouver qu’utiliser un nom différent ne changeait rien, il échouait lamentablement. Quand il disait « Avali », il semblait irrité, alors que maintenant il semblait plus... amusé. — Merci, Cartwright, dit Keenan pour ensuite voir le visage de son ailier gauche s’aigrir. — Carry, le corrigea-t-il automatiquement. Une seconde plus tard, Keenan le vit se figer en réalisant qu’il venait d’inviter Keenan à utiliser son surnom. Pendant un instant, Keenan crut qu’il allait revenir en arrière, mais finalement les épaules de Carry se détendirent et il hocha légèrement la tête. — Donc, nous devrions faire cela à la place, dit-il en poussant son carnet de notes où ils planifiaient leur jeu vers Keenan et en commençant à écrire pardessus.
DEUX JOURS PLUS TARD, Thomas sortit de l’hôpital, mais il était toujours en congé médical obligatoire pour une semaine. Il pourrait peut-être jouer leur prochain match, mais c’était aussi possible que non. La seule chose qu’ils savaient à ce stade était qu’ils ne pouvaient pas se permettre de perdre s’ils voulaient se qualifier pour les demi-finales. Les Vents Violents leur avaient fait une faveur sans s’en rendre compte en perdant leur propre match contre les Goélands Virevoltants, qui étaient suffisamment bas dans le classement pour que leurs points n’affectent pas le rang des Flammes. C’était juste assez de chance pour les garder dans la course malgré leur piètre performance. Si Keenan était déterminé à aller chercher la victoire et que Sven était dévoué, Carry lui était un véritable feu follet. Il ne s’arrêtait pas après les entraînements jusqu’à ce que leur entraîneur se lève et les oblige à quitter la glace et, la plupart du temps, il réussissait à convaincre Keenan de le redre pour parler de stratégie. Avec cinq jours complets avant leur prochain match, la pause tant attendue avant les demi-finales, il cherchait à nouveau l’attention de Keenan. Son visage s’assombrit quand Keenan interrompit sa diatribe sur la nouvelle formation que Coach Sari voulait essayer. — Attends, attends, je ne peux pas aujourd’hui. Sven et moi allons regarder des vidéos de la dernière saison des Renards et prendre note de leurs faiblesses. — Oh, d’accord, alors... Il semblait ne pas trop savoir quoi dire. — Tu pourrais te dre à nous, dit Sven. Il semblait avoir débarqué de nulle part, d’après ce que Keenan pouvait en dire, et si la façon dont Carry s’était crispé était une autre indication, il ne l’avait pas senti arriver non plus. Peut-être commençait-il enfin à se détendre en présence d’alphas. Carry se figea et Keenan put le voir réfléchir, pesant le pour et le contre. Il ne semblait pas beaucoup apprécier Sven, quoique Keenan ne comprenait pas
pourquoi puisque leur capitaine avait été plus que conciliant. Mais il n’avait apparemment aucun problème à er du temps avec Keenan désormais et il avait prouvé encore et encore qu’il était prêt à er quelques désagréments pour le hockey. — Tu es certain que ça ne te dérange pas ? Sven lui sourit. — Si ça me dérange que tu veuilles faire des heures supplémentaires ? le taquina-t-il. — Je me suis dit que c’était peut-être quelque chose que vous faisiez ensemble, dit Carry en haussant les épaules, entre capitaine et adt. — C’est le cas, mais nous pouvons toujours utiliser une autre paire d’yeux aiguisés et tu es bon là-dedans, n’est-ce pas ? Sven observait Carry minutieusement. Carry le regardait en retour, plus surpris et méfiant qu’heureux d’entendre ce compliment, ses yeux se posant sur le visage de Sven avant de se détourner rapidement. Et puis Keenan comprit : Carry était complètement fermé et Sven, contrairement à la plupart de leurs coéquipiers, pouvait le sentir. Sans y penser, Keenan attira l’attention de l’autre alpha sur lui : — Oh, oui il fait ça, c’est bizarre, n’est-ce pas ? Ils se tournèrent tous les deux vers lui, mais pour une fois ce n’était pas Carry qui retenait son attention. Sven fronçait les sourcils. — Tout comme toi, souligna-t-il d’une manière presque neutre, mais pas tout à fait. Et évidemment qu’il l’avait remarqué, ce n’était pas quelque chose que Keenan faisait normalement quand ils étaient seuls, mais il avait pris l’habitude de le faire avec Carry après... Après. Il essayait de ne pas le faire quand il était seulement avec Sven. Ce n’était pas juste, premièrement, et, deuxièmement, il appréciait la possibilité de laisser
tomber ses nouveaux murs psychiques. Juste était le bon mot. — Oui, eh bien, c’est juste. J’aime avoir mon intimité, moi aussi. — Ton intimité ? répéta Sven, incrédule. Veux-tu aussi porter un masque pour qu’on soit incapable de voir ton visage ? — Écoute, s’immisça Carry. Peut-on juste regarder ces vidéos ? Sven se tourna vers lui, hésitant pendant un instant. Carry venait de briser le protocole en interrompant deux alphas et Keenan était presque sûr qu’il n’avait même pas remarqué. Bien sûr que non, il coupait Keenan tout le temps sans jamais lui reprocher. Connaissant Carry, il avait peut-être lui-même décidé qu’il ne le remarquerait pas, parce que c’était injuste et qu’il voulait seulement continuer ainsi. N’importe quel alpha qui avait un problème avec ça pouvait le lui dire directement et Keenan leur souhaitait bonne chance. Mais la plupart des alphas ne se promenaient pas en demandant la soumission des omégas, ils pensaient la mériter sans poser de question et c’était tout. Ils penseraient que Carry manquait de politesse ou était un idiot, pas un révolutionnaire. Après une pause, Sven hocha la tête. — Bien sûr, on te suit Keenan. J’ai de bonnes choses à manger dans la salle de conférence.
AU DÉBUT, KEENAN PENSAIT que tout irait bien. Après tout, Sven était le genre de gars décontracté et Carry, une fois qu’il était détendu, pouvait être amusant. Fissures dans la glace : Épisode 4 Pour obtenir les premiers extraits, les portraits des personnages et pour participer à des concours, rejoignez le groupe Facebook.
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* Tous les livres sont référencés sur mon site . Vous y trouverez une liste actualisée de tous mes livres. Les loups-garous de Windermere :
Les Habitudes Sexuelles des Loup-garous – Devlin est un omega avec des ambitions qui n’ont rien à voir avec les alphas. Quand le destin vient s’en mêler, il n’a pas vraiment d’autre choix. Alpha/Beta/Omega, M/M/M, Mpreg. L'intimité des alphas – Un loup alpha se retrouve face à des responsabilités qu’il ne peut ignorer : trouver un omega, protéger sa meute, ne pas tomber amoureux d’un autre alpha. Les habitudes parentales des loups-garous - La conclusion de la trilogie.
One-Shot :
Une Lumière dans la Tempête - Seuls et piégés par une dangereuse tempête arctique, deux jeunes hommes n'ont d'autre choix que de confronter leurs sentiments l'un pour l'autre. A/B/O. Loups-garous. Isolement. Un lien inaltérable – Lorsque Lia se présente en tant qu’omega, sa meilleure amie lui offre tout ce dont elle a besoin. Mais Lia est amoureuse d’Amira depuis des années, et peu importe ce que son loup veut, son cœur ne peut prendre que ce qu’on lui donne librement. Amis/Amants F/F. L’éveil de l’oméga – L’école est terminée et Cole est prêt à faire une pause avant que sa vie d’adulte commence. Lorsqu’un simple séjour de camping en compagnie de ses deux meilleurs amis se transforme en quelque chose de plus sauvage, sa vie se verra changée à jamais. Alpha/Omega/Alpha, M/M/M.
Omega en mission – Les omegas sont là pour soutenir, ce ne sont pas des combattants, et Gabi est heureux de s’occuper de son alpha. Quand il croise la route d’un animal en danger, ses instincts de protection se réveillent, et personne ne veut se retrouver sur le chemin d’un omega en mission. Alpha/Beta/Omega Le sacrifice de l'omega - Le destin possède les cartes, mais vous pouvez toujours jouer votre main. Lorsqu'un omega est obligé de partir pour épo un alpha étrange, il n'a pas d'autre choix que d'affronter qui il est. Une romance omegaverse avec un mariage arrangé.
La saga Destins Croisés :
Les chaînes du destin - Lorsque son jumeau se présente comme omega, Michuá a l’impression que le monde s’effondre. D’une certaine façon, devenir omega semble être le seul moyen de rester ensemble... Mais le nouvel alpha de Zybyn en veut bien plus que ce qu’ils ont négocié, et lors d’un voyage vers une terre étrangère, rien ne peut l’empêcher de prendre ce qu’il souhaite. Absence de consentement, abus, inceste entre jumeaux, fin heureuse. Éternellement Sien – Quand Shane se présente contre toute attente en tant qu’oméga pendant la pleine lune, son frère jumeau s’avance pour le protéger des autres alphas qui réclament leur droit sur lui... Mais Tim est également un alpha. Hiérarchie alpha/bêta/oméga. M/M. Inceste entre jumeaux. The Realm of the Impossible (only in English) – La reine est morte et Lorax est prêt à prendre la place qui lui revient, lorsqu’une trahison des plus intimes le force à renoncer à son trône sous peine de perdre sa seule et unique famille. Il se retrouve contraint de faire un choix inable ; contempler la nouvelle reine mener son pays vers une guerre qui le conduira à sa perte ou accepter d’ de la seule faiblesse de son ennemi : lui-même. Une dark-romance M/M tabou, une romance royale.
La Destinée de la Meute :
Un omega pour la Meute– Quand Ray se révèle être un omega et non un alpha, sa vie change à jamais. En tant que mâle omega, on attend de lui qu’il s’accouple avec un groupe d’alphas sélectionnés pour bâtir une nouvelle meute. Alpha/Beta/Omega, M/M/M/M/M/M, M/M, Mpreg.
1.1 Plus simple que l’ordinaire - Sergi a décidé d’arrêter de se mentir à luimême, il craque pour un mec depuis longtemps. Mais il semblerait que s’avouer la vérité n’est que la première étape d’un très long chemin à parcourir.
Alpha pour la Meute – Ray n’était pas prêt à devenir un omega, mais il commence à accepter son destin... jusqu’à ce que la meute ait besoin de lui pour plus que ce qu’il n’est prêt à leur offrir. Protecteurs de la Meute – Alec et Gabriel font partie des premiers alpha de Ray et ne sont rien de plus l’un pour l’autre. Mais trois ans auparavant... les choses étaient différentes. Le Bien-aimé de la Meute – Un omega est essentiel pour une meute. Mais un omega reste un homme. Et un homme a besoin d’être aimé. Peut-on offrir son corps sans offrir son cœur ? Betas – Marisa n’a jamais hésité à venir en aide à son frère, même quand il obtient ce qu’elle désire le plus au monde et qu’elle ne pourra jamais obtenir. Mais peut-être que là où se trouve l’amour, il y aura une solution. L’Avorton de la Portée– Un oméga plus âgé qui est prêt à changer le monde et un jeune alpha qui ne croit pas en son propre potentiel. Un amour plus fort que la distance, que l’âge ou les penchants. Hiérarchie alpha/bêta/oméga. Différence d’âge.
Cœurs de papier - Abel n'est pas le genre d'alpha à faire toute une histoire quand son ex se met en couple avec un autre, mais il se sent encore assez seul pour aller voir l'enseignant de sa fille et se plaindre du temps perdu à célébrer la Saint-Valentin. Il ne s'attend pas à trouver autre chose que des coeurs de papier. M/M/ Humain/loup-garou. Douce romance.
Plongés dans les ténèbres – Romans érotiques :
Sans limites – Lorsqu’un humble jeune homme est capturé par le seigneur ennemi au cours d’une bataille, on s’attend à ce qu’il offre sa reddition à son ravisseur en lui proposant de coucher avec lui. Mais il est assez jeune pour que l’acte influence involontairement un processus hormonal qui le féminisera de façon irréversible. Mpreg, Féminisation, dénigrement. La Volonté du Ciel – Le prince Hiram de Pradeira est jugé inapte à régner après la mort de son père. En tant que descendants directs des dieux, seuls ceux de sa lignée peuvent régner. Donc pour éviter une guerre civile, il accepte d’avoir un enfant avec chaque prince des nobles maisons du royaume pour que son premier-né et héritier puisse hériter du trône, peu importe qui l’aura engendré. Mpreg, féminisation, perversion médicale, dépravation. La dot de son frère – Tony accepte d’accompagner son frère dans une nouvelle meute, en sachant qu’il devra se soumettre aux alphas en l’absence des omegas, mais étant prêt à sacrifier son propre confort pour permettre à Peter d’avoir une chance d’être aimé. Son frère est déjà amoureux d’une omega femelle et il est prêt à tout donner pour l’avoir. Tony y compris. Mpreg, féminisation, dénigrement, modification corporelle. Solution Ultime – Junen sera le prochain alpha de sa meute... jusqu’au jour où il est enlevé par un inconnu, un alpha que son père a rejeté et qui est déterminé à utiliser Junen pour atteindre celui-ci. En faisant de lui son oméga. Absence de consentement, grossesse masculine, kidnapping, féminisation, fisting, humiliation, modification corporelle, orgie sexuelle, maltraitance.
Règles à briser :
Fissures dans la Glace – Le hockey représente tout pour eux deux... jusqu’à ce qu’ils se rencontrent. Une romance dans le monde du hockey Alpha/Omega. Aucun Destin– Thomas et Uriel n’étaient pas destinés à finir ensemble. S’ils décident tout de même de se choisir, pourront-ils défier les autres ? Une romance Alpha/Beta.
À propos de l’auteur
N.J. Lysk (pronoms : comme vous voulez) est une personne queer – dans presque tous les sens du terme – pour qui les histoires ont toujours été un véritable foyer. Elle a étudié la linguistique et la littérature (ce qui veut dire que quelqu’un lui a offert une véritable excuse pour lire de manière professionnelle) et elle a fini par enseigner, mais l’écriture est son véritable amour. Accro à l’angoisse, à la ion et aux grossesses masculines, elle est toujours prête à essayer de nouvelles expériences sexuelles (dans un livre, c’est tout !). Elle a été captivée par l’univers des omégas grâce aux fan fictions (mais n’a pas assez de patience pour écrire sur les personnages des autres), et a récemment étendu son œuvre des loups-garous aux joueurs de hockey. Rejoignez sa newsletter pour vous tenir informé de ses publications et pour recevoir gratuitement des livres, des nouvelles et d’autres choses aussi cool. Ou suivez son twitter, son groupe Facebook ou son site Internet pour en apprendre plus sur les prochaines sorties et participer au programme Advanced Reader Copies. Vous pourrez acquérir les livres directement sur le site à un prix réduit – les nouvelles publications y sont également disponibles plus tôt.